Brexit: la Cour suprême examine la légalité de la suspension du Parlement

La Cour suprême du Royaume-Uni a commencé l’examen mardi de la légalité de la suspension controversée du Parlement, décidée par le Premier ministre Boris Johnson mais dénoncée par ses opposants comme une manœuvre visant à imposer un Brexit sans accord.

La Cour va examiner les arguments des plaignants et du gouvernement durant trois jours mais la date du jugement n’est encore pas connue. Si, à l’issue de ce nouvel épisode dans la saga chaotique du Brexit, la Cour suprême juge la suspension illégale, le Parlement devra être immédiatement rappelé, selon des experts en droit.

Pour suspendre le Parlement, Boris Johnson avait dû obtenir l’assentiment de la reine Elizabeth II. L’audience doit déterminer si "le conseil donné par Boris Johnson à Sa Majesté" était "légal", a déclaré la présidente de la Cour suprême, Brenda Hale, en ouvrant l’audience.

Mais la réponse de la Cour suprême n’aura aucun effet sur le calendrier du Brexit.

"La résolution de cette question juridique ne déterminera pas ni quand ni comment le Royaume-Uni doit sortir de l’Union européenne", a prévenu Lady Hale, alors qu’une quarantaine de personnes anti-Brexit manifestaient en dehors de la Cour.

– "Wait and see" –

L’une d’elles était déguisée en "Hulk", moquant Boris Johnson qui a comparé ce week-end le Royaume-Uni à ce super-héros "ligoté" mais qui "s’échappe toujours".

"La meilleure chose que l’on puisse faire est attendre et voir ce que les juges disent", a déclaré à la BBC Boris Johnson.

"Nous devons voir ce que seront les termes précis de la décision et ce qu’ils signifient", a indiqué pour sa part le ministre de la Justice Robert Buckland, en assurant que le gouvernement "respectera" le jugement de la Cour.

A 44 jours du divorce prévu avec l’Union européenne, le scénario d’un Brexit sans accord reste ouvertement envisagé par Boris Johnson malgré certaines prévisions alarmantes, établies par son propre gouvernement, de pénuries alimentaires et de médicaments et de risques de troubles publics.

Une majorité de députés britanniques s’opposent à une sortie sans accord de l’UE et veulent annuler la suspension du Parlement, prévue jusqu’au 14 octobre, afin d’avoir plus de temps pour bloquer un "no deal". Ils ont déjà réussi à voter une loi obligeant Boris Johnson à demander à l’UE un report de trois mois du Brexit, prévu le 31 octobre – même si le Premier ministre a catégoriquement exclu de solliciter un délai.

– Décision "politique" –

Sous le feu des critiques de la classe politique comme de la société civile, la prorogation du Parlement a fait l’objet de plusieurs actions en justice aux verdicts opposés.

Le 11 septembre, la plus haute instance civile d’Ecosse a jugé la suspension "illégale" car elle avait selon elle pour objectif d’"entraver le Parlement".

Au contraire, répondant à la plainte d’une activiste anti-Brexit, Gina Miller, la Haute Cour de Londres a refusé de se prononcer sur le fond, estimant que la prorogation — une décision "politique" — ne relevait pas des tribunaux.

La journée de mardi est consacrée à l’exposé des avocats des plaignants: dans un cas Gina Miller, et dans l’autre 78 parlementaires pro-européens, conduits par Joanna Cherry, députée du parti nationaliste écossais SNP.

Les avocats du gouvernement répondront mercredi tandis que l’ex-Premier ministre conservateur John Major, qui soutient Gina Miller, sera entendu jeudi. D’autres intervenants prendront la parole.

– "Pratique déloyale" –

De son côté, l’ex-Premier ministre David Cameron, qui avait convoqué le référendum sur le Brexit, a dénoncé une "pratique plutôt déloyale" mais "pas illégale". "Au bout du compte, on doit travailler avec le Parlement et on ne peut pas nier son arithmétique ni les majorités en son sein", a-t-il argumenté dans une interview à la chaîne ITV.

Boris Johnson a perdu sa majorité absolue à la Chambre des communes, sa stratégie du Brexit ayant abouti à une "rebellion" de députés conservateurs qui ont du coup été expulsés du parti tory.

Il affirme désormais miser sur un accord de divorce avec l’UE avant un Conseil européen des 17 et 18 octobre à Bruxelles. Mais la Commission européenne a relevé lundi qu’aucune proposition en vue d’une solution opérationnelle n’avait encore été présentée par son gouvernement.

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