Les salariés de France 24 attendent que l’Elysée règle le conflit avec Christine Ockrent

L’intersyndicale de France 24 (CFDT, CFTC et CFE-CGC) a annoncé, mardi 11 janvier, la suspension du préavis de grève illimitée qu’elle avait déposé pour le jeudi 13 janvier afin "de dénoncer le mutisme des autorités de tutelle" face à la crise de gouvernance que traverse l’Audiovisuel extérieur de la France (AEF). La chaîne d’informations internationales est dans son périmètre, avec Radio France International (RFI) et une partie de TV5 Monde.

Dans un communiqué diffusé en interne, les trois syndicats de France 24 indiquent avoir été reçus en début de semaine à l’Elysée par Camille Pascal, le nouveau conseiller pour les médias du chef de l’Etat qui "les a écoutés".

"Aucune décision n’a été prise, aucun calendrier n’a été arrêté, mais il nous a assuré que le dossier était suivi, et que, ni l’entreprise, ni les salariés ne devaient être menacés par les problèmes de management que connaît la chaîne depuis des mois", explique Aziza Nait Sibaha, déléguée syndicale CFTC. "Nous restons vigilants et nous n’écartons pas la possibilité de déposer un nouveau préavis de grève si la situation n’évolue pas", poursuit-elle.

Dimanche 9 janvier, Frédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication, avait déjà déclaré sur Canal+ qu’il allait "sonner la fin de la récré" à France 24, à l’issue du conseil d’administration de la chaîne, qui doit se tenir le 20 janvier.

"Guerre des chefs"

Ce conseil devrait prendre une décision concernant la "guerre des chefs" que se livrent depuis des mois Alain de Pouzilhac, PDG de l’AEF, et Christine Ockrent, directrice générale déléguée de la holding. Une guerre de pouvoir qui a tourné en faveur de M. de Pouzilhac après sa décision d’écarter tous les proches collaborateurs embauchés par Mme Ockrent à qui il reprochait, entre autres, d’avoir fait exploser les dépenses.

Pour autant, M. de Pouzilhac n’est pas à l’abri d’une sanction et nombre de ses soutiens à l’intérieur de la chaîne redoutent que la tutelle ne "donne un grand coup de balai" en débarquant les deux dirigeants. A moins que les administrateurs temporisent en lui demandant de "mieux tenir" la maison et lui fixent quelques mois pour négocier financièrement et en douceur le départ de Mme Ockrent.

Larvée tout au long de 2010, la guerre entre les deux dirigeants de l’AEF s’est aggravée début novembre 2010, avec la découverte d’une affaire d’espionnage électronique des serveurs de la direction de l’AEF dans laquelle une proche collaboratrice de Mme Ockrent est impliquée. Elle a été licenciée pour faute grave par M. de Pouzilhac et une enquête a été confiée à la brigade d’enquêtes sur les fraudes aux technologies de l’information. Les enquêteurs ont retrouvé dans son ordinateur 2,5 millions de fichiers provenant de cinq serveurs des ordinateurs de dirigeants du groupe. Placée en garde à vue, elle s’est défendue de tout espionnage pour le compte de Mme Ockrent.

Après la révélation de cette affaire, tous les directeurs et sous-directeurs de France 24 ont annoncé qu’ils refuseraient désormais de participer aux réunions où Mme Ockrent serait présente. De leur côté, le 15 décembre 2010, les salariés ont voté à 85 % une motion de défiance à l’encontre de Mme Ockrent qui a refusé de quitter son poste. "C’est aux autorités de tutelle de décider de la marche à suivre et non pas aux assemblées générales", a-t-elle répondu. Depuis, la journaliste est invisible dans les locaux de France 24.

Pour le moment, aucune preuve n’a effectivement été apportée sur la culpabilité de Mme Ockrent et l’enquête policière est toujours en cours. Mais, trois mois après le dépôt de la plainte par le PDG de l’AEF, une information judiciaire pourrait être ouverte dans les jours qui viennent.

Daniel Psenny (LE MONDE)

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