« Stop harcèlement », les féministes jugent la campagne insuffisante

Sensibiliser contre le harcèlement sexuel, c’est la volonté de Christiane Taubira et Najat Vallaud-Belkacem. Lundi à 18h, les ministres de la Justice et des Droits des femmes doivent dévoiler la nouvelle campagne intitulée "Stop Harcèlement", composée d’affiches destinées à la presse et téléchargeables sur un nouveau site d’information concernant le harcèlement sexuel. Elle accompagne et complète la loi votée à l’unanimité par le Parlement contre le harcèlement sexuel le 6 août 2012.

Son objectif: sensibiliser la société et informer sur cette nouvelle loi et les recours possibles pour les victimes. "Il faut que l’on prenne conscience que le harcèlement sexuel est un délit et que c’est grave", a expliqué à Sipa l’entourage de Najat Vallaud-Belkacam. "Nous souhaitons aussi informer les victimes pour qu’elles connaissent la loi, si elles doivent y recourir".

Dans un cadre préventif, cette campagne avait été pensée et annoncée dès l’élaboration de la loi. "Lorsqu’avaient eu lieu les débats législatifs, nous avions réalisé qu’une loi n’était pas suffisante et qu’il fallait informer", ajoute-t-on au ministère des Droits des femmes.

Effort louable, mais insuffisant

Pour les associations féministes, l’initiative est louable mais elle reste insuffisante. "Renseigner et intervenir auprès des victimes de harcèlement sexuel demande des compétences particulières, notamment juridiques. Les plateformes téléphoniques comme le 3919 donnent des renseignements et font de l’écoute. Elles ont donc besoin de pouvoir orienter les personnes qui appellent vers des associations qui reçoivent les victimes et interviennent dans leurs démarches. Or il n’existe pas de réseau de prise en charge des victimes de harcèlement sexuel comme pour les violences conjugales", explique à Sipa Marilyn Baldeck, déléguée générale de l’Association européenne contre les violences faites aux femmes au travail (AVFT).

De fait, l’AVFT est la seule association française qui lutte à l’échelle nationale contre cette forme de violence. Elle intervient auprès de 400 personnes en continu dont 150 nouveaux dossiers ouverts par an. "Il nous sera très difficile, voire impossible, le cas échéant de répondre aux demandes générées par la campagne, alors que justement en 2012 nos subventions ont été réduites de 5%. Il ne faudrait pas que cette campagne soit synonyme d’attentes déçues", indique encore Marilyn Baldeck.

Une grande enquête bientô t lancée

En revanche, l’association propose la mise en oeuvre "d’une vraie politique publique contre le harcèlement sexuel", avec une formation des professionnels: inspection du travail, médecins, avocats, syndicats et médecins pour une meilleure prise en charge des victimes de harcèlement sexuel.

Depuis l’an 2000, il n’existe pas d’étude nationale récente sur le harcèlement sexuel. Depuis 2008, 1.000 plaintes ont été déposées et en 2011, on a répertorié 80 condamnations pour harcèlement sexuel. Cependant, il n’existe pas encore de données quant à l’application de la loi du 6 août 2012. Une grande enquête sur les violences faites aux femmes, intégrant le harcèlement sexuel, devrait bientô t être mise en place. Mais les résultats ne seront pas connus avant 2014.

Le harcèlement sexuel est actuellement passible de deux ans de prison et 30.000 euros d’amende. Dans le cas de circonstances aggravantes, ce délit est passible de trois ans de prison et de 45.000 euros d’amende. La loi du 6 août 2012 a mis fin fin au vide juridique laissé le 4 mai 2012, alors que le Conseil constitutionnel avait déclaré inconstitutionnelle la précédente loi jugée trop "floue" sur le harcèlement sexuel.

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