Nicolas Sarkozy le grand perdant

Même dans ses cauchemars les plus sombres, Nicolas Sarkozy n’aurait pas rêvé pareils scénarios. Lui, le patron de la droite, qui était revenu comme un sauveur de son parti, l’UMP qui s’apprêtait à rendre l’âme sous le choc des égos, est devenu un boulet pour les siens. Entre les deux tours des régionales, sa présence dans les meetings n’était pas désirée. L’homme s’est littéralement démagnétisé. Sa stratégie à l’égard du Front National alors que ce parti d’extrême droite menaçait de s’accaparer de régions entières, a révélé l’opportunisme de sa démarche. Les résultats ont invalidé sa posture et la recette qu’il a proposée pour mètre fin à l’ascension du FN, une des raisons invoquée pour expliquer son retour prématuré en politique.

Par Mustapha Tossa

Car en fin de compte il n’y aura pas de régions françaises dirigées par le FN. Ni Marine Le Pen, ni Marion Marechal-Le Pen, ni Florian Philippot ne peuvent se pavaner dans leur costume de conquérants de régions. Leur élan a été stoppé net, à la hauteur fulgurante de leurs résultats du premier tour. Les sondages l’avaient déjà prédit. Mais l’opinion refusait de croire qu’un parti politique avec une telle dynamique au premier tour puisse sortir les mains vides au second. Et pourtant le miracle de la défaite frontiste eut lieu malgré le rouleau compresseur annoncé et malgré l’inévitable ascension de la petite musique Front National,, surtout depuis Marine Le Pen a réussi le petit exploit de dédiaboliser le parti .

On le doit à deux facteurs essentiels. Le premier est le réveil citoyen des Français. Après avoir boudé les urnes, ils sont revenus en masse, décidés à en découdre avec le Front National et à dresser contre lui ce barrage républicain pour l’empêcher de gagner des régions. Le second est la stratégie élaborée par les socialistes, incarné par Manuel Valls qui a poussé la détermination et le zèle militant anti-FN jusqu’à appeler à voter pour les candidats des Républicains.

Un autre grand perdant dans cette élection. C’est Nicolas Sarkozy. Même si son parti a raflé sept régions, ce qui n’en fait pas la vague bleue tant fantasmé par la droite, il ne le doit pas uniquement à la pertinence de sa stratégie qui s’est perdue entre confusion et maladresse de séduction, mais il le doit à un coup de pouce décisif de la gauche. Aujourd’hui, Nicolas Sarkozy dont le leadership à droite n’est toujours pas établi malgré son coup de force sur "Les Républicains", est contesté. Signe de fébrilité supplémentaire, il vient de se séparer de Nathalie Kosciusko-Moriset (NKM) parce qu’elle a osé critiquer sa stratégie à l’égard de l’extrême droite. Sarkozy est entré dans une phase de rigidité qui ne tolère aucune contestation.

Nicolas Sarkozy est le grand perdant de cette séquence. Lui qui se voyait déjà comme le candidat naturel de la droite, revenu pour prendre une belle revanche sur les socialistes, n’est même plus assuré de remporter les primaires. Des personnalités comme François Fillon, Alain Juppé ou Bruno Lemaire qui lui contestaient déjà son leadership, sont encouragés après ses élections à aiguiser leurs charges contre un adversaire que son autoritarisme naturel rend difficile à supporter.

En face à gauche, le PS a réussi à sauver les meubles. Cinq régions conservées et une stratégie du barrage républicain testée gardeur nature face à un adversaire qui affiche ouvertement ses prétentions élyséennes. Cette nouvelle équation est susceptible de rassurer un homme de gauche comme François Hollande qui n’aura demain d’autres bilans pertinents à faire valoir que celui d’être l’alternative la plus crédible à la déferlante du Front National. Dans cette option socialiste, Nicolas Sarkozy semble avoir perdu tous les arguments. "Le capteur" heureux des voix du Front National qu’il était en 2007 , est obligé de couper violemment le micro à ceux, dans son entourage qui le critiquent ou le contredisent. Déjà fragilisée par une série de mésaventures politico-judiciaires, Il paraît difficile aujourd’hui d’entrevoir les ressorts qui peuvent l’aider à sortir de cette impasse.

NKM, la femme politique que Nicolas Sarkozy avait évincé de la direction des Républicains, est en train de devenir populaire, voire une icône de lutte contre ce qu’elle avait appelé une " vieille idée stalinienne" qui consiste à " commencer le débat par la mise à l’écart de ceux qui ne sont pas d’accord". Ce à quoi Nicolas Sarkozy a répondu :" on ne peut pas tirer contre son camp surtout au moment des élections. Le côté " je joue seule" n’est plus acceptable". NKM s’est livrée à une violente attaque contre la gouvernance de Nicolas Sarkozy qui risque de laisser des traces. Surtout si cette mise à l’écart sonne le glas à une hémorragie et qu’elle ouvre la voie à d’autres défections. NKM n’est pas à son premier coup d’essai. Elle s’était déjà distinguée par une prise de position nette sur la nécessité de combatte le FN. Elle incarne avec d’autres ténors au sein des Républicains la ligne radicale anti FN. NKM est la seconde femme politique évincée par Nicolas Sarkozy en quelques semaines, après Nadine Morano qui s’était embourbée dans une grosse polémique sur "la race blanche"

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