Pas de réaction du gouvernement non plus. A peine un twitt très tardif du chef de gouvernement qui à 23h15 tweetait ses condoléances aux familles. « Nous sommes appelés à assumer nos responsabilités pour que de tels drames ne se reproduisent plus » écrira Saadeddine Elotmani en champion imbattable de la langue de bois.
A la prière d’Ad Dhor de ce lundi, les victimes, originaires de 8 villages différents, ont été inhumées.
Au département aux destinées duquel préside le tandem Laftit-Boutayeb, le drame est suivi de près, heure par heure, minute par minute. Très vite, en ce dimanche noir, un deuxième communiqué du ministère de l’intérieur annonce que le roi Mohammed VI a décidé de prendre personnellement en charge les frais d’inhumation et les funérailles des victimes, ainsi que les soins des personnes blessées. Des instructions sont données par le souverain pour qu’une aide et un soutien soient accordés dans l’immédiat aux familles des victimes.
Dans la soirée de ce même dimanche 19 novembre, un troisième communiqué du ministère de l’intérieur fait état de l’ouverture d’une enquête judiciaire, sous la supervision du Parquet, « pour déterminer les circonstances de ce dramatique incident et les responsabilités de chacune des parties » Une enquête administrative a été également diligentée au niveau du ministère de l’Intérieur. D’ailleurs l’enquête a commencé dès dimanche soir avec l’audition des autorités locales. « Sur la forme, tout est fait pour dire que les responsabilités seront établies. Mais sur le fond, on occulte les raisons profondes qui ont poussé des personnes souvent venues de loin à prendre autant de risques pour une bouchée de pain », fait remarquer cet associatif.
« Pourvu qu’ils deviennent plus riches quand il pleuvra »
Le décès de 15 personnes, majoritairement des femmes, venues bénéficier d’aide alimentaire dans une commune rurale du Maroc fait la « une » des médias internationaux. Au Maroc, les internautes sont en deuil. Sur la Toile, la colère est à son paroxysme. « Le drame d’Essaouira confirme que les femmes sont le maillon faible des structures sociales et la féminisation de la pauvreté », poste la journaliste freelance et activiste Fouzia Benyoub El Ouadie.« Svp, ne cherchez pas le coupable du drame d’Essaouira parmi les responsables de la distribution de denrées mais plutôt du côté des responsables de la pauvreté dans le pays » écrit le communicant Hamid Faridi. La journaliste Souad Mekkaoui poste toute son indignation : « Responsables politiques et gouvernement, daignez quitter vos bureaux feutrés, pour quelque temps, pour aller vers le peuple. Celui-là même qui vous a permis d’être là où vous êtes, aujourd’hui. Votre beau monde n’est pas le vrai Maroc. Si des femmes ont parcouru des kilomètres pour aller s’arracher des sacs de farine c’est qu’il y a danger dans la demeure ».
Toute la nuit, la colère ne baisse pas d’un cran. L’incompréhension aussi. Comment en est-on arrivé à un tel drame ? Pourquoi la misère des Marocains est-elle exploitée ? Est-il encore possible de mourir pour un panier de 150 dhs au Maroc 2017 ? Les questions se bousculent sur les réseaux sociaux. Neila Tazi, la parlementaire et organisatrice du festival des Gnaouas à Essaouira a bien tenté dans la nuit de dimanche d’apporter des réponses. Mal lui a pris.
Les leçons de la tragédie de Sidi Boualam , ces femmes décédées parce qu’elles sont les premières victimes de la violence économique, seront-elles tirées ? La problématique du développement humain se pose avec force. L’INDH est aux premières lignes : elle a entamé une troisième phase , couvrant la période 2017-2021 , placée sous le signe du développement des zones marginalisées et précaires et du renforcement de la cohésion sociale. 13 285 douars ont été recensés. Une enveloppe budgétaire de 20 milliards dh a été mobilisée dans le cadre du programme de lutte contre la pauvreté en milieu rural proposé par l’Initiative nationale de développement. Un nouveau souffle ? Ici plus qu’ailleurs, l’heure du bilan a sonné.