Bygmalion : Nicolas Sarkozy fixé sur son avenir judiciaire ce mercredi
La cour d’appel de Paris va décider du renvoi, ou non, devant le tribunal correctionnel de l’ancien chef de l’État dans la retentissante affaire Bygmalion.
Retraité politique depuis sa défaite à la primaire de la droite en novembre 2016, Nicolas Sarkozy a été renvoyé pour « financement illégal de campagne électorale ». Il lui est reproché d’avoir dépassé le plafond légal des dépenses électorales en ayant engagé des frais pour au moins 42,8 millions d’euros, sans tenir compte de deux alertes des experts-comptables de sa campagne en mars et avril 2012. Ce chiffre est presque le double du plafond, alors fixé à 22,5 millions d’euros, conséquence d’une « stratégie » d’« occupation maximale de l’espace médiatique et télévisuel, avec la multiplication de meetings souvent spectaculaires », écrivait le juge Serge Tournaire dans son ordonnance.
La responsabilité de Sarkozy « pleinement engagée »
Pour justifier son recours, la défense de Nicolas Sarkozy avait souligné « l’inanité » de cette ordonnance signée par un seul juge d’instruction, Serge Tournaire. L’autre magistrat co-saisi, Renaud Van Ruymbeke, ne partageait pas l’analyse de son collègue sur la responsabilité pénale de l’ex-candidat à l’Élysée, selon plusieurs observateurs du dossier. « S’il y a un désaccord des juges, c’est qu’il y a des doutes, mais on ne sait pas sur quoi portent ces doutes », estime Me Alexandre Varaut, conseil de Philippe Blanchetier, l’un des avocats de l’UMP (devenu LR) mis en examen. Pour l’avocat général, l’ensemble des charges doit être confirmé. Dans ses réquisitions écrites, il estime que la responsabilité de l’ancien chef de l’État est « pleinement engagée », malgré « ses fermes dénégations quant à sa connaissance du dépassement du plafond de dépenses », selon une source proche du dossier.
L’affaire, révélée en 2014, a mis au jour un système de fausses factures pour masquer l’emballement des dépenses de meetings, alors organisés par une filiale de Bygmalion. L’un des responsables de la campagne, Jérôme Lavrilleux, avait évoqué un « train qui filait à toute vitesse ». La fraude avait consisté à imputer à l’UMP 16,2 millions d’euros de dépenses de Bygmalion, qui auraient dû figurer au compte officiel du candidat. Pour l’avocat général, c’est « en connaissance de cause » que Nicolas Sarkozy a donné « des instructions en faveur d’une augmentation des dépenses », ce que l’ancien président a toujours nié.
D’anciens cadres de l’UMP, comme son directeur général Éric Cesari, ainsi que des responsables de l’équipe de campagne, dont son directeur Guillaume Lambert ou Jérôme Lavrilleux, et des dirigeants de Bygmalion et des experts-comptables : les treize autres protagonistes sont poursuivis pour faux, escroquerie ou complicité, abus de confiance ou recel et complicité de financement illégal de campagne. La perspective d’un éventuel procès pourrait être retardée en cas de pourvoi en cassation. Si le procès devait avoir lieu, ce serait la seconde fois qu’un ancien chef de l’État est jugé au tribunal dans une affaire politico-financière sous la Ve République, après Jacques Chirac (1995-2007), condamné en 2011 dans le dossier des emplois fictifs de la mairie de Paris. L’audience à la cour d’appel coïncide avec l’examen le même jour d’un pourvoi en cassation, formé par Guillaume Lambert, contre la constitution de partie civile de l’association anticorruption Anticor dans ce dossier Bygmalion. (avec afp)