Les musulmans de France célèbrent l’Aïd-el-Adha, entre croyances et enjeux sanitaires

Plus de 100 000 moutons vont être abattus en France en trois jours, dont une partie dans des abattoirs mobiles sous surveillance vétérinaire.

Source AFP

Les musulmans ont commencé lundi à célébrer l’Aïd-el-Adha, la fête du sacrifice : plus de 100 000 moutons vont être abattus en France en trois jours, dont une partie dans des abattoirs mobiles sous surveillance vétérinaire. L’Aïd-el-Adha (fête du sacrifice) ou Aïd-el-Kébir (grande fête) commémore la soumission à Dieu d’Abraham, prêt à immoler son fils, auquel fut in extremis substitué un mouton. D’où le rite qui consiste à sacrifier une « bête de troupeau » partagée avec ses proches et les pauvres lors de cette fête qui est aussi un temps de bénédiction et de prière.

Les capacités des abattoirs étant limitées, le Conseil français du culte musulman (CFCM) a réitéré cette année sa recommandation d’étaler l’abattage sur les trois jours que dure la plus grande fête du calendrier hégirien. Mais l’instance représentative de la deuxième religion de France a opposé une fin de non-recevoir à la Fondation Brigitte Bardot, qui lui demandait de s’opposer à ce sacrifice rituel « où des milliers de moutons vont se faire trancher la gorge en toute conscience et dans la souffrance ».

Approbation du préfet de Seine-Saint-Denis

« L’abattage rituel peut être effectué dans l’ensemble des abattoirs de France, tout au long de l’année, dans le respect des exigences de la protection et du bien-être animal », a répondu le président du CFCM, Anouar Kbibech. Le sujet, sur lequel une commission d’enquête parlementaire doit rendre fin septembre un rapport, est cependant sensible dans l’opinion. Au cours de leurs travaux, les députés se sont longuement interrogés sur les pratiques d’égorgement sans étourdissement, autorisées par dérogation aux membres des cultes juifs (rituel casher) et musulmans (halal).

Une soixantaine d’abattoirs temporaires ont été agréés cette année pour l’Aïd afin d’enrayer les pratiques clandestines. Ils s’ajoutent à quelque 120 abattoirs pérennes utilisés toute l’année. L’une de ces structures mobiles, la seule en Seine-Saint-Denis, a été installée sur un vaste parking de Dugny. Cet abattoir mobile, opéré par un abatteur de l’Oise, est le fruit d’un partenariat entre le conseil régional du culte musulman (CRCM), les services de l’État et le conseil départemental. Un millier d’ovins importés d’Espagne et de Pologne doivent être sacrifiés en deux jours sur cette chaîne, sous le contrôle des services vétérinaires, qui inspectent la bête ante et post-mortem et chronomètrent sa perte de conscience.

L’égorgement, pratiqué par un sacrificateur musulman agréé, se fait derrière un rideau, pour ne pas traumatiser le bétail. Les acheteurs ont choisi leur bête dans un enclos attenant il y a déjà plusieurs jours, mais, pour être déclaré « mouton de l’Aïd », l’animal ne peut être sacrifié qu’après la prière ouvrant la fête. Celle-ci a eu lieu vers 9 heures sous une tente. « J’ai insisté sur le fait qu’il s’agit d’une fête du partage avec l’autre », explique à l’AFP Merzak El Bekkay. Pour le préfet de Seine-Saint-Denis, Philippe Galli, « les équipes sont professionnelles, les animaux pas stressés. Ce qui prouve qu’on peut respecter le rite de l’Aïd tout en respectant les règles publiques ».

300 euros pour un mouton

Mais pour M’hammed Henniche, secrétaire général de l’Union des associations musulmanes (UAM) du 93, ce type d’abattage temporaire est « presque une goutte d’eau » vu les besoins. Lui préfère faire abattre en Angleterre des carcasses commandées par les fidèles de sa mosquée de Pantin : elles ne leur seront livrées qu’au deuxième jour de l’Aïd, le temps d’être acheminées après la prière de lundi matin. « La communauté ne fait pas confiance à la grande distribution, car elle n’a aucune certitude que l’abattage soit halal. Là, ils ont la garantie de la mosquée, c’est plus sécurisé », plaide-t-il.

Mohammed Saha, venu d’Aubervilliers à Dugny, se réjouit du « sérieux » de l’abattoir temporaire… mais s’étonne des prix pratiqués : 300 euros pour son mouton. « Certes, il faut payer l’installation, les vétérinaires, mais là je trouve que c’est incorrect ! » peste le fidèle en attendant, ticket en main, sa carcasse. Qu’il découpera en trois lots : un pour lui et les siens, un pour la famille élargie, un autre pour les « nécessiteux » du voisinage.

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