Algérie: la fermeture de chaine El Watan TV provoque un tollé

La fermeture par les autorités algériennes de la chaîne de télévision privée El Watan TV a été vivement condamnée par la classe politique et les professionnels du secteur qui évoquent une instrumentalisation de la justice dans des affaires politiques.

De nombreux policiers ont investi, lundi, les locaux de la chaîne, saisi les caméras et le matériel audiovisuel et ordonné au personnel de quitter les lieux, avant de mettre sous scellés les locaux de la chaine, quelques jours après la diffusion d’une interview avec Madani Mezrag, l’ex-chef de l’armée islamique du salut, bras armé du FIS, qui a tenu des propos jugés menaçants envers le président algérien Abdelaziz Bouteflika.

Le Mouvement de la société pour la paix (MSP) a condamné une mesure "illégale", "anticonstitutionnelle" et "antidémocratique", jugeant que ce comportement prouve l’existence de perturbations au sein du système politique.

Pour le parti islamiste, cette mesure vise le propriétaire de la chaîne à cause de son appartenance politique.

La secrétaire générale du Parti des travailleurs, Louisa Hanoune, estime, pour sa part, que la justice a été instrumentalisée dans la fermeture de la chaîne de télévision. "C’est de l’instrumentalisation de la justice contre la liberté d’expression. Cette décision étrange est très grave" a-t-elle dénoncé.

La Ligue algérienne pour la défense des droits de l’Homme accuse le pouvoir de "refuser de mettre en application la loi sur l’audiovisuel pour maintenir sous chantage constant les chaînes de TV privées".

La ligue considère que "seul un organe de régulation tel que prévu par la loi sur l’audiovisuel est légalement habilité à examiner les éventuels manquements aux règles édictées par ladite loi", estimant que la fermeture de cette chaîne de télévision a mis à nu la politique de deux poids, deux mesures appliquée par le ministre de la Communication.

Elle rappelle que Madani Mezrag s’est déjà exprimé sur d’autres canaux médiatiques où il avait tenu des propos d’une extrême gravité sans qu’il y ait plainte contre lui ni fermeture des chaînes qui lui avaient ouvert leurs plateaux, s’étonne l’ONG.

"Les autorités algériennes préfèrent couper les vivres à 170 employés, au lieu d’interpeller la personne responsable de propos menaçants tenus à l’encontre du chef de l’Etat", assène le directeur de la chaîne Djafer Chelli.

Le directeur a, aussi, fait savoir qu’il ne va pas baisser les bras, qu’une cellule de crise est mise en place et qu’une action en justice va être actionnée.

Même son de cloche chez les travailleurs de la chaîne, qui jugent la décision "injuste et arbitraire"", tout en s’inquiétaient de leur devenir.

C’est la deuxième fois que les autorités ferment une télévision privée. En pleine campagne électorale pour la présidentielle de 2014, des gendarmes font irruption, le 11 mars de cette année, dans les locaux de la chaîne Atlas TV et ont confisqué son matériel. Le lendemain, la chaîne a cessé d’émettre.

Atlas TV, dont la fermeture a été condamnée par de nombreuses organisations internationales, s’était distinguée par la couverture non-stop des manifestations organisées par le mouvement "Barakat" (ça suffit) contre la candidature du président Abdelaziz Bouteflika à un quatrième mandat.

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