La Tunisie commémore le premier anniversaire de l’assassinat de Chokri Belaïd

Une Tunisie qui se remet lentement d’une année tourmentée commémore jeudi le premier anniversaire de l’assassinat de l’opposant de gauche Chokri Belaïd, deux jours après l’annonce de la mort de son assassin présumé, Kamel Gadhgadhi.

L’avocat de 48 ans, militant des droits de l’homme et farouche critique des islamistes, avait été assassiné par balles le 6 février 2013 devant chez lui, dans un quartier résidentiel de Tunis.

L’assassinat avait été attribué par les autorités aux jihadistes d’Ansar Asharia, une organisation classée "terroriste" par la Tunisie, mais qui n’a jamais revendiqué ce meurtre ni aucune autre attaque armée.

La mort de Gadhgadhi « est le plus beau cadeau que l’on puisse faire aux Tunisiens au premier anniversaire de l’assassinat » de Chokri Belaïd, n’a pas hésité à déclarer le ministre de l’Intérieur mardi soir. Un enthousiasme que ne partage pas l’entourage de Chokri Belaïd. Son frère, Abdelmajid, s’étonne. « J’ai des sources très fiables, confie-t-il au Figaro, qui m’ont annoncé l’arrestation lundi de Kamel Gadhgadhi vivant, et là, on dit qu’il a été tué dans l’assaut. À deux jours de la date anniversaire de l’assassinat de mon frère, c’est tout de même étonnant ! »

Abdelmajid Belaïd fait partie de ceux qui ont dénoncé la reconduction dans le nouveau gouvernement tunisien, apolitique, du ministre de l’Intérieur Lotfi Ben Jeddou. « Tout cela ressemble à une mise en scène pour redonner du crédit à ce ministre dont on ne voulait pas ! », s’indigne-t-il. Lotfi Ben Jeddou faisait partie, depuis mars 2013, du gouvernement précédent, tenu par les islamistes d’Ennahda, que les proches de Chokri Belaïd accusent d’être derrière l’assassinat de l’avocat, ainsi que de celui du député d’opposition Mohammed Brahmi. Face aux lenteurs de l’enquête, un collectif s’est monté autour de la veuve de Chokri Belaïd. L’Irva (Initiative pour la recherche de la vérité sur l’assassinat) mène depuis plusieurs mois sa propre investigation et affirmait, en novembre dernier, que le ministère de l’Intérieur dissimulait des preuves impliquant le pouvoir alors en place. Selon l’Irva, l’arme utilisée pour le meurtre de Chokri Belaïd « n’est utilisée que par des hauts cadres de la Sûreté nationale ». Une affirmation basée sur l’expertise balistique menée par un laboratoire néerlandais, mais dont le rapport n’a jamais été versé au dossier, selon l’Irva.

Le collectif s’est entouré de plusieurs avocats, dont le Français Jean-Pierre Mignard. Lors d’une visite à Tunis en septembre dernier, il s’étonnait du manque de volonté politique pour faire toute la lumière sur cette affaire et du manque de moyens alloués aux magistrats.

Une grande manifestation est prévue samedi pour rappeler que le 8 février 2013, jour de son enterrement, le pays avait été paralysé par une grève générale et que des dizaines de milliers de personnes avaient rendu un dernier hommage à l’opposant, un événement qui avait pris des allures de manifestation contre Ennahda.

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