Migrants: à peine dévoilé, le plan européen déçoit

A peine dévoilées, les propositions des dirigeants européens pour répondre au drame des migrants en mer ont essuyé une salve de critiques, humanitaires et députés européens dénonçant un plan « insuffisant » et au manque d’engagement « épouvantable ».

Le plan ne sera officiellement dévoilé que jeudi soir à Bruxelles, mais un projet de déclaration, dont l’AFP a obtenu copie, évoque des opérations militaires contre les trafiquants et un renforcement de la solidarité dans l’accueil des réfugiés.

Une déception pour Amnesty International, qui condamne "un plan d’une insuffisance lamentable". "Les propositions sur la table mettent la manipulation avant les vies", a estimé Gauri van Gulik, la directrice adjointe pour l’Europe et l’Asie, qui appelle de ses vœux "un changement d’objectifs, de zone d’opération" et "plus de bateaux et d’avions".

Convoqués d’urgence après la dernière tragédie qui a fait des centaines de morts dimanche, les chefs d’Etat et de gouvernement devaient plancher sur un plan d’action, réplique de celui adopté en 2013 après le naufrage de Lampedusa, mais jamais mis en œuvre.

Les conclusions provisoires du sommet "sont encore moins ambitieuses que les dix points qui ont été présentés lundi. Le manque d’engagement est épouvantable. Nous avons besoin d’une approche radicalement nouvelle de l’asile et de la migration", a affirmé Guy Verhofstadt, le président des libéraux au Parlement européen.

Dans leur projet de déclaration finale, les 28 s’engagent à tout faire "pour identifier, capturer et détruire les bateaux avant qu’ils ne soient utilisés par les trafiquants", avec pour ce faire la mise éventuelle sur pied d’une opération militaire.

Une proposition qui a fait bondir certains députés européens. "C’est insensé! Une mission de défense et de sécurité commune signifie une militarisation de la stratégie de l’Union européenne contre les réfugiés", s’est indignée sur Twitter Rebecca Harms, co-présidente du groupe des Verts.

"Pis-aller"

Pour Manfred Weber, président du groupe PPE (conservateurs), le sommet "ne peut pas se résumer à une pure séance photo. Il faut une réponse forte aux tragédies du mois qui vient de s’écouler".

La concentration de l’action sur les bateaux soulève des doutes. "Cela ne règlera pas le problème parce que les principaux responsables se situent plutôt en amont, au niveau des filières", assure Olivier Clochard, le président du réseau Migreurop, qui parle de "pis-aller" et déplore l’absence d’un "véritable dispositif d’accueil".

Le plan propose aussi d’accueillir "au moins 5.000 personnes" ayant déjà obtenu le statut de réfugiés, dans le cadre d’un projet de réinstallation.

"C’est vraiment une goutte d’eau au vu des déplacements de personnes" dans la région, estime M. Clochard. Soulignant que le plan "n’arrêtera pas les gens en situation de détresse", il prône l’ouverture de "voies de migration légales" pour empêcher les migrants de tomber dans les mains des passeurs.

L’UE prévoit enfin de doubler, de trois à six millions d’euros, le budget mensuel alloué à Frontex, l’agence chargée de la surveillance des frontières, afin de renforcer les moyens alloués aux missions maritimes Triton en Italie et Poséidon en Grèce.

Pour le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), "la surveillance seule ne résoudra pas le problème de l’immigration irrégulière, mais cela pourrait accroître les risques et les violences infligées par les migrants et les réfugiés".

"La réponse de l’Union européenne doit aller plus loin que l’approche minimaliste énoncée dans le plan en dix points, qui se concentre essentiellement sur l’endiguement des arrivées", a estimé le HCR dans un communiqué.

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