Tutoiement. D’entrée, hier soir, David Pujadas a cru mettre les pieds dans le plat en évoquant les mauvaises relations personnelles qu’entretiennent François Hollande et Martine Aubry. Le présentateur de France Télévisions a en réalité fait l’inverse. Il a soldé d’entrée la question du combat de coqs et des dérapages potentiels. François ? J’ai depuis des années avec lui une relation «amicale et franche», a répondu la maire de Lille. Sans sourire mais avec un tutoiement bienvenu. Martine ? Je l’apprécie et «j’ai toujours veillé à avoir du respect» pour elle «et je l’aurai ce soir», a renchéri le président du conseil général de Corrèze. L’un et l’autre assurant que «dès lundi», tous les socialistes seront unis derrière le candidat désigné.
Bizarrement, ce vœu semblait crédible. Pas garanti, mais crédible. Pour une seule raison : cette compétition entre socialistes s’est tenue sous la pression inédite d’environ 3 millions de personnes qui dimanche, au-delà de leur choix personnel, ont surtout déclaré aux ténors socialistes qu’elles avaient une idée fixe en tête : gagner en 2012. Il y avait dans les files d’attente une gravité qui délivrait un message simple : «Déconnez pas.» Martine Aubry et François Hollande n’ont hier pas déconné. Ce qui n’a pas empêché l’ancienne ministre du Travail de tacler son concurrent, parlant dès les premières minutes de son expérience ministérielle ou du flou de François Hollande sur la règle d’or. Ni ce dernier de répliquer en évoquant la gauche «solide et sincère» qu’il préfère à la gauche «sectaire». Le minimum syndical de méchanceté, mais rien de dramatique susceptible de faire fuir l’électeur des isoloirs pour le second tour.
Sérieux. Le débat a-t-il du coup été ennuyeux et vain. Non. Il a été sérieux, argumenté, sur la crise, l’emploi des jeunes, la dette, les retraites, l’éducation… A tel point que l’on s’est amusé, en cours de route, à imaginer François Fillon et Jean-François Copé, en 2016, face à face lors du débat de second tour de la première vraie primaire UMP (la formation majoritaire ayant finalement conservé son sigle…). Avec cette question en tête : seraient-ils capables de débattre ainsi devant plusieurs millions de Français, sans concession mais sans baston. La gauche a hier prouvé qu’elle l’était. Encore trois jours à tenir !
*Libération