Aux Etats-Unis, Barack Obama sous le feu des critiques

contre l’autorisation de frappes en Syrie, et rares sont ceux à Washington qui osent prédire le résultat. Barack Obama a reçu hier à la Maison Blanche les sénateurs John McCain et Lindsey Graham, deux républicains dont l’influence sera cruciale : ils prônent depuis longtemps une intervention militaire en Syrie mais voudraient un mandat plus large que les quelques frappes «punitives» envisagées par le Président, pour aller jusqu’au renversement de Bachar al-Assad.

Hamlet. A l’opposé, plusieurs sénateurs démocrates, comme Patrick Leahy ou Chris Van Hollen, veulent réécrire la copie de la Maison Blanche pour limiter plus étroitement la mission des forces américaines. «J’espère qu’Obama va réussir son pari, mais c’est très risqué, analyse Brian Katulis, du Center for American Progress. Si jamais il perdait, ce serait terrible non seulement pour sa politique en Syrie mais pour tout le reste de sa présidence.»

D’ores et déjà, le débat américain repasse aussi au crible les qualités de «leader» de Barack Obama, qui a médusé jusqu’à ses propres conseillers en demandant soudain ce vote. Il ne lui manque plus que la veste en velours noir pour camper un parfait Hamlet, ironise le patron de Foreign Policy, David Rothkopf, sur le site du magazine. La politique d’Obama en Syrie s’est «essentiellement définie par les actes qu’il n’a pas commis et les décisions qu’il n’a pas prises», souligne Rothkopf, estimant que l’appel au Congrès risque maintenant de saper non seulement son autorité mais aussi celle de ses successeurs et des Etats-Unis en général. Obama n’en est plus à «diriger de l’arrière» (le fameux «leading from behind» lancé en 2011 par un de ses conseillers pour résumer son style de politique étrangère) mais à ne «pas diriger» du tout, a résumé aussi le président du Council on Foreign Relations, Richard Haass. «Il a tellement mal géré la Syrie qu’on ne peut s’empêcher de se demander s’il ne veut pas perdre ce vote», suspecte même un éditorial du très conservateur Wall Street Journal, accusant aussi Obama de vouloir «diriger de derrière le Congrès».

Le recours soudain au Congrès apparaît d’autant plus suspect que Barack Obama n’a cessé depuis 2011 de l’accuser de tous les maux et entraves à ses ambitions. En avril encore, il a vu bloquer son initiative, a priori bien moins risquée que celle demandée sur la Syrie, pour contrôler les ventes d’armes aux Etats-Unis.

Valse. Obtenir le vote du Congrès donnera plus de légitimité et de force à une opération particulièrement délicate, plaide a contrario la Maison Blanche, qui enchaîne aussi les «briefings» pour tenter de convaincre les élus. Mais Obama lui-même ne sera pas très présent ces prochains jours : il doit s’envoler dès ce mardi pour une visite en Suède, qui risque de paraître aussi incongrue, avant de participer au G20, jeudi et vendredi à Saint-Pétersbourg. Au moment même où il appelle à une intervention militaire en Syrie, Obama apparaît plus que jamais comme le «reluctant warrior» ou «guerrier malgré lui», déjà souvent décrit : celui qui voudrait se désengager du Moyen-Orient mais continue d’y faire le gendarme. Le renvoi en touche au Congrès rappelle aussi sa décision contradictoire sur l’Afghanistan en décembre 2009, quand il avait annoncé d’un même souffle l’envoi de renforts suivi de leur retrait. En Syrie, le Président «semble vouloir une chose et son contraire», a résumé l’éditorialiste au Time Fareed Zakaria.

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