Taubira : «Ces attaques racistes sont une attaque au cœur de la République»

Dans un entretien exclusif à «Libération», la ministre française de la Justice revient sur les injures racistes dont elle a fait l’objet et s’inquiète d’une dérive de la société. « La réponse judiciaire est indispensable : il faut rappeler que le racisme n’est pas une opinion, c’est un délit. Mais elle ne suffit pas : on ne peut pas demander à la seule justice de réparer les pathologies profondes qui minent la démocratie. La question est éthique plus que morale », a-t-elle déclaré.

Christiane Taubira a accepté de revenir longuement ce mercredi sur les attaques racistes dont elle a été victime ces dernières semaines. La garde des Sceaux a été traitée de guenon par une enfant lors d’une manifestation contre le mariage homosexuel, comparée à un singe par une candidate Front national aux municipales (exclue du parti depuis), tandis qu’un abbé scandait «Y a bon Banania» lors d’une manifestation.

«Dans notre société, des choses sont en train de se délabrer, s’alarme Christiane Taubira dans Libération. Ces attaques racistes sont une attaque au cœur de la République. C’est la cohésion sociale qui est mise à bas, l’histoire d’une nation qui est mise en cause. […] Des millions de personnes sont mises en cause quand on me traite de guenon. Des millions de gamines savent qu’on peut les traiter de guenons dans les cours de récréation!» La ministre confie que ces injures n’ont pour elle rien de nouveau: «Je me ramasse depuis longtemps du "macaque", du "Y a bon Banania", par des manifestants ou des élus qui l’écrivent sur leur site internet.»

Mais au-delà de son cas, Christiane Taubira s’inquiète d’une société dans laquelle «périodiquement, et encore sous le dernier quinquennat, on a construit un ennemi intérieur». Une société dans laquelle le Front national s’est institutionnalisé, et la droite classique a «un problème d’identité». La ministre admet que les réactions n’ont pas été à la hauteur face aux attaques visant une ministre noire. «Ce qui m’étonne le plus c’est qu’il n’y a pas eu de belle et haute voix qui se soit levée pour alerter sur la dérive de la société française.»

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