Participation à la lutte contre Daech: la Turquie souffle le chaud et le froid

La Turquie ne veut pas se faire entraîner dans une guerre à ses portes sans que ses ‘besoins » et ses ‘priorités » ne soient d’abord pris en considération par la coalition internationale montée par les Etats-Unis pour lutter contre l’organisation des djihadistes de Daech (Etat islamique El).

Réticente au départ pour cause de ses otages pris, en juin dernier, dans son consulat à Mossoul en Irak par l’EI, Ankara semble changer de position après leur libération le 20 septembre et ses dirigeants ont multiplié les déclarations soufflant le chaud et le froid sur l’envoi de troupes au sol tout en s’étalant dans les explications itératives sur les conditions sine qua non à tout engagement militaire.

Par la voix de son président Recep Tayyip Erdogan, qui a dit ‘voir d’un œil positif » les raids de la coalition contre les djihadistes, la Turquie, qui ‘n’est pas en dehors de la coalition », a annoncé qu’elle va prendre ‘toutes les mesures nécessaires pour combattre le terrorisme y compris militaire et politique ».

Le vote par le parlement, jeudi dernier, d’une résolution autorisant, si nécessaire, des opérations de l’armée turque sur les territoires de ses voisins (Syrie et Irak) et le stationnement ou le passage en Turquie de soldats étrangers qui prendraient part à ces opérations ainsi que le déploiement des chars ‘en position d’engagement », canon pointé vers la localité syrienne d’Aïn Al Arab (Kobani en kurde), ont laissé planer une intervention imminente pour aider les kurdes syriens assiégés, de trois parts, dans la localité, mais Ankara traîne depuis les pieds.

Les frappes aériennes de la coalition, qui ont retardé la prise de Kobani sans toutefois réussir à inverser le court des événements, ne mettront pas fin de façon permanente ‘à la terreur » de l’EI, a souligné, mardi, le chef de l’Etat en visitant un camp de réfugiés syriens à Gaziantep (sud) auxquels il a réitéré ‘le soutien sans faille de la Turquie jusqu’à l’établissement d’une Syrie libre et indépendante ».

Sans interventions de troupes au sol, les raids ne feront que retarder la menace, a ajouté le président, réaffirmant les priorités d’Ankara à la mise en place d’une zone sécurisée pour les réfugiés doublée d’une zone d’exclusion aérienne à l’intérieur du territoire syrien et de l’équipement de l’opposition syrienne modérée.

La veille, le Premier ministre Ahmet Davutoglu a conditionné l’envoi de troupes turques en Syrie à l’établissement de ces zones et à ‘la destitution d’Al Assad ». Si le régime syrien reste en place, l’EI poursuivra sa poussée et prendra le contrôle d’autres villes syriennes. Et même si ‘l’EI est anéanti, une autre organisation radicale peut surgir pour la remplacer tant qu’Al Assad reste au pouvoir », a-t-il averti.

Une stratégie globale et inclusive non pas juste contre l’EI mais pour éliminer toutes les menaces terroristes dans la région entière est une autre condition sine qua non d’Ankara pour jumeler ses forces avec celles de la coalition internationale.

La Turquie va tout faire pour éviter qu’Aïn Al Arab, à vue d’œil du territoire turc, soit prise par les djihadistes, a tonné, vendredi dernier, le chef de gouvernement mais les officiels turcs ont sorti de ‘nouvelles exigences » pressant le co-leader du parti de l’union démocratique (PYD), aile syrienne du mouvement rebelle du parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), Salih Muslim à rompre tout lien avec Damas, à prendre ses distances vis-à-vis du PKK et à joindre les forces de l’Armée syrienne libre, opposition modérée au régime de Damas.

Mais à Washington, ces priorités ont été quelque peu ‘douchées » par l’administration Obama qui a réaffirmé que ni la zone d’exclusion aérienne ni celle sécurisée ne figurent parmi les plans de la coalition internationale. La position américaine n’a pas changé avec toujours en ligne de mire l’EI et le soutien à l’opposition syrienne, selon la porte-parole du département d’Etat américain Jen Psaki.

‘Ceux qui demandent à la Turquie des faveurs devront aussi comprendre ses besoins. Ceci n’est pas un rapport à sens-unique », a rétorqué le chef de gouvernement turc, assurant qu’Ankara est prête à ‘offrir tout ce qui est nécessaire pour Kobani », qui est en passe de tomber, mais que le recours aux forces militaires est ‘une décision différente ».

Un ‘refus » d’intervention à Kobani qui a provoqué, depuis la nuit de lundi à mardi, de violents incidents dans plusieurs villes de Turquie entre des manifestants kurdes, qui accusent les autorités de les avoir abandonnés à leur sort, et les forces de l’ordre notamment à Istanbul et Ankara ainsi que dans les régions du sud-est à majorité kurde.

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