Vol d’Air Algérie: ce que l’on sait du crash

L’épave de l’avion d’Air Algérie a été retrouvée dans le nord du Mali, près de la frontière avec le Burkina Faso. L’avion s’est écrasé avec 118 personnes à son bord, jeudi. Des soldats français ont été envoyés sur place pour sécuriser la zone. Une boîte noire a été récupérée.

Quand a-t-on perdu contact avec le vol AH 5017 ?

Le vol AH 5017 d’Air Algérie est une ligne régulière qui assure la liaison Ouagadougou-Alger quatre fois par semaine. Mercredi, avant son départ du Burkina Faso, l’appareil aurait fait un voyage aller-retour depuis Paris vers Batna, dans le sud-est de l’Algérie. Selon une source officielle burkinabè contactée par RFI, l’avion aurait décollé à 01h17 TU de Ouagadougou au Burkina Faso, au lieu de 01h05 initialement prévu. Le vol devait arriver vers 5h40, heure locale (4h40 TU), à Alger. Toujours selon cette source, le contact a été perdu très peu de temps après ce décollage, à 1h38 TU.

Du côté de la compagnie aérienne, autre son de cloche : on déclare que l’avion a perdu le contact avec la navigation aérienne algérienne 50 minutes après son décollage en direction d’Alger, c’est-à-dire à 1h55 TU. Le ministre français des Affaires étrangères Laurent Fabius a quant à lui déclaré que le contact avait été perdu à 1h47 TU. L’appareil, affrété par Air Algérie, était loué par Air Algérie à une autre compagnie espagnole, Swiftair. C’est un MD-83, un McDonnell Douglas, vieux de 18 ans.

Qui était à bord de l’avion ?
Après de premières informations qui faisaient état de 116 personnes, dont six membres d’équipage, on sait qu’elles étaient 118 à se trouver à bord, dont 51 Français et 28 Burkinabè, selon les autorités de Ouagadougou. Les autres passagers étaient originaires de plusieurs autres pays, dont le Canada, le Liban, l’Algérie. Les six membres d’équipe étaient espagnols.

D’après les militaires français présents sur place, il n’y a aucun survivant.

L’Elysée a annoncé dans la nuit de jeudi à vendredi que l’épave « désintégrée » a été localisée dans le nord du Mali, dans la région de Gossi, plus précisément près du village de Boulekessi, à 50 kilomètres au nord de la frontière avec le Burkina Faso. L’alerte est venue des autorités burkinabè, qui affirment avoir été averties par des bergers, gardiens de troupeaux, qui disent avoir vu l’avion tomber, déjà en feu, avant de s’écraser.

Ouagadougou a alors envoyé sur place, par hélicoptère, une équipe de reconnaissance. Ses membres ont repéré l’épave, constaté que l’appareil était complètement détruit. L’hélico a dû rentrer avec la tombée de la nuit.

D’après le ministère français de la Défense, un drone de type Reaper a ensuite été orienté vers la zone, et a localisé également l’appareil d’Air Algérie. L’armée française a alors envoyé un détachement héliporté de plusieurs hommes venus de Gao. A 2h du matin, heure de Paris, ils ont confirmé qu’il s’agissait bien du vol AH 5017.

Quelles peuvent être les raisons du crash ?

Parmi les hypothèses avancées, les conditions météorologiques semblent être la plus sérieuse. En cette période de l’année, elles sont particulièrement mauvaises dans la région où s’est produit le crash. Elle se trouve dans le front intertropical, une ceinture de zones de basses pressions qui court le long de l’Equateur et qui comporte des orages importants avec des têtes de cumulo-nimbus qui peuvent monter jusqu’à 15 000 mètres.

« Les avions ne peuvent pas passer au-dessus, ils sont obligés de les contourner. En général, ces orages se développent la nuit et les pilotes les repèrent avec les radars météo, a expliqué à RFI le commandant de bord Jean-Pierre Otelli. Un avion qui rentrerait dans un cumulo-nimbus du front inter-tropical, soit par erreur, soit parce que le pilote n’aurait pas d’autre possibilité, il n’a aucune chance, il est évident qu’il va se crasher. »

Ce ne serait pas la première fois qu’on avion se crashe dans ces circonstances. C’est ce genre d’orages qu’a rencontré le vol Air France 447, qui faisait la liaison Rio-Paris et qui s’était abîmé dans l’océan Atlantique en 2009. En août 2005, c’est un avion de la West Caribbean qui avait été pris en pleine nuit dans ce même type d’orage. Cent soixante passagers avaient trouvé la mort.

