Les dernières minutes du vol Rio-Paris

Les dernières minutes du vol Rio-Paris
Le commandant de bord du Rio-Paris venait de sortir du cockpit, confiant les manettes à ses deux copilotes, lorsque l’Airbus A330 est entré dans une zone de turbulences et que les instruments de mesure se sont mis à afficher des vitesses incohérentes, selon les premières données des boîtes noires. Il y est revenu une minute et demie après le désengagement du pilote automatique mais l’appareil avait déjà décroché, entamant une chute de 38.000 pieds en trois minutes et demie.

Confronté à de nombreuses fuites dans la presse française et étrangère, le Bureau d’enquêtes et d’analyses (BEA) pour la sécurité de l’aviation civile a mis en ligne ce vendredi les premières données tirées du décryptage des boîtes noires de l’avion, repêchées au début du mois.

Son directeur Jean-Paul Troadec a été interrogé sur le rôle qu’ont pu jouer dans le drame de 2009 les turbulences, le givrage des sondes Pitot -qui mesurent la vitesse de l’appareil- et les réactions de l’équipage. "C’est la combinaison de tout cela", a-t-il avancé lors d’un entretien téléphonique.

Les informations publiées vendredi sur le site internet du BEA "ne sont que des constatations et ce n’est pas la compréhension de l’événement", a toutefois insisté le directeur de l’organisme qui est chargé de l’enquête technique. Le BEA promet de diffuser à la fin du mois de juillet prochain un troisième rapport d’étape, après ceux de juillet et décembre 2009.

L’Airbus A330-203 d’Air France, qui reliait Rio de Janeiro à Paris, s’est abîmé dans l’Atlantique le 1er juin 2009, environ quatre heures après le décollage, tuant les 228 personnes à bord, dont 216 passagers et 12 membres d’équipage.

Selon la note d’information du BEA, les moteurs ont "fonctionné et toujours répondu aux commandes de l’équipage".

Les données des boîtes noires, qui ont été récupérées dans leur intégralité, ont permis d’établir la chronologie suivante.

A 2h01 (temps universel), le commandant de bord quitte le cockpit après avoir assisté au briefing entre les deux copilotes. Celui qui avait effectué le décollage à 22h29 reste aux commandes. A 2h06, il prévient les hô tesses et les stewards que "dans deux minutes là, on devrait attaquer une zone où ça devrait bouger un peu plus que maintenant". A 2h08 effectivement, le niveau de turbulences augmente légèrement.

A 2h10, le pilote automatique se désengage, les vitesses affichées deviennent contradictoires – une incohérence qui dure un peu moins d’une minute – et l’avion décroche. Le copilote aux manettes cabre, son collègue rappelle le commandant de bord, qui revient dans le cockpit à 2h11. L’appareil a déjà perdu 3.000 pieds.

A 2h12, le copilote aux commandes déclare "je n’ai plus aucune indication" et son collègue "on n’a aucune indication qui soit valable". Les enregistrements s’arrêtent à 2h14. La descente a duré 3 minutes et demie, durant laquelle "l’avion est resté en situation de décrochage", précise le BEA. Les ordres du pilote aux commandes "ont été majoritairement à cabrer".

Toutes deux mises en examen en mars dernier pour "homicides involontaires", Air France et Airbus interprétaient chacune à leur manière les premières données des boîtes noires.

Pour la compagnie aérienne, "la panne des sondes de vitesse est l’événement initial qui entraîne la déconnexion du pilote automatique". "L’équipage, rassemblant les compétences des trois pilotes, a fait preuve de professionnalisme, engagé jusqu’au bout dans la conduite du vol", souligne Air France en leur rendant hommage dans un communiqué.

Une source proche de l’avionneur s’interrogeait en revanche sur ce qui avait pu pousser le pilote à cabrer alors que l’avion venait de décrocher. Dans ce cas de figure, sur tous les appareils, "il faut légèrement piquer, ça permet à l’avion de retrouver sa portance", affirmait-on de même source. Cette manoeuvre n’est déconseillée que "si vous êtes à très basse altitude", assurait-on. "Là, en l’occurrence, il s’agissait d’une haute altitude".

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