Mohammed VI et le Sommet d’Amman

La participation personnelle du Roi du Maroc Mohammed VI au 28éme Sommet de la ligue arabe prévu le 29 mars à Amman en Jordanie est un événement suffisamment rare et presque inédit pour attirer toutes les lumières et susciter tous les intérêts. La visite officielle du 22 au 24 mars du Roi Abdellah de Jordanie au Maroc en a est le signe annonciateur.

Par Mustapha Tossa

De l’avis de nombreux observateurs, depuis quelques années, les sommets de la Ligue arabe se sont transformés en lieux de pugilats organisés qui reflètent une paralysie d’action et une absence de dynamique sur de nombreuses crises qui secourent le monde arabe. Au point que ces rencontres au sommet se transforment en réunions formelles destinées le plus souvent à valider l’impuissance et les divisions. D’ailleurs, au nom de cette incapacité chronique, la diplomatie marocaine avait décliné la proposition d’organiser le dernier sommet de la ligue arabe finalement réuni à Nouakchott, en Mauritanie.

Contrairement aux anciens sommets de la Ligue arabe, celui d’Amman promet de capter toutes les attentions internationales. D’abord par Le casting des participants. Outre la participation phare du Roi Mohammed VI, de nombreux chefs d’Etat et dirigeants de grandes organisations internationales sont annoncés comme l’ONU, l’Union africaine, l’Union Européenne ou l’organisation de la conférence islamique. L’enthousiasme du pays organisateur, la Jordanie est tel qu’il se met à envisager la présence d’un homme comme Vladimir Poutine, le président russe, devenu un acteur incontournable au Moyen Orient.

Mohammed VI participe au sommet d’Amman dans un contexte politique régional et international particuliers. Au menu de ce sommet, la réforme indispensable de la Ligue arabe et les trois grandes crises arabes qui attendent une solution concrète et méthodique.

La crise syrienne dont le processus de négociation entre pouvoir et opposition attend un engagement et un parapluie arabe plus protecteur et plus dynamique. Cette problématique sera traitée sur fond de grande préoccupation de la crise de réfugiés syriens qui déstabilise aussi bien le fragile équilibre des pays voisins et qui constitue aujourd’hui le premier cauchemar des européens. Le Maroc a toujours milité pour une transition pacifique et une solution politique. La crise yéménite où il est question de poser les fondations d’un retour à la légalité que la coalition arabe pilotée par l’Arabie saoudite et soutenue par le Maroc tente d’instaurer. Et la crise libyenne où le chaos sécuritaire est source d’angoisse pour les pays voisins. À travers le processus de Skhirat, le Maroc a beaucoup pesé dans le processus de pacification de ce pays.

Mohammed VI est aussi président du comité Al Quds. Le sommet de Amman se tient dans un contexte où le conflit israélo-palestinien risque de connaître d’incontrôlables accélérations. Elles font la dangereuse synthèse entre un soutien impavide de la nouvelle administration Trump au¨Premier ministre israélien Benjamin Nethanyahou et à ses lubies expansionnistes et une tentation de plus en plus internationale de reconnaître de manière unilatérale l’Etat palestinien. L’étape d’Amman a pour responsabilité de fixer le plafond des nouveaux enjeux et d’identifier la nature des nouveaux dangers.

Mais le dossier qui a de fortes chances de dominer les débats du sommet d’ Amman est la lutte contre le terrorisme. Outre l’implication physique et militaire des pays arabes dans la lutte réelle contre les organisations terroristes, il est demandé aux pays arabes et musulmans de formuler une réponse idéologique pour désamorcer les discours teintés de religions mais qui prêchent la haine, la violence et l’extrémisme. L’expérience marocaine dans le domaine pourrait être une source d’inspiration et un modèle à imiter tant sur le plan de la construction du discours religieux que sur le plan des stratégies gagnantes pour démanteler les cellules terroristes.

La participation phare de Mohammed VI au sommet d’Amman sera sa première grande sortie arabe après le retour triomphal fin janvier du Maroc au sein de l’Union Africaine. À cette occasion, la diplomatie marocaine a pu compter sur la précieuse alliance stratégique qu’il a su tisser avec le conglomérat des pays du Golfe dont l’Arabie saoudite et les Emirats arabes unies sont la colonne vertébrale. Elle a dû composer aussi avec certains comportements politiques inamicaux de la part de certains pays dits frères. Pour ces raisons, il faut s’attendre à des rencontres bilatérales où les protagonistes vont se livrer à un instant de vérité et à une explication de postures.

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