Avant qu’on perde contact avec l’avion d’Air Algérie ce jeudi, son pilote avait demandé un changement de direction en raison des mauvaises conditions météorologiques. Mais d’après l’ancien commandant de bord Jean Serrat, il s’agit d’une procédure très fréquente qui ne constitue donc pas un élément suffisant pour comprendre les raisons du crash. Le ministre français des Affaires étrangères Laurent Fabius a d’ailleurs prévenu : « On ne doit exclure aucune hypothèse avant d’avoir tous les éléments. »

Celle d’un tir de missile depuis le sol a cependant été écartée par Paris. « La possibilité d’un tir depuis le sol (est) hautement improbable voire impossible », a déclaré le secrétaire d’Etat aux Transports Frédéric Cuvillier. Restent donc celles d’une panne ou d’un attentat à la bombe. L’ancienneté de l’appareil pourrait en effet accréditer la thèse de la défaillance technique. Mais, selon le directeur général de l’aviation civile, Patrick Gandil, l’avion avait été inspecté « il y a deux ou trois jours » lors de son passage en France et était « en bon état ». Cela « n’exclut pas qu’il y ait eu une panne fortuite, mais ce n’est vraiment pas la première hypothèse », a-t-il ajouté. Patrick Gandil a par ailleurs rappelé la bonne tenue de la compagnie Swiftair. La possibilité d’un attentat n’a pas encore été écartée, mais paraît peu probable pour le gouvernement français.

Que peut-on attendre de l’enquête ?

Une enquête préliminaire a été ouverte par le parquet de Paris pour « homicides involontaires ». Un détachement terrestre de l’opération Serval parti cette nuit de Gao par voie routière est arrivé ce vendredi matin sur la zone du crash pour la sécuriser, recueillir des éléments utiles à l’enquête ainsi que les corps des passagers. Il compte une centaine de soldats et une trentaine de véhicules.

Dans une déclaration à l’Elysée ce vendredi matin, le président François Hollande a annoncé qu’une équipe d’experts du Bureau d’enquêtes et d’analyses pour la sécurité de l’aviation civile a été également envoyée sur place pour « mener toutes les investigations nécessaires ». Elle est accompagnée d’hommes de la gendarmerie des transports aériens, une formation spécialisée de la gendarmerie nationale dont la mission s’exerce au sein de la Direction générale de l’aviation civile (DGAC).

Concrètement, il va s’agir pour les enquêteurs de collecter le maximum de pièces de l’appareil afin de reconstituer l’avion pour comprendre ce qu’il s’est passé. La moindre pièce a son importance. En 1989, après l’explosion du DC-10 d’UTA, les enquêteurs étaient parvenus à trouver des morceaux du petit magnétophone contenant les explosifs qui avaient fait sauter l’appareil.

Une boîte noire a été récupérée, a déjà indiqué François Hollande. Elle est en cours d’acheminement pour analyses. D’après le commandant de bord Jean-Pierre Otelli, elle devrait pouvoir permettre d’éclairer les circonstances du crash. « On aura les enregistrements des conversations, on saura si quelque chose a généré une perte de contrôle à cause de la météo ou d’une bombe et on aura également des éléments sur les commandes de vol », a-t-il expliqué à RFI. Le MD-83 étant un vieil appareil, ses boîtes n’enregistrent cependant pas autant d’informations et de paramètres que celles des avions plus récents.

François Hollande a par ailleurs signalé que les débris de l’avion étaient concentrés sur un « espace limité ». Avec les boîtes noires, le périmètre de l’épave constitue en effet un élément important pour l’enquête. Il permet de déterminer si l’avion est arrivé entier au sol ou s’il s’est désintégré en vol. L’épave du vol MH 17 de la Malaysia Airlines, abattu par un missile le 17 juillet dans l’est de l’Ukraine, était par exemple répartie sur 25 kilomètres.

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