Le Maroc annule un jugement « historique » sur la paternité d’un enfant « illégitime »

La cour d’appel de Tanger (nord) vient d’annuler un jugement qui reconnaissait pour la première fois au Maroc la paternité d’un enfant né hors mariage, suscitant colère et déception chez les défenseurs des droits de l’Homme.

Le tribunal de première instance de Tanger avait livré en janvier dernier un jugement reconnaissant à un homme la paternité d’une fille née hors mariage, sur la base de tests ADN fournis par la mère, une première au Maroc.

Le père avait alors été condamné à verser à la mère une indemnité de 100.000 dirhams (9.000 euros), bien que cette reconnaissance de la paternité ne donnait pas à l’enfant accès aux droits liés à la filiation, tels que l’héritage.

Ce jugement qualifié d’"historique" a été infirmé mardi par la cour d’appel, qui a également condamné la mère à payer les frais de justice, a indiqué à l’AFP l’avocat de la défense, maître Ahmed Guennoun.

"Les juges de la cour d’appel viennent d’étouffer ce qui ressemblait à un début de révolution juridique", commentait mercredi le site Médias 24, qui a révélé l’affaire.

"C’est une grande déception pour la mère et ses proches. Nous allons saisir la Cour de cassation (plus haute juridiction marocaine) et plaçons nos espoirs dans ses juges, des hommes et femmes de grande valeur", a poursuivi l’avocat.

"Le Maroc, un pays où les hommes sont aidés par la justice pour ne pas assumer leurs actes… au détriment d’un nouveau-né", a fustigé l’association de défense des femmes Insaf.

Dans un pays où les relations sexuelles hors mariage sont officiellement proscrites, les enfants nés hors mariage sont considérés comme "illégitimes" par la loi.

Selon une étude publiée en 2011 par Insaf et l’ONU, plus de 7 futurs pères sur 10 sont informés dans le cas de grossesses hors mariage, mais la plupart refusent de reconnaître l’enfant.

D’après ce même rapport, près de 30.000 accouchements de mères célibataires sont recensés chaque année. Ces mères "sont amenées à vivre l’exclusion, le rejet, la discrimination voire l’exploitation", est-il souligné.

Pour éviter ces situations dramatiques, certaines ont recours à l’avortement, autorisé depuis 2015 dans certains cas comme pour la grossesse résultant d’un viol ou la malformation du foetus.

En septembre dernier, une pétition lancée en ligne par des associations appelait à ce que "tous les enfants du Maroc jouissent des mêmes droits fondamentaux quel que soit le statut de leurs géniteurs au moment de leur conception". (afp)

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