Sahara: « Au fil du temps, le Polisario est devenu l’ennemi de son peuple… », estime l’autrichien Franz Mekyna

Sahara:
GENEVE-Alors que le conflit du Sahara continue d’empoisonner les relations entre le Maroc et l’Algérie, les critiques se multiplient contre le Polisario qui réclame l’indépendance du Sahara.Pour l’autrichien Franz Mekyna, le Polisario est devenu "l’ennemi de son peuple".Au micro d’Africaguinee.com, M. Mekyna qui dirige l’institut austro-marocain, explique son amour pour les populations sahraouies prises en tenaille dans ce conflit qui dure depuis des décennies.Nous l’avons rencontré à Genève, à l’occasion de la 15ème session du Conseil des droits de l’Homme qui prend fin ce week-end au palais des Nations unies…

Africaguinee.com : Vous avez effectué dernièrement plusieurs missions au Maroc avec votre institut. Quelles sont vos motivations pour les populations sahraouies, dans le cadre de vos activités?

Franz Mekyna :L’institut austro-marocain a été fondé en 1995, pour renforcer les relations entre le Maroc et l’Autriche. Nos principales activités se concentrent dans le domaine humanitaire, aider les associations et les coopératives dans leurs relations avec l’Europe. Nous intervenons aussi dans le cadre de l’éducation des enfants. L’institut favorise aussi le dialogue des civilisations entre l’Europe et le Royaume du Maroc.Nous avons des activités culturelles locales en Autriche et au Maroc, ainsi que la promotion des musiques sacrées.Personnellement, je m’intéresse à l’aspect spirituel de la culture marocaine, en particulier la spiritualité des populations sahraouies.

Après vos visites au Maroc, comment percevez le problème sahraoui dans son ensemble ?

Quand je visite les régions du Sud du Maroc, j’espère vraiment qu’une solution sera trouvée pour soutenir ce peuple sahraoui .Lors de mes visites dans les provinces du Sud, j’ai compris le problème sahraoui, la sagesse des cheikh sahraouis. Et j’ai l’intention d’étudier la sagesse incarnée par la culture du peuple sahraouie qui est un ensemble de tribus. Je suis fasciné par l’étude des tribus sahraouies, leur histoire depuis sept siècles, depuis leur départ de la région du Golfe .J’ai découvert aussi les liens qui unissent les chefs de ces tribus avec SM le Roi. Ce qui est important pour les populations sahraouies, c’est leur culture, leur identité et la mise en place d’infrastructures, de l’éducation. Et ce sont des besoins qui sont aujourd’hui réalisés sur place dans les provinces du Sud au Maroc. Les deux cultures marocaine et sahraouie sont d’ailleurs liées et le mot Marrakech signifie en langue berbère « celui qui croit en Dieu » et dans la culture marocaine, la croyance en Dieu est incontournable tout comme pour les sahraouis qui sont très pieux.

Les sahraouis sont donc liés spirituellement avec SM le Roi et les sahraouis sont très pacifiques et profitent modestement de leur vie sans trop se soucier de la modernisation. Ce sont des nomades qui croient en Dieu et cherchent à vivre en paix. Et la création d’un Etat artificiel va briser les racines des populations sahraouies.
Les cheiks sahraouis contribuent à l’influence de la sagesse culturelle sahraouie dans le Maghreb et même au Sahel à travers leurs voyages.

Concernant l’autonomie, je pense que c’est une solution temporaire et dans le futur j’espère que l’Afrique et l’Union Africaine vont suivre l’exemple de l’Europe qui cherche à renforcer son unité.

Dans le cadre de vos activités en Autriche, comment l’opinion publique autrichienne perçoit –t-elle le conflit du Sahara qui empoisonne les relations entre le Maroc et l’Algérie ?

L’Autriche a des relations très positives avec les sahraouis qui vivent dans les camps de Tindouf. Les populations de ces camps, après le cessez le feu de 1991, ont demandé une aide humanitaire et l’Autriche apporte sa contribution pour soutenir ces populations dans les camps de Tindouf. D’ailleurs plusieurs leaders du Polisario sont venus à Vienne pour demander de l’aide pour ces populations qui vivent dans les camps de Tindouf. Des associations autrichiennes ont fournit également une aide logistique comme des professeurs, des médecins pour aider ces populations.

L’Autriche fournit donc une aide humanitaire au Polisario.A Vienne, nous n’avons pas perçu négativement le Polisario. Nous comprenons leur volonté de lutter contre la colonisation espagnole, mais aujourd’hui l’Autriche opte pour la neutralité, nous ne soutenons ni le Maroc, ni le Polisario.

Quand on visite les camps de Tindouf, on constate une crise d’identité chez les populations sahraouies, à cause des séparations avec leurs familles restées au Maroc. Aujourd’hui, le chef du Polisario, Abdel Aziz en est un exemple, car il est coupé de ses liens avec son père qui vit au Nord du Maroc. D’autres leaders du Polisario sont également dans le même cas, coupé de leurs liens familiaux. Je comprends les intentions du Polisario dans leur combat, seulement l’histoire a changé. La réalité aujourd’hui, c’est que le royaume du Maroc prouve ses bonnes intentions, sa sincérité pour respecter la culture sahraouie. Nous comprenons aujourd’hui en Autriche que le Polisario accuse le Maroc, instrumentalise les leaders politiques, la société civile etc. Mais nous savons que l’actuel Polisario a changé et ne défend plus les mêmes causes qu’avant. Nous avons l’impression que l’actuel Polisario est hypocrite et beaucoup de ses membres ne vont pas à Tindouf, mais profitent des avantages politiques de ce conflit. Et c’est malheureux, parce que les leaders du Polisario parlent au nom des populations sahraouies qui souffrent dans les camps, mais en réalité, nous constatons qu’ils sont les ennemis de leur peuple. Nous constatons aussi qu’il y a un problème du côté de l’Algérie qui a fermé ses frontières avec le Maroc depuis une dizaine d’années. Et la fermeture de cette frontière à un impact sur la société civile marocaine et algérienne, parce que ce sont deux peuples liés historiquement. Et ce conflit du Sahara crée une hostilité entre la société civile marocaine et algérienne.

Mais en Autriche, nous avons des relations d’amitié avec l’Algérie, mais aussi le Maroc.

Avec l’évolution du terrorisme dans le Sahel, pensez-vous que la résolution de ce conflit du Sahara, pourrait freiner les activités terroristes dans la région ?

Nous pensons que dans une bonne partie de la région surtout du côté algérien, il y a des réseaux criminels et terroristes qui profitent du conflit sur le Sahara. La stabilité dans la région passe nécessairement par la résolution de ce conflit dont l’autonomie est une solution très réaliste qui répond aux attentes des populations sahraouies.

Interview réalisée par Ismaël Barry
Pour Africaguinee.com.

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