Maroc: mesures d’urgence pour sauver une éducation « sous-développée »

Le Maroc a annoncé une série de nouvelles mesures d’urgence dans l’enseignement pour tenter de remettre sur pied un secteur que son propre ministre qualifie de « sous-développé ».

Pour pallier aux dérives du système scolaire, le ministère de l’Education entend notamment revoir la "formation des enseignants", entamer une "refonte des manuels" et "recentrer sur les fondamentaux: l’écriture, la lecture et le calcul", explique à l’AFP son directeur chargé de l’enseignement privé et du préscolaire, Bendaoud Merzaki.
Ces mesures, parmi 23 identifiées comme "prioritaires", seront effectives dès la rentrée 2015, promet-il, alors que le taux d’analphabétisme flirte avec les 30% dans le royaume.

Une Marocaine sur deux de plus de 15 ans ne sait ni lire ni écrire, et 30% des jeunes, qui représentent la moitié des 35 millions d’habitants, sont au chômage, selon des données de la Banque mondiale.

Le roi lui-même a vivement critiqué la politique éducative "en butte à de multiples difficultés et problèmes".

Un constat partagé par le ministre de l’Education nationale, Rachid Belmokhtar. L’école marocaine est "sous-développée", s’est-il ainsi exclamé mi-décembre lors d’un forum international consacré à l’éducation, selon des propos rapportés par le quotidien Al-Assima.

En "troisième année de collège (l’équivalent de la 4e), beaucoup d’élèves ne maîtrisent pas la lecture et l’écriture". Et après neuf années passées à l’école, un enfant sur huit ne maîtrise pas l’arabe, avait-il notamment déploré.

L’Etat assure pourtant mettre les moyens, en accordant 25% de son budget au secteur de l’enseignement, et entend développer des filières du baccalauréat international en français, anglais et espagnol dans ses lycées publics.

– Creusement des inégalités –

Mais pour les associations, la première des urgences est ailleurs: elle consiste à barrer la route à une "politique de privatisation", qui accroît "les inégalités dans l’accès à l’éducation", selon un appel commun lancé fin novembre par une soixantaine d’ONG.

Cette inquiétude a également été exprimée par le Comité des droits de l’enfant des Nations unies (CDE), qui a récemment jugé que l’enseignement privé au Maroc se développait "très rapidement (…) sans la supervision nécessaire concernant les conditions d’inscription et la qualité de l’enseignement dispensé".

Si le royaume poursuit dans cette voie, "52% des écoles seront privées en 2030 et 97% en 2038", prévient Sylvain Aubry, expert en éducation et membre du "Global initiative for economic, social and cultural rights", organisation basée à Genève.

Ces mises en garde sont balayées par les responsables marocains.

"Les écoles privées ne représentent que 11% de l’offre et n’évoluent pas à la vitesse" annoncée par la société civile, affirme M. Merzaki. A ce jour, selon lui, "il y a 6,5 millions d’élèves dans le public contre 700.000 dans le privé".

En outre, le ministère met en avant une nouvelle politique de "partenariat public-privé", à travers les "écoles associées", où les frais sont réglementés et où les boursiers représentent au moins 20%" des effectifs.

Seul point d’accord entre pouvoirs publics et société civile, le recours devenu trop systématique aux "heures supplémentaires", assurées par des enseignants du public.

Dans une circulaire datée du 18 décembre, "les cours de soutien payants" assurés par des enseignants du secteur public ont été formellement interdits par le ministère afin de garantir "l’égalité des chances".

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