Une société unie pour lutter contre la radicalisation

Par Ali Jiar*

Les communautés juive et musulmane se sont réunies à Paris la semaine dernière pour commémorer ensemble le triste anniversaire des attentats qui ont touché la France en janvier 2015, quelques jours seulement après qu’une attaque terroriste a visé la Turquie.

Le monde a vu le nombre de morts liées à des attentats multiplier par cinq depuis les évènements du 9 septembre 2001. Nous faisons face à une banalisation des attaques terroristes visant des populations civiles innocentes, sans distinction de religion ou de nationalité, meurtries dans les activités de leur vie quotidienne : marché de Noël, rencontres sportives, transports en commun, lieux de culte, salle de concert, restaurants. Une véritable guerre contre le terrorisme est en train de marquer l’Histoire du XXIème siècle. La fréquence de ces tueries illustre une fois de plus que le phénomène de radicalisation est un cancer social contre lequel un remède doit être soigneusement et rapidement élaboré.

Plus de 15 000 hommes et femmes de plus de 80 Etats ont grossi les rangs de combattants terroristes étrangers, nourrissant la crainte de futures actions violentes. En particulier, des jeunes âgés de 10 à 30 ans sont attirés par une doctrine radicale loin du message originel de paix des religions monothéistes, et dont la communauté musulmane elle même est victime. Les causes sous-jacentes de ce phénomène sont nombreuses et varient selon le contexte : sentiments d’injustice et d’exclusion, facteurs psychologiques, économiques ou sociaux, défiance à l’égard du système politique, interprétation extrémiste de la religion, moyens de recrutement utilisés, milieu carcéral, petite délinquance.

Plusieurs pays se sont engagés dans un effort de déradicalisation, cependant, les programmes de prévention contre le terrorisme comme Prevent au Royaume Uni ou les centres de dé-radicalisation en France sont à un stade expérimental et doivent encore faire leur preuve.
D’autres solutions plus simples et pragmatiques sont d’ors-et-déjà à notre portée.

La puissance publique et les forces de l’ordre ont bien sûr un rôle crucial à jouer dans cette lutte en assurant la protection des droits des citoyens, l’égal accès à la justice, à l’éducation et à l’information, et développer des conditions d’emploi durables. De même, les leaders religieux doivent être soutenus dans leurs efforts pour promouvoir le dialogue interreligieux et la tolérance, et contrebalancer la machine de propagande terroriste avec un discours modéré et adapté. C’est pour soutenir cette démarche que les collectivités territoriales de Sevrin et de Vincennes ont joint leurs efforts et multiplié les initiatives dans des quartiers difficiles, organisant des campagnes de sensibilisation et soutenant les dialogues interreligieux.

Parallèlement, l’utilisation des réseaux sociaux, certainement le plus puissant outil de recrutement des groupes terroristes, ne peuvent être ignorés pour lutter contre la propagande des recruteurs. La jeunesse devrait recevoir un accompagnement approprié pour explorer les mondes réels et virtuels avec un esprit critique ; les professeurs et les parents devraient quant à eux être informés sur la manière de repérer les signes avant-coureurs de la radicalisation et de ses différentes phases. L’éducation est certainement la meilleure arme pour prévenir la radicalisation et la xénophobie que se soit à l’école, au sein d’associations ou dans les familles.

Les actes terroristes ne doivent pas permettre de nourrir les discours racistes et les amalgames à l’égard des populations étrangères, des réfugiés ou des communautés religieuses qui ne peuvent êtres tolérés. Les médias ont la responsabilité d’éviter la normalisation de ces propos haineux et discriminatoires, et de ne pas tomber dans le sensationnalisme.

Il est de notre devoir de doter la jeunesse des valeurs de tolérance et des outils nécessaires afin de devenir les vecteurs de changement de demain. La jeunesse doit retrouver rêves et espoirs pour ne pas céder au piège de l’extrémisme. Pour ce faire, la société doit redonner sa confiance aux nouvelles générations et nourrir leurs ambitions et leurs perspectives d’avenir, notamment via leur participation au processus de paix et la prise de décision.

L’engagement de la société civile est primordial pour réaliser cette objectif. La création d’un sens d’appartenance et de responsabilisation via la participation à la vie associative, sportive, ou culturelle est un vecteur-clé d’engagement, d’échange et de promotion de valeurs telles que la tolérance, l’égalité, la fraternité, et de la volonté de vivre ensemble. C’est toute la philosophie du projet citoyen « Flamme de la fraternité » qui a parcouru la distance de Paris à Marrakech entre les COP 21 et 22.

C’est le concours de chacun des membres de la société qui permettra de redonner cette confiance nécessaire à notre jeunesse et de faire ensemble le deuil de nos victimes, comme ont pu le faire au siège du R.A.I.D. les otages survivants et familles des victimes de l’Hypercacher avec les agents opérationnels. Seulement une société unie dans un esprit de fraternité et de solidarité peut triompher du terrorisme.

*Ali Jiar
Maire adjoint à l’Economie de Sevran
Diplômé de Centrale Paris
Cycle des Hautes Etudes de l’ENA
Les Voix de la Paix

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