Agression islamiste ou affabulation? Un responsable des Restos du coeur jugé à Bobigny

Le couple d’agresseurs armé d’une hache, le couteau planté dans le ventre au cri d’"Allah Akbar", la lettre de menace… A-t-il tout inventé ? Un gérant bénévole des Restos du coeur de Montreuil comparaît jeudi à Bobigny pour "dénonciation de crime ou délit imaginaire".

En novembre, le tribunal avait renvoyé le procès de cet homme de 59 ans pour permettre une expertise médico-psychologique et une enquête de personnalité.

Contacté par l’AFP, son avocat, Jean-Louis Granata, a dit qu’il n’y avait "aucun changement" dans la position de son client. "Ce qu’il a subi n’a pas été inventé", affirmait-il en novembre.

1er juillet 2016. Au petit matin, les secours trouvent le gérant bénévole des Restos du coeur de Montreuil, en banlieue parisienne, dans les locaux de l’association, un couteau fiché dans l’abdomen. Il leur raconte avoir été agressé par un couple – un homme de type africain et une femme voilée – qui auraient crié "Allah Akbar, chien d’infidèle" en s’échappant.
Le bénévole explique aussi aux enquêteurs avoir déposé plainte quelques mois plus tôt, après avoir reçu une lettre de menace dans laquelle était notamment écrit: "Dieu est grand, sale chien de franc-maçon".

Rapidement, des sources policières locales appellent "à la prudence". Absence de témoin, éléments trouvés sur place: rien ne corrobore la version de celui qui se présente comme une victime.

La brigade criminelle de la police judiciaire parisienne est chargée de l’enquête ouverte par le parquet de Bobigny pour tentative d’homicide volontaire. Mais, quatre jours plus tard, c’est le responsable associatif qui est lui-même placé en garde à vue, soupçonné d’avoir tout inventé.

Sur la lettre de menace, son écriture

A l’issue de son audition, un magistrat de Bobigny décide de le renvoyer devant le tribunal pour "dénonciation de crime ou délit imaginaire". L’enquête n’a "pas permis de confirmer les éléments de son récit de l’agression", explique alors le parquet.

"Personne n’a confirmé ses déclarations", précise à l’AFP une source proche de l’enquête, ajoutant que les caméras de surveillance n’ont pas non plus enregistré d’images de personnes prenant la fuite.

L’ADN de son épouse – qui a été mise hors de cause – a par ailleurs "été retrouvé sur la hache", poursuit cette source, laissant penser que l’outil pourrait appartenir au bénévole.

Enfin, des examens graphologiques pratiqués sur la lettre de menace et sur d’autres documents écrits par le prévenu montrent qu’"il s’agit du même scripteur", a révélé en novembre tribunal de Bobigny.

Après l’agression, le ministre de l’Intérieur Bernard Cazeneuve avait fait part dans un communiqué de sa "plus vive indignation" et a adressé un "message de solidarité et d’encouragement à l’ensemble des bénévoles des Restos du coeur".

Dans les mois précédents, plusieurs affaires du même type avaient marqué l’actualité, en pleine période de menace jihadiste en France, où des attentats ont fait 239 morts depuis 2015.

En mai 2016, un enseignant juif accusé d’avoir inventé une agression antisémite quelques jours après les attentats du 13 novembre 2015 a été condamné à Marseille à six mois de prison avec sursis.

En février, c’est un instituteur d’Aubervilliers, en Seine-Saint-Denis, qui avait affirmé avoir été agressé par un jihadiste dans sa classe, avant de se rétracter. Également jugé pour dénonciation de crime imaginaire, il avait été relaxé pour vice de procédure: il avait reconnu avoir tout inventé alors qu’il était hospitalisé sous morphine, des aveux considérés comme "non spontanés" par le tribunal de Bobigny qui avait frappé la procédure de nullité.

afp

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