A Essaouira, les mélodies Gnaoua se mélangent aux musiques du monde

Une vague de fans avides de musique et de liberté déferle chaque année sur Essaouira pour le Festival Gnaoua, parfois décrit comme le « Woodstock marocain », où l’on célèbre dans une ambiance relax une musique traditionnelle qui a séduit les plus grands.

A chaque édition, l’ancienne Mogador prend des airs de Nouvelle-Orléans africaine avec cet étonnant rendez-vous musical qui propose un métissage unique au monde.

Des pointures du jazz comme Pat Metheny, Didier Lockwood ou Marcus Miller ont joué ici avec les plus célèbres des mâalems, les maîtres de la musique Gnaoua.

Tout se passe non loin des remparts médiévaux aperçus dans la série à succès Game of Thrones. Le soir, des milliers de spectateurs tournent sur eux-mêmes, tendent les bras, secouent les mains et balancent leur tête dans une danse qui devient transe.

Leurs mouvements suivent le tempo donné par les mâalems, invités à fusionner avec des artistes venus d’ailleurs, pour le 22e festival Gnaoua et musiques du monde qui se termine dimanche.

"C’est un laboratoire musical où on essaye toutes les alchimies possibles", confie à l’AFP le batteur Karim Ziad, codirecteur artistique du festival.

– Descendants d’anciens esclaves –

La ville fortifiée, accrochée à une presqu’île rocheuse assaillie par l’océan Atlantique, est devenue le sanctuaire de la musique Gnaoua. Rituelle, voire initiatique, sa tradition a été perpétuée par les descendants d’anciens esclaves venus d’Afrique subsaharienne.

Sa filiation africaine favorise les métissages avec le blues et le jazz, mais aussi le flamenco, le reggae ou encore la salsa.

Jusqu’à la naissance du festival, la confrérie gnaoua qui associe rituels africains et culte des saints de l’islam était peu connue, voire mal perçue au Maroc. Mais les temps changent: "le festival a aidé à réhabiliter leur image", se félicite Karim Ziad.

Le rendez-vous attire chaque année entre 300.000 et 400.000 spectateurs dans la cité touristique, célébrée pour ses ruelles étroites, son port de pêche et ses façades blanches et bleues.

En 2015, après avoir partagé la scène avec le mâalem Mustapha Bakbou, le célèbre bassiste américain Marcus Miller s’est même converti au guembri, l’instrument sacré des Gnaoua, une sorte de luth tambour à trois cordes.

L’équipe du festival se mobilise pour faire inscrire l’art Gnaoua au patrimoine culturel immatériel de l’Unesco. La décision est attendue en décembre.

– Ambiance –

Le festival, c’est aussi cette "ambiance magique" dans une "ville où l’on se sent bien", souligne Karim Ziad. Dans les rues, c’est un autre festival de couleurs qui s’offre aux visiteurs.

Coiffures afro, dreadlocks, vêtements amples aux motifs multicolores, gros tatouages et bijoux ethniques… Des milliers de touristes étrangers et de Marocains paradent au son des guembris et des castagnettes en acier (Qraqeb).

On parle toutes les langues et tous les styles sont permis, mêmes les plus excentriques.

"On trouve des looks hippies, fashion, traditionnels", s’amuse Abdelaziz, 38 ans, surnommé "Jésus" par ses amis. Cheveux longs attachés, barbe fournie et visage caché sous d’épaisses lunettes de soleil, cet "habitué" du festival "s’intéresse aux musiques traditionnelles, spécialement Gnaoua".

Pour ce musicien marocain qui a sillonné l’Afrique de l’Ouest à pied, le festival "est un peu le Woodstock marocain", même si, selon lui "les temps ont changé".

"Ici la star c’est Gnaoua", souffle cet "amoureux de la nature" qui loge dans un riad chic de la vieille ville, classée au patrimoine mondial de l’Unesco.

Zakaria, 19 ans, dort lui à la belle étoile dans un parking près de la plage, malgré la fraîcheur du soir.

"Je viens depuis trois ans pour l’ambiance et la musique", raconte ce jeune Marocain, sweatshirt et casquette à l’envers. Cet étudiant de la faculté des sciences de Marrakech est venu en autostop, car "cela fait partie du voyage".

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