Primaire de la gauche: Valls accuse Hamon de communautarisme

Benoît Hamon a accusé mercredi Manuel Valls, son adversaire pour le second tour de la primaire de « La Belle alliance populaire », de distiller « un poison » sur son communautarisme présumé qui compromettra le rassemblement pour la présidentielle. Les deux hommes s’affrontent mercredi soir lors d’un débat télévisé avant le seconde la primaire de la gauche française , dimanche.

"Nous aurons cette explication, ce débat: quelle est la conception de chacun de la laïcité"?, a déclaré Manuel Valls sur France Inter. "Ce n’est pas une question de ton, ce n’est pas une question de violence, c’est une question de clarification", a-t-il souligné.

Auparavant, Benoît Hamon, en tête à l’issue du premier tour de la primaire, avait déploré sur France 2 les "oukazes" et "anathèmes" lancés à son encontre par des proches de l’ancien Premier ministre.

Ainsi le député socialiste de l’Essonne, Malek Boutih, qui a déclaré à 20 Minutes que Benoît Hamon était "en résonance avec une frange islamo-gauchiste". Il ajoute dans Paris Match que le député PS des Yvelines est "le candidat des Indigènes de la République", mouvement accusé de promouvoir le communautarisme.

"On distille un poison. En politique, surtout quand on est dans un exercice comme celui-là, la primaire, qu’on doit se rassembler demain pour faire face cette fois-ci à François Fillon et à Marine Le Pen, ce n’est pas une attitude très responsable", a réagi Benoît Hamon.

"Ce n’est fondé sur rien de mes actes, de mes déclarations. L’élu de Trappes est forcément ambigu avec le communautarisme", a-t-il ajouté. "Voir que les tweets de M. (Florian) Philippot, du site Français de souche me concernant, puissent faire écho aux remarques d’un certain nombre de ceux qui ne sont pas d’accord avec moi sur la primaire, ça me désole."

Manuel Valls n’a pas foncièrement démenti ses proches et exigé "une clarification", évoquant notamment la réaction mesurée de Benoît Hamon à un reportage de France 2, diffusé en décembre dernier, sur des lieux publics, dont des cafés, interdits aux femmes en France.

"Malek Boutih a raison de pointer les ambiguïtés, ce qui se passe dans un certain nombre de quartiers, la radicalisation, contre laquelle certains n’ont pas pris suffisamment conscience", a-t-il dit.

"Sur ce terrain-là, je n’ai de leçon à recevoir de personne", a répliqué Benoît Hamon.

Prié de dire s’il ne compromettait pas le rassemblement des deux camps, qu’il présentait comme deux "gauches irréconciliables", au lendemain de la primaire, Manuel Valls a répondu : " Il y a toujours eu des débats à gauche, et parfois bien plus difficiles entre Jean-Pierre Chevènement et Michel Rocard, entre Jean-Pierre Chevènement et Jacques Delors. Est-ce que ça les a empêchés de gagner ensemble et de gouverner ensemble?"

Deux styles aux antipodes

Issus de la même génération, l’ex-Premier ministre, 54 ans, et l’ex-ministre de l’Education, 49 ans, rêvent tous deux de changer le logiciel de la gauche. Mais derrière les mots, leurs projets divergent: l’un à l’aile droite du PS, l’autre à la gauche du parti à la rose.

Porteur d’un programme d’une "gauche totale" et innovante face aux "vieilles recettes", Benoît Hamon a devancé au premier tour celui qui incarne le virage libéral du quinquennat du président socialiste François Hollande.

Pour s’imposer, l’ex-Premier ministre ne ménage pourtant pas ses efforts, à coup de sémantique belliqueuse. Il est entré en lice en novembre, avec une "candidature de révolte" face à la défaite annoncée de son camp à la présidentielle.

Alors que M. Valls, Espagnol naturalisé Français à 20 ans, est apparu dans les débats télévisés mâchoire crispée, Benoît Hamon a opposé une image détendue, égrenant d’une voix posée ses propositions.

Celui que les ténors socialistes surnomment "petit Ben" a fait salle comble pendant la campagne avec un public plutôt jeune, altermondialiste, en quête d’une "autre politique" ou d’un "vrai socialisme".

Il refuse de restreindre le discours aux questions de "sécurité, fermeté, identité" chères à son concurrent et prône un revenu universel d’existence, la légalisation du cannabis, la transition écologique… Et a posté sur les réseaux sociaux sa "play-list" musicale.

M. Valls, lui, a peiné à remplir les salles, annulant parfois in extremis des réunions par peur des chaises vides et des débordements. A Strasbourg (est), il s’est fait enfariner dans la rue par un opposant, à Lamballe (ouest), il a reçu une gifle.

Au sein du PS, le parcours politique des deux hommes — mêmes cheveux de jais, même silhouette contenue dans des costumes cintrés — commence presque au même moment, au mitan des années 80, avant d’emprunter des chemins différents.

M. Valls devient assistant parlementaire à 23 ans, puis jeune conseiller du Premier ministre réformateur Michel Rocard (1988-91), puis de Lionel Jospin (1997-2001).

Il est élu en 2001 maire d’Evry, ville populaire et métissée au sud de Paris, puis devient député. Il se fait éliminer au premier tour de la primaire socialiste de 2011, se rallie au candidat François Hollande avec un rôle actif de porte-parole. Ce qui lui vaut d’être nommé ministre de l’Intérieur, une fois l’élection remportée.

Benoît Hamon, lui, adhère au PS en 1987, devient en 1993 président Mouvement des Jeunes socialistes, puis porte-parole du parti en 2008. Fin connaisseur des réseaux socialistes, il est surtout connu pour avoir été ministre de François Hollande, avant de claquer la porte en 2014, en désaccord avec les orientations économiques.

Leurs slogans résument leurs deux approches: "faire battre le coeur de la gauche", pour Benoît Hamon, "une République forte, une France juste", pour Manuel Valls.

(Avec AFP)

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