Marine Le Pen profite de la vague populiste

Il est un parti politique en France dont l’excitation et l’agitation font traditionnellement parties constitutives de son ADN et de sa stratégie de conquête. Et pourtant il observe aujourd’hui un calme et une retenue inédite. C’est le Front National de Marine Le Pen, le parti de l’extrême droite française. Là où les autres, les socialistes notamment, s’échinent dans leurs combats internes à préserver les valeurs fondatrices de la gauche, là où la droite des républicains s’évertue à retrouver un leadership capable de lui garantir un retour aux affaires, le FN semble flotter dans une incroyable retenue.

Par Mustapha Tossa

Il est un parti politique en France dont l’excitation et l’agitation font traditionnellement parties constitutives de son ADN et de sa stratégie de conquête. Et pourtant il observe aujourd’hui un calme et une retenue inédite. C’est le Front National de Marine Le Pen, le parti de l’extrême droite française. Là où les autres, les socialistes notamment, s’échinent dans leurs combats internes à préserver les valeurs fondatrices de la gauche, là où la droite des républicains s’évertue à retrouver un leadership capable de lui garantir un retour aux affaires, le FN semble flotter dans une incroyable retenue.

Il est vrai que Marine Le Pen avait, depuis quelques mois déjà, pris la décision de limiter ses apparitions dans les médias, une sorte d’abstinence censée donner l’impression d’une introspection salvatrice et de créer en même temps un désir de la parole lepeniste. Le Front National s’est contenté d’envoyer sur le front des médias parisiens un de ses portes paroles les moins clivants, Floriant Phillipot, pour servir un verbiage et des éléments de langage à peine plus corsés que ceux que pourrait tenir n’importe quel républicain de Nicolas Sarkozy, de l’acabit d’un Eric Ciotti, d’une Nadine Morano ou d’un Christian Estrosi, dans leurs moments d’énervement ou d’excès.

La stratégie d’attente de Marine Le Pen promet d’être payante. Déjà les vagues migratoires qui se sont abattues sur l’Europe et les attentats terroristes qui ont frappé Paris et Bruxelles ont donné chair à de nombreuses postures xénophobes qui ont fait la fortune politique du Front. Aujourd’hui l’incroyable sortie par voie référendaire de la Grande Bretagne de l’union Européenne semble être un vrai cadeau du ciel. Elle valide de manière fracassante toutes les idées europhobes que le Front National a pu instrumentaliser pour bombarder les structures du pouvoir de l’union nichés à Bruxelles ou à Strasbourg. Le Brexit a été considéré par Marine Le Pen comme "l’événement historique le plus important que notre continent ait connu depuis la chute du mur de Berlin".

Marine Le Pen semble profiter en silence de la vague des populistes qui monte inexorablement en Europe et qui a vu la spectaculaire victoire du mouvement 5 étoiles en Italie. Elle s’est bruyamment félicitée de l’invalidation des présidentielles en Autriche espérant que l’extrême droite dans ce pays pourra transformer l’essai lors du prochain scrutin. L’état major du Front National observe avec beaucoup d’attention la montée en puissance d’un homme devenu icône du populisme à l’échelle globale, Donald Trump, le candidat des républicains à la course à la Maison Blanche. La presse mondiale a depuis longtemps établi un cousinage politique et idéologique entre Marine Le Pen et l’héritage raciste et islamophobe de son parti et les coups de menton des multiples menaces d’exclusion sur lesquels un homme comme Donald Trump a bâti la séduction de son discours.

Dans sa stratégie de l’attente, Marine Le Pen semble être portée par deux facteurs essentiels. Le premier est qu’elle commence déjà à cueillir les fruits de sa volonté de sortir le Front National du cercle diabolique et satanique dans lequel son paternel Jean Marie Le Pen l’avait longtemps enfermé. La guerre médiatique et politique déclarée avec le fondateur du Front National avait finalement tourné à son avantage, donnant l’impression d’avoir gagné la bataille de la "normalisation". Jean Marie Le Pen, usé presque grabataire, semble hurler son désespoir dans le désert . Signe des temps et d’une nouvelle démarche, Marine Le Pen avait joint sa voix à ensemble de la classe politique via Twitter pour rendre un hommage appuyé à Michel Rocard, père de la deuxième gauche, mort à l’âge de 85 ans, laissant deux icônes prometteuses de la politique Française, Manuel Valls et Emmanuel Macron se disputer son héritage et sa filiation.

Le second facteur est la séquence difficile que semble vivre concomitamment le duo "UMPS" que Marine Le Pen avait l’habitude de fustiger. La gauche au gouvernement est prise à la gorge par une gauche frondeuse qui l’empêche d’appliquer ses réformes et semble prête pour créer les conditions objectives qui priveront François Hollande d’un second mandat. Quand la droite, elle paraît paralysée par une violente guerre de chefs et d’égo. Le retour en force de Nicolas de Nicolas Sarkozy finira par être gagnant, mais suffira-t-il pour arracher l’adhésion de la droite et du centre pour lui garantir un retour à l’Elysée.

Devant l’ensemble de cette situation, Marine Le Pen semble attendre que le fruit mûr du pouvoir lui tombe dans l’escarcelle. Les sondages la donnaient déjà finaliste de la présidentielle, le contexte populiste européen et mondial pourrait lui apporter la performance rêvée.

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