Attaque Thalys: le suspect nie toute action terroriste, faux répondent les Américains l’ayant neutralisé

Les enquêteurs ont tenté tout le week-end de faire parler Ayoub El Khazzani et fouillé le passé du jeune islamiste, maîtrisé alors qu’il essayait d’ouvrir le feu à la kalachnikov dans un train Thalys par de jeunes Américains qui ne doutent pas de ses intentions terroristes.

Selon l’avocate qui a assisté El Khazzani vendredi au début de sa garde à vue à Arras (nord de la France), avant son transfert en banlieue parisienne, le jeune homme de 25 ans était "médusé du caractère terroriste attribué à son action". Il est "squelettique", "peu instruit" et "paumé", a déclaré à l’AFP Me Sophie David.

Le Marocain affirme avoir trouvé la kalachnikov dont il était armé dans une valise cachée dans un jardin public près de la gare de Bruxelles-midi, où il dormait avec d’autres sans-abris, et avoir voulu s’en servir pour détrousser les passagers du Thalys "pour pouvoir se nourrir", a-t-elle raconté à plusieurs médias.

"On n’a pas besoin de huit chargeurs pour dévaliser un train", a rétorqué dimanche, lors d’une conférence de presse à Paris, Anthony Sadler, 23 ans, l’un des trois Américains ayant participé à sa neutralisation. "Il avait beaucoup de munitions, ses idées étaient vraiment claires", a renchéri son ami Alek Skarlatos, 22 ans, présent à ses côtés pour maitriser l’agresseur.

Outre un fusil d’assaut kalachnikov, la police avait indiqué que le jeune Marocain était en possession de neuf chargeurs remplis, un pistolet automatique Luger et un cutter.

Selon Spencer Stone, 23 ans, qui a été le premier des trois à se jeter sur l’agresseur et a été blessé au cutter, la kalachnikov de l’assaillant "semblait enrayée ou ne fonctionnait pas". Et l’attaquant "n’avait clairement aucun entraînement au maniement des armes", a relevé Alek Skarlatos, membre de la garde nationale de l’Oregon et récemment rentré d’une mission en Afghanistan. "S’il avait su ce qu’il faisait ou s’il avait fait ce qu’il fallait, il aurait pu vider les huit chargeurs et on ne serait probablement pas là aujourd’hui ainsi que beaucoup d’autres gens", a-t-il ajouté.

– Agir pour survivre –

Alors qu’Ayoub El Khazzani est toujours interrogé par les enquêteurs française, deux enquêtes sont en cours, l’une menée par le parquet antiterroriste de Paris, dont la compétence est nationale, et l’autre par le parquet fédéral belge.

Sa garde à vue peut durer jusqu’à mardi soir.

Son profil d’islamiste radical, repéré par les services de renseignement de quatre pays européens (Espagne, France, Allemagne, Belgique), oriente jusqu’à présent les enquêteurs vers la piste d’une attaque terroriste.

Selon un enquêteur français, le jeune homme a vécu d’emplois précaires et baigné dans la petite délinquance et la marginalité, à la limite de la rue.

El Khazzani a vécu sept ans en Espagne, de 2007 à mars 2014. Il y avait débarqué à 18 ans, d’abord à Madrid puis à Algesiras, en Andalousie, où il s’est fait remarquer par des discours durs légitimant le jihad. Le jeune homme a été détenu une fois pour "trafic de drogues" selon une source des services antiterroristes espagnols.

Lors de la conférence de presse, Spencer Stone a expliqué sa motivation à l’arrêter par "la survie et permettre aux autres du train de survivre aussi".

Après lui avoir sauté dessus, "j’ai commencé à l’étrangler, il sortait des armes de partout (…) Tous les trois, on lui a donné des coups de poing, je l’ai étranglé jusqu’à ce qu’il soit insconcient", a-t-il détaillé.

Les trois amis ont aussi été aidés par un sexagénaire britannique, Chris Norman. Tous ont été salués en héros et seront reçus lundi par le président français, François Hollande, qui leur remettra la Légion d’honneur, l’une des plus prestigieuses distinctions françaises.

Un Franco-américain vivant près de Paris et qui était à bord du Thalys, hospitalisé après avoir reçu une balle, ainsi qu’un passager français ayant tenté d’arrêter le tireur, seront également décorés ultérieurement, a indiqué l’Elysée.

Pour Anthony Sadler, "la leçon qu’on doit retenir c’est que dans un moment de crise comme ça", les gens devraient comprendre "qu’il faut faire quelque chose". "Lors d’un attentat terroriste comme celui-là, il faut faire quelque chose s’il vous plaît, ne restez pas là de manière passive", a-t-il plaidé.

– Polémique rôle des agents ferroviaires –

Présent dans la rame du suspect, l’acteur français Jean-Hugues Anglade a maintenu dimanche ses accusations d’"abandon" du personnel du train à l’égard des passagers terrorisés, qualifiant de "contre-vérité" les propos de la direction de Thalys assurant que les agents ferroviaires avaient bien agi.

L’un des contrôleurs du train a affirmé dimanche ne pas comprendre les critiques de l’acteur.

"Tout le monde a joué son rôle" dans le train, a jugé pour sa part Spencer Stone.

Huit mois après les attentats sanglants contre le journal satirique Charlie hebdo, une policière et dans un supermarché casher de Paris, la France maintient un niveau d’alerte très élevé contre d’éventuels actes terroristes. Depuis le début de l’année, plusieurs projets d’attaques jihadistes ont été déjoués.

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