A partir de quand est-on officiellement hypocondriaque ?

..Si nous avons tous peur de la maladie, chez certains d’entre nous, cette peur prend des proportions telles qu’elle devient impossible à raisonner. Propos rassurants de l’entourage et des médecins, examens multiples où jamais aucun problème physiologique n’est décelé : rien n’y fait. La personne hypocondriaque a la conviction qu’elle est très malade ou qu’elle peut le devenir si elle ne fait pas sans cesse attention à tout ce qui l’entoure, à tout ce qu’elle fait, mange, etc. Et cette conviction altère son fonctionnement social, professionnel ou sa vie amoureuse.

Comment expliquer le mécanisme de l’hypocondrie ?

Avez-vous déjà remarqué que quand on dit ou pense « je me sens bien », cela veut dire que l’on se sent bien dans son corps, perçu de façon unifiée et harmonieuse ? Or, chez les personnes hypocondriaques, cette unité corporelle est rompue.

La personne hypocondriaque désinvestit le monde extérieur et va jusqu’à s’identifier à son organe malade, qui la persécute.

Quelques exemples

Aujourd’hui, ce que l’on tend à appeler hypocondrie recouvre des modes d’expressions multiples, d’intensité plus ou moins sévère. Voici quelques exemples, du plus anodin au plus grave :

Amel est une femme à qui tout semble réussir : un gentil mari, de beaux enfants, un travail intéressant. Pourtant, chaque fois qu’elle prend le métro, la jeune femme a une peur atroce d’attraper « les bactéries des autres ». Sitôt rentrée chez elle elle se lave les mains abondamment, parce que « choper les miasmes des autres, non merci. »

Kelly était une fille joyeuse et, de son propre aveu, « pas du genre à se prendre la tête ». Mais depuis un an et demi, elle a peur de tout, et surtout, d’avoir une maladie mortelle. Elle passe des heures sur des sites internet et invariablement se diagnostique tantôt une leucémie, tantôt un cancer. Elle ne comprend pas du tout d’où lui viennent ces peurs. Jusqu’au jour où elle évoque son meilleur ami mort il y a deux ans, dans un accident de la route, alors qu’ils devaient se retrouver le soir même pour aller en boîte…

Dès qu’elle a mal à la tête, Blandine est persuadée d’avoir une tumeur au cerveau. Ça ne peut pas être un simple rhume, ni la fatigue, elle en est sure : elle est malade, très malade. Consultations en neurologie, scanners, IRM, on n’a jamais trouvé la moindre tumeur chez Blandine. Après chaque consultation, elle est rassurée… jusqu’à la prochaine crise d’angoisse. Au début, son entourage, très angoissé pour elle, l’accompagnait dans toutes ses virées aux urgences. Maintenant, sa famille la laisse se débrouiller toute seule. « C’est encore Blandine qui fait sa crise », dit-on. Blandine se sent abandonnée et incomprise.

Richard perd ses cheveux. Ses amis ont beau l’assurer que certes, il est juste « un peu dégarni devant » mais il est très loin d’être chauve, Richard pense qu’ils lui mentent, mais il ne sait pas dans quel but. Il s’inquiète de ses modifications corporelles. Les semaines passent. Bientôt, il n’ose plus sortir de chez lui à cause de cette « chute ». Des heures durant, il se scrute, inquiet, dans la glace, tâte son crâne, essaie de compter le nombre de cheveux qui restent, et en vient à réduire son identité à son organe malade, celle de sa « tête déplumée ». Progressivement, le monde extérieur prend pour lui une texture étrange, il trouve les gens autour de lui très bizarres, et puis en plus de ses cheveux qui continuent à tomber, quand il se regarde dans la glace, il a l’impression d’avoir des pectoraux moins poilus, plus proéminents. Un jour, devant son miroir, Richard bascule dans la folie : il devient persuadé que des forces maléfiques vont finir par le transformer en femme.

Quand l’incompréhension de l’entourage accroît le désarroi.

Pour l’entourage, la plainte de l’hypocondriaque est souvent difficilement compréhensible, ce qui accroît son désarroi. L’exemple typique étant celui de proches qui, au départ, s’inquiètent puis, après avoir constaté qu’à l’issue de plusieurs séries d’examens, les médecins n’ont rien trouvé, se laissent gagner par la colère : « arrête ta comédie », « malade imaginaire », « tu n’as rien, alors arrête de penser à tes maux de tête ! » Ce ras-le-bol de l’entourage, loin de calmer l’hypocondriaque vont accroître son désarroi et sa conviction d’être seul contre tous.

Or, si l’hypocondriaque est un malade imaginaire, sa souffrance et son désarroi sont bien réels. Et ils doivent être entendus car ils disent quelque chose d’une détresse terrible, qu’il faut interroger.

En résumé, le meilleur conseil que l’on puisse donner à une personne qui semble hypocondriaque est d’entreprendre une psychothérapie, pour l’aider à comprendre ce qui se cache derrière son angoisse ou/et apprendre des stratégies pour essayer de les diminuer, autant que possible.

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