Tunisie, après le printemps arabe, printemps constitutionnel !

Certaines vont dire que la nature a fini par faire son œuvre, que la société tunisienne a réussi par trouver en elle même les ressources indispensables pour ne pas sombrer dans le chaos sécuritaire et le blocage politique. D’autres vont y voir une conséquence directe, comme dans un jeu de dominos, de l’expérience égyptienne. La peur du gendarme, du milliaire en l’occurrence, à fini par payer. Tous s’accordent à constater que la Tunisie post_Ben Ali n’est plus au fond du goulot et peut envisager le futur avec optimisme et une légèreté toute printanière.

Car c’est un vrai miracle qui est en train de se déployer devant nos yeux…la Tunisie est en train de renaître de ses cendres…Elle était la première à déclencher les étincelles des printemps arabes et la voilà à vouloir tester une architecture constitutionnelle révolutionnaire au regard de l’espace arabo-islamique dans laquelle elle évolue.

Entretemps, il y a eu la gouvernance Ennahda, la version tunisienne des Frères musulmans avec sa tendance autoritaire et islamisante, le déclenchement d’un processus d’exécutions politiques, le cauchemar sécuritaire avec l’irruption des mouvements salafistes et la désolation économique avec la fuite des capitaux et le boycott des touristes… Autant de facteurs qui rendaient cette renaissance quelque part chimérique. On décrivait une Tunisie au bord du précipice, vertigineux pas sa profondeur et dangereux par son instabilité.

Et pourtant grâce à la puissance médiatrice d’une grande centrale syndicale et surtout grâce aux concessions arrachées au mouvement islamistes Ennahda, de nombreux principes constitutionnels consacrent l’orientation libérale de la société tunisienne et son statut "d’Etat civil" à commencer par des articles qui introduisent et garantissent "la liberté de conscience et de croyance" , le principe d’égalité entre "citoyens et citoyennes" et de parité entre hommes et femmes dans toutes les assemblée élus du pays. Et même si l’article 1 consacre l’Islam comme religion du pays, le mot " charia" si cher aux mouvements salafistes ne figure plus dans le nouveau texte constitutionnel. Cette situation a poussé les plus pessimistes à parler de texte et de société schizophrène. Les débats houleux autour des pouvoirs du premier ministre et du président de la république montrent la pertinence des enjeux discutés lors de ces débats.

Les premières commentaires à l’international sur cette évolution tunisienne ont applaudi cette expérience qui introduit une nouvelle manière de faire de la politique. À titre d’exemple Le journal "Le Monde" s’extasiait Vendredi dernier devant les performances de la Tunisie. Après avoir décrit comment le pouvoir Ennahda avait failli dans sa mission en faisant fuir tout çe qui peut participer à la relance économique de la Tunisie, "Le. Monde constate que "L’échec est manifeste. Mais dans cette sortie de crise, la Tunisie fait preuve d’imagination politique.

N’empêche la Tunisie est en train de jeter les balises d’une autre manière de faire vivre ensemble le séculaire et le religieux. Et pour bien mettre en valeur de telles innovations de nombreuses voix se sont élevées pour souligner le caractère singulier de ce modèle, à l’exception notoire de l’expérience marocaine. Il n’est pas inutile de préciser que de tels signaux autour de l’organisation du pouvoir ne vont pas échapper à tous ceux qui militent contre l’islamisation rampante et forcée des sociétés arabes et qui œuvrent pour la réalisation d’une synthèse rationnelle qui la protège des différents tendances qui les travaillent, qu’elles soient militariste à l’égyptienne ou fondamentaliste à la libyenne.

D’où la crainte de voir cette innovation tunisienne être l’objet de haines et de destructions de la part de tous ceux qu’une telle architecture déstabilise ou marginalise. Le printemps constitutionnel tunisien est séduisant car il installe une vraie révolution culturelle en termes d’organisation de pouvoir qui va impacter l’ensemble du monde arabe, sauf que l’enjeu vital aujourd’hui est aussi de faire vivre cette expérience pour qu’elle puisse déteindre positivement sur les autres pays arabes qui connaissent de grandes disputes autour du pouvoir.

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