Macron et le troisième tour de la présidentielle?

Logiquement la rue est pavée pour Emmanuel Macron pour l’obtention d’une majorité parlementaire. La tradition veut que les Français élisent un président de la république, dans leur élan, ils le gratifient d’une majorité confortable pour lui éviter les affres d’une cohabitation obligatoire ou d’alliances imposées.

Par Mustapha Tossa

A une semaine du premier tour de ces législatives françaises, les études d’opinion prédisent ce scénario heureux pour Emmanuel Macron. Cette issue est d’autant plus surprenante que le Parti La république En Marche est récent, presque neuf, ne pouvant donc disposer de cette profondeur sociale et territoriale capable d’encadrer les territoires et de fabriquer des députés à la chaîne pour former cette fameuse vague En Marche, colonne vertébrale de cette future majorité.

Après un sacre présidentiel que certains, les plus cyniques, peuvent au pire attribuer à un miraculeux alignement des planètes, Emmanuel Macron se met à rêver d’une Assemblée nationale dominée par les couleurs d’En marche, prête à lui faire bruyamment allégeance et à soutenir ses réformes et ses choix politiques. Plusieurs indicateurs rendent ce rêve possible et réalisable et justifient amplement l’optimisme des instituts de sondages.

Dans ces indicateurs, il est question de cette brillante séquence international qui avait permis à Emmanuel Macron de vêtir rapidement l’habit présidentiel et de rassurer les Français de sa capacité à se mouvoir sur la scène internationale. Du Mali où il avait innové dans la lutte contre le terrorisme, au sommet de l’OTAN où il s’est frotté au rugueux Donald Trump, en passant par Versailles où il s’est hissé en brisant la glace avec l’impassible Vladimir Poutine, jusqu’à L’Elysée où il a répondu avec une virilité et un leadership à la dénonciation par le président américain de l’accord climat issu de la Cop 21 de Paris et conforté par la Cop 22 à Marrakech, autant d’instantanés qui ont forgé la personnalité et commencé à tisser la légende d’Emmanuel Macron.

L’autre indicateur est le choix stratégique, voire machiavélique, de choisir Edouard Philippe, un homme de droite, proche d’Alain Juppé au poste de premier ministre de de confier les ministères clefs de l’économie et des finances à des personnalités de droite comme Bruno Le Maire ou Gérard Darmanin. Cette démarche a eu pour effet immédiat de provoquer des schismes au sein du parti Les Républicains, la seule force qui était capable de disputer à Emmanuel Macron et à son parti la majorité parlementaire.

Aujourd’hui, le parti Les républicains, en mal d’un vrai leader et d’une ligne politique claire à l’égard du projet politique d’Emmanuel Macron, pataugent dans ses contradictions et ses multiples attirances entre ceux qui veulent tenter l’aventure Macron et ceux qui veulent s’y opposer. À ses séductions opérées par Macron, il faut rajouter la précieuse prise de guerre en la personne de Nicolas Hulot, icône incontestée de l’écologie militante qui vaut son pesant de voix et de ralliement.

Dans ce contexte, le troisième indicateur touche les capacités des forces adverses. Le Front National dont la présidente Marine Le Pen avait réussi à catalyser sur son nom près de onze millions de voix voit son parti subir des craquements internes. Entre une Marion Maréchal Le Pen qui jette l’éponge et un Florian Philippot qui menace de prendre le large, Marine Le Pen subit de plein fouet les effets de ses mauvaises prestations à cette présidentielle. Ses futures performances aux législatives porteront la marque de ces défaites. De l’autre côté de la carte politique, au Front de gauche, Jean Luc Mélenchon, dont l’auto-parachutage dans la ville de Marseille fait plus grincer les dents que susciter les enthousiasmes, n’est pas de nature à lui garantir des résultats à la hauteur de sa prestation personnelle lors de cette presidentielle. Quant au Parti socialiste, cannibalisé par le mouvement En marche, sa survie et sa capacité à obtenir un groupe parlementaire sont vivement interrogées.

Seule grande ombre à ce tableau idyllique d’Emmanuel Macron, l’affaire Richard Ferrand, qui incarne aux yeux de l’opinion tout ce contre quoi le nouveau président s’est élevé. Moraliser la vie politique française a été un grand levier de conquête. Ferrand et son halo de soupçons d’abus de pouvoir, d’enrichissement personnel, de conflit d’intérêts est devenu un caillou politiquement douloureux dans la chaussure du nouveau président. Son maintien au gouvernement contre l’avis de la majorité des Français peut avoir sinon un prix quant aux résultats des futures législatives, du moins un sérieux coup de griffe dans la crédibilité du nouveau locataire de l’Elysée.

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