Le faux Viagra fait un carton et des ravages

De tous les médicaments vendus sur Internet, ceux destinés à augmenter la puissance sexuelle ou la masse musculaire sont les plus demandés. Pour se sentir à la hauteur, les internautes prennent de gros risques.

Le faux Viagra fait un carton et des ravages
«Pour les risques et effets secondaires, veuillez consulter les forums.» Telle est en résumé la situation délicate dans laquelle se trouvent les internautes qui commandent des médicaments sur Internet. Ils les reçoivent dans des emballages banalisés, sans indication quant à leur d’origine et sans l’«information destinée aux patients».

Ce faisant, il prennent de gros risques, sans compter qu’ils agissent à la frontière de la légalité. Il est certes possible en Suisse d’importer des médicaments pour l’équivalent d’un mois de médication. Cette exception est prévue toutefois pour celles et ceux qui rentrent au pays avec un traitement qui leur a été prescrit à l’étranger.

Passé cette faible dose, qui est tolérée, l’importation comme la vente de médicaments par correspondance est interdite. Ce que semblent ne pas savoir ou feignent d’ignorer bon nombre d’internautes.

Plus sensibles au prix qu’aux risques

Curieux de connaître leurs motivations, un étudiant en pharmacie de l’Université de Bâle a choisi d’y consacrer son travail de Master. Comme le rapporte le Tages-Anzeiger, Cédric Wernli a eu l’idée de placer un questionnaire sur des forums consacrés à la puissance sexuelle, sachant que le Viagra et ses dérivés représentent un tiers des achats médicamenteux sur la Toile.

Bien lui en a pris: 41 personnes, tous des hommes âgés en majorité de plus de 40 ans, ont répondu. Cédric Wenrli a analysé leurs réponses en collaboration avec Ruth Mosimann, qui dirige le contrôle des médicaments illégaux au sein de Swissmedic.

Il en ressort que les acheteurs sous-estiment les risques qu’ils font peser sur leur santé. Près de 90% d’entre eux considèrent que le principe actif mentionné sur l’emballage est efficace et trois quarts pensent que les médicaments achetés sur Internet ne sont pas dangereux. Deux tiers n’hésitent d’ailleurs pas à les combiner.

Swissmedic, en tant qu’autorité chargée du contrôle et de l’autorisation des médicaments, a pourtant prouvé le contraire. Ainsi, sur 44 lots de stimulants de l’érection analysés en 2008, 27 se sont révélés être des contrefaçons ou des imitations de mauvaise qualité. Certains produits étaient même surdosés et pouvaient entraîner des problèmes de santé graves.

Puissance et silence

De tous les hommes qui ont répondu au questionnaire, seuls 28% ont consulté un médecin en raison de dysfonctionnements. Si ces derniers achètent néanmoins sur Internet, c’est en raison du prix: un cachet de Viagra acquis sur ordonnance coûte environ 20 francs. Le même montant permet d’acheter dix «génériques» sur le Web.

Les autres mentionnent également le prix mais contournent par ailleurs l’obstacle d’une prescription médicale à laquelle ils n’auraient pas forcément droit, n’ayant pas de problèmes physiologiques. Ces acheteurs utilisent ces médicaments dans l’espoir d’améliorer leur puissance sexuelle. Ils les utilisent comme aphrodisiaques, alors que ces derniers n’ont scientifiquement aucun impact sur la libido.

Roulette russe

Plus problématique: en l’absence de prescription médicale et de notice d’utilisation, nombreux sont ceux qui forcent le dosage. Ils pensent accroître leurs capacités en proportion, bien qu’il soit démontré que l’utilité physiologique de ces médicaments n’est pas proportionnelle à la quantité absorbée.

Seuls augmentent les effets secondaires et les risques. Comme l’explique Ruth Mosimann dans les colonnes du Tagi, les consommateurs de substances achetées sur Internet jouent en quelque sorte à la roulette russe. «Souvent, tout va bien, une fois tout va mal».

Lorsque les problèmes de vue ou d’ouïe se font jour, ou pire des problèmes de type cardio-vasculaires nécessitant une hospitalisation ou des érections durables pouvant déboucher sur l’amputation, il est trop tard pour regretter.

Quatre consommateurs ont même payé leur imprudence de leur vie en 2008 à Singapour: l’imitation de Viagra qu’ils avaient achetée intégrait une substance destinée au traitement du diabète de type II.

Devant ces risques, Swissmedic a publié l’an dernier un guide à l’usage de ceux qui seraient tentés par l’automédication sur Internet.

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