La Tunisie cherche à sécuriser ses sites touristiques après le carnage

Confrontées à l’essor de la mouvance jihadiste, les autorités tunisiennes s’évertuent à trouver les moyens de sécuriser plages et sites touristiques, deux jours après un attentat contre un hôtel en bord de mer qui a fait 38 morts, le plus sanglant de l’histoire du pays.

Vendredi, un jeune tunisien a fait irruption sur la plage de l’hôtel Riu Imperial Marhaba à Port El Kantaoui, près de Sousse (140 km au sud de Tunis), une kalachnikov cachée dans son parasol, avant d’ouvrