Syrie: difficiles négociations à Munich sur un cessez-le-feu

Les principaux acteurs du dossier syrien menaient de difficiles pourparlers jeudi soir à Munich pour obtenir un cessez-le-feu sans délai de la Russie, sur fond de défiance et de mises en garde contre une guerre mondiale.

Le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, est arrivé à la réunion du Groupe international de soutien à la Syrie (ISSG) avec une proposition de cessez-le-feu qu’il a qualifiée de "concrète".

Circonspect, un responsable du département d’Etat américain a insisté sur la nécessité "d’un cessez-le-feu immédiat", alors que certains médias évoquaient le 1er mars comme échéance russe pour une trêve.

Au même moment, Moscou avertissait que tout déraillement des négociations et tentation d’intervention au sol des uns ou des autres en Syrie aboutirait à une guerre totale et "permanente".

"Toutes les parties doivent être contraintes de s’asseoir à la table de négociations plutôt que de déclencher une nouvelle guerre mondiale", a averti le Premier ministre Dmitri Medvedev dans une interview au quotidien allemand Handelsblatt à paraître vendredi.

Le porte-parole du département d’Etat Mark Toner a rétorqué que la Russie avait "exacerbé, intensifié le conflit" en Syrie par son appui militaire aux forces gouvernementales.

Face à toutes ces surenchères, la voie d’un compromis paraissait très étroite. "Je ne peux pas dire si on y arrivera", a concédé le ministre allemand des Affaires étrangères, Frank-Walter Steinmeier.

– Négociations de nuit ? –

A 22H00 (21H00 GMT), les négociations se poursuivaient depuis déjà quatre heures, certains participants laissant entendre qu’elles pourraient durer une partie de la nuit.

Moscou est soupçonné de vouloir pousser son avantage sur le terrain militaire et diplomatique, et renforcer le régime de Bachar al-Assad avant une hypothétique reprise des pourparlers de Genève.

Les Occidentaux reprochent aux Russes d’avoir torpillé le processus de paix intersyrien en menant des raids aériens massifs contre les rebelles modérés.

Le président français François Hollande a exhorté jeudi soir les Russes à cesser leurs bombardements. "Nous devons faire en sorte que Bachar al-Assad quitte le pouvoir et en ce moment, aidé par les Russes, il agit et massacre une partie de son peuple", a-t-il martelé.

L’opposition syrienne réclame aussi un cessez-le-feu avant de reprendre ces négociations reportées pour le moment au 25 février.

Autre point discuté à Munich, l’ouverture d’accès humanitaires aux villes assiégées par les forces syriennes.

Depuis le 1er février, Damas, appuyé par les bombardiers russes, mène une offensive contre la deuxième ville du pays, Alep (nord), qui a pris en étau les rebelles cantonnés dans les quartiers est.

Quelque 51.000 personnes ont été déplacées par les combats dans la région, selon l’ONU, pour beaucoup vers la frontière turque, tandis que 350.000 civils restent coincés au côté des rebelles.

Les négociations de Munich s’annoncent d’autant plus compliquées pour les Occidentaux que leur marge de manoeuvre semble faible face à l’opacité des intentions russes.

-L’OTAN dans la coalition anti-EI-

Sur le terrain, les forces du régime avançaient inexorablement jeudi vers Tall Rifaat, un des bastions les plus importants de l’insurrection dans la région d’Alep, au prix de violents combats, selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme.

La Russie a annoncé avoir procédé à 510 sorties aériennes pour frapper 1.888 "cibles terroristes" entre le 4 et le 11 février, assurant notamment avoir tué deux commandants rebelles dans la province d’Alep.

Si le processus politique échoue, les Occidentaux n’ont guère de plan B à moins de prendre le risque de s’opposer frontalement aux Russes, ce qui semble très improbable.

Les Occidentaux rechignent aussi à fournir des missiles sol-air aux rebelles modérés, de peur que ces armes ne tombent entre les mains de jihadistes d’Al-Qaïda et de l’EI.

A Bruxelles, le secrétaire américain à la Défense Ashton Carter a appelé la coalition contre le groupe Etat islamique à redoubler d’efforts en Irak et Syrie pour engranger rapidement "des gains tangibles".

M. Carter a aussi affirmé que l’Otan, qui a jusqu’à ce jour refusé de participer directement à cette coalition, "explore la possibilité" de rejoindre ses rangs, en plus de ses membres qui y participent individuellement.

Les Saoudiens ont réitéré leur offre de déployer des troupes au sol contre l’EI. "Le royaume se tient prêt pour mener des opérations aériennes ou terrestres (…) dans le cadre de la coalition et sous le commandement des Etats-Unis", a expliqué le porte-parole de la Défense saoudienne, Ahmed Assiri

Quant aux Turcs, ils reprochent aux Américains de trop soutenir les Kurdes de Syrie. Excédé aussi par les appels à ouvrir sa frontière aux réfugiés d’Alep, le président Recep Tayyip Erdogan a menacé jeudi de les envoyer en Europe.

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