Tunisie: le nouveau gouvernement obtient la confiance du Parlement

Le Parlement tunisien a accordé jeudi, plus de trois mois après les élections, sa confiance au nouveau gouvernement, une large coalition dominée par le premier parti du pays Nidaa Tounès mais incluant aussi les islamistes d’Ennahda.

Sur les 204 élus présents, 166 ont voté pour cette équipe qui a dû être remaniée après qu’une première mouture a été très critiquée, 30 contre et huit députés se sont abstenus.

"Notre devise au gouvernement sera d’abord le travail, ensuite le travail, et (…) rien d’autre que le travail", a promis devant le Parlement le Premier ministre Habib Essid.

"C’est un gouvernement d’union nationale", a dit à l’AFP le nouveau ministre de la Santé Saïd Aïdi, tandis que Samir Dilou, député et ancien ministre d’Ennahda, jugeait que cette majorité "confortable" permettrait aux ministres de "travailler dans la sérénité".

La cérémonie officielle de passation du pouvoir entre M. Essid et l’actuel chef du gouvernement Mehdi Jomaa, chargé de gérer les affaires courantes, doit avoir lieu vendredi matin selon le Premier ministère.

– Tâche ardue –

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M. Essid, un "indépendant" qui fut ministre de l’Intérieur après la révolution de 2011 mais a aussi occupé plusieurs postes sous le dictateur déchu Zine El Abidine Ben Ali, avait été choisi par Nidaa Tounès, vainqueur des législatives de fin octobre.

Sa tâche n’a pas été de tout repos: sa première liste, n’incluant que Nidaa Tounès, un autre parti et des indépendants, avait été attaquée par plusieurs formations qui l’ont jugée pas assez représentative de la scène politique avant d’annoncer qu’elles voteraient contre.

Nidaa Tounès n’ayant remporté que 86 des 217 sièges de l’Assemblée et le gouvernement ayant besoin d’une majorité de 109 voix pour passer, M. Essid a donc été contraint de revoir sa copie et d’y inclure notamment Ennahda. Au grand dam de nombreux partisans de Nidaa Tounès, un parti créé pour faire contrepoids aux islamistes et qui a fait une campagne électorale virulente contre eux.

La nouvelle équipe est dominée par Nidaa Tounès, le parti du président Béji Caïd Essebsi, qui obtient six portefeuilles dont celui des Affaires étrangères. Les ministères de l’Intérieur, de la Défense et de la Justice ont pour leur part été confiés à des indépendants.

Ennahda a de son côté obtenu le portefeuille de l’Emploi et trois secrétariats d’Etat.

Trois autres formations politiques sont représentées dans l’équipe gouvernementale: l’Union patriotique libre ( UPL, 16 députés), parti d’un richissime patron de club de foot, Afek Tounes (libéral, 8 élus) et le Front du salut national, une coalition ne comptant qu’un seul député.

Si M. Essid a modifié sa liste initiale, certains ministres y figurent toujours malgré les critiques, comme le magistrat Najem Gharsalli à l’Intérieur, accusé par des juges d’avoir collaboré avec le régime de Ben Ali. Le ministère de la Jeunesse et des sports reste, lui, occupé par un membre de l’UPL malgré les craintes de conflit d’intérêts.

Le Front populaire, une coalition de gauche et d’extrême-gauche, avait annoncé qu’il voterait contre ce gouvernement en raison de la présence des islamistes mais en se disant aussi sceptique sur son programme.

– Lutte antiterroriste –

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M. Essid avait affirmé mercredi devant le Parlement que sa priorité serait la lutte antiterroriste, alors que la Tunisie fait face depuis la révolution à l’essor de groupes jihadistes responsables de la mort de dizaines de policiers et de militaires et de deux figures politiques anti-islamistes. De 2.000 à 3.000 Tunisiens sont par ailleurs partis combattre dans les rangs des islamistes radicaux en Irak et en Syrie.

"Il faut se dépêcher d’adopter la loi antiterroriste" en suspens depuis des mois, avait-il dit.

M. Essid avait également assuré que la Tunisie, après quatre années d’une transition post-révolutionnaire parfois chaotique, "a rompu une fois pour toutes avec le despotisme et l’autoritarisme".

Jeudi, il a affirmé que ses ministres venaient de "presque tous les gouvernorats" de Tunisie et promis qu’ils se rendraient le plus vite possible en province, dans un pays où plusieurs régions se disent négligées depuis des dizaines d’années.

Le gouvernement devra s’attaquer au chômage et à la pauvreté qui persistent malgré une révolution largement motivée par la misère et la marginalisation.

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