Rochdi Zem à Atlasinfo.fr: « Le film « Omar m’a tuer » ne dénonce pas la justice mais des hommes qui n’ont pas fait honneur à la justice de leur pays »

Rencontré mercredi, la veille de la projection officielle en avant-première, de son film « Omar m’a tuer », prévue ce jeudi après-midi au Théâtre Mohammed VI de Rabat, Rochdi Zem, star du cinéma français et réalisateur talentueux, qui était accompagné d’Omar Raddad, s’est prêté avec sa légendaire gentillesse aux questions-réponses d’Atlasinfo.fr. Son film « Omar m’a tuer » raconter l’étrange affaire du jardinier Omar Raddad, condamné puis gracié mais toujours coupable du meurtre de Ghislaine Marchal, sa patronne retrouvée morte, le 24 juin 1991, dans la cave de sa villa de Mougins. Des lettres de sang accusent : « Omar m’a tuer ».

Rochdi Zem à Atlasinfo.fr: « Le film « Omar m’a tuer » ne dénonce pas la justice mais des hommes qui n’ont pas fait honneur à la justice de leur pays »
Atlasinfo.fr : Vous allez présenter votre film officiellement ce jeudi à Rabat. Le Maroc vous a aidé à faire ce film ?

Rochdi Zem : Le Maroc m’a spontanément aidé pour réaliser le film. Quand j’ai appelé pour obtenir de l’aide, la réponse a été rapide, spontané et immédiate. Cela m’a beaucoup flatté et j’ai fait la promesse de venir prioritairement au Maroc pour présenter officiellement le film. Pour faire ce film sur lequel j’ai travaillé pendant quatre ans, nous avions besoin d’argent pour avoir les moyens nécessaires à son bon déroulement du film. J’ai donc obtenu une aide financière par le biais de 2M, qui est coproducteur. En France, mes principaux financiers sont Canal+, France 2 et Mars films. .

Vous vous êtes retourné vers Sami Bouajila pour interpréter le rôle d’Omar Raddad. Il paraît qu’il était saisissant de vérité?

Sami Bouajila est un très grand acteur que je connais très bien. Nous nous côtoyons depuis une vingtaine d’années. Il a un vrai talent et une véritable émotion. Quand Omar Raddad est venu sur le tournage, il a été choqué par sa ressemblance avec lui.

Votre film est-il une manière de rendre justice à Omar Raddad, victime de la machine judiciaire qui peut parfois broyer des innocents?

Cela s’est fait en deux étapes. J’avais d’abord envie de raconter le parcours d’un anonyme qui est devenu presque une icône dans l’inconscient de tous. Tout le monde connait le prénom d’Omar en tout cas aujourd’hui. Cette phrase « Omar m’a tuer » a été déclinée de nombreuses fois. Elle sonne encore dans l’inconscient de tous. Raconter l’aspect humain de cette histoire, essayer de me glisser dans l’esprit d’Omar Raddad, c’était important pour moi. En découvrant l’instruction telle qu’elle a été menée, j’ai donné une autre dimension à mon film. J’ai décidé que l’affaire en elle-même allait prendre beaucoup d’importance dans le film. Il y a deux destins parallèle le dans ce film, celui d’Omar Raddad et celui de l’écrivain qui enquête et qui ne croit pas à la culpabilité d’Omar. Ces deux destins vont se croiser à la fin parce qu’il y en a un qui est en prison et l’autre, libre.
Quand on s’investit, on se sent effectivement impliqué par l’histoire. Mais il y a aussi un but final : Jean-Marie Rouart avait un livre à écrire et moi un film à faire. Au départ, ma véritable ambition était de construire une fiction basée sur des faits réels et avérés. Si cette fiction peut profiter à Omar, j’en serais vraiment ravi. Mais on est d’abord dans une volonté artistique qui est aussi essentiel.

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Bien avant sa sortie, votre film a été, peut-être, à l’origine de la réouverture par la chancellerie du dossier Omar Raddad ?

C’est difficile d’avoir cette prétention. On est dans le cinéma. Si le fait de médiatiser de nouveau cette affaire à travers cette pourrait rendre service à Omar Raddad , j’en suis encore une fois ravi. Omar est le seul protagoniste dans cette affaire qui n’a pas envie que cette histoire soit enterrée. La chancellerie a d’ailleurs décidé la réouverture du dossier réclamé depuis 9 ans par Raddad. Mais au départ quand on entreprend ce genre de projet, on n’a pas cette prétention là.
Cette affaire, ce n’est pas aussi une histoire de racisme ?
Je ne crois que c’est une histoire de racisme au départ. Le président de la cour d’assises avait eu clairement certes une attitude raciste. C’est un fait avéré. Mais il faut donner une légitimité aux enquêteurs. Ils arrivent sur les lieux de crime, voient un cadavre et une inscription qui accuse Omar Raddad. il est normal qu’il soit sur la liste des suspects. Omar m’a lui-même confirmé cette thèse. En revenant sur la manière scandaleuse dont cette affaire a été bâclée est du racisme. Il a été confronté à des voyous. Le juge Renard a été révoqué par ses pairs.

A votre avis, les incohérences et les zones d’ombre n’ont pas été suffisamment exploitées dans cette affaire ?

J’ai gardé les points essentiels du dossier en mettant l’accent sur les incohérences, les zones d’ombre, les pistes non exploitées. Et ma conviction personnelle est bien celle de mon film. Il me paraît difficile de condamner cet homme avec ce dossier-là. Omar est le seul protagoniste dans cette affaire qui n’a envie qu’elle soit enterrée. Son combat n’est pas terminé. Plus on parle et plus il se sent vivant. Car si son corps est libre, il a toujours un peu la tête en prison. Sans la médiatisation de cette affaire, Omar serait tombé dans l’oubli et son cas n’aurait été qu’un fait-divers parmi tant d’autres.

Rochdi Zem à Atlasinfo.fr: « Le film « Omar m’a tuer » ne dénonce pas la justice mais des hommes qui n’ont pas fait honneur à la justice de leur pays »
Dans votre film, vous vous appuyez que sur de des faits avérés ?

Le comportement du président de la cour d’assises a été raciste. C’est un fait avéré. Il y a autant de théories que témoignages, je m’en suis tenu uniquement aux fait avérés ce qui m a permis de ne pas faire preuve de manichéisme dans lequel j’aurais pu facilement plonger. En se basant donc sur les faits, on est déjà suffisamment offusqué.

Votre film dénonce-t-il l’erreur judiciaire ?

Le film ne dénonce pas la justice mais des hommes qui sont censés faire appliquer la justice mais qui, sous couvert d’une certaine forme de pouvoir, ont fait condamner une personne.
Je ne crois pas à une erreur judiciaire qui suppose que l’erreur n’est intentionnelle. Dans la cas d’Omar Raddad, elle était totalement intentionnelle et un cas d’erreur délibéré de la part d’ hommes qui n’ont pas fait honneur à la justice de leur pays et qui n’ont pas respecté les règles et les lois qu’ils sont censés faire appliquer.

Omar Raddad a vu le film. Quelle a été sa réaction ?

Il a dit : c’est ma vie!

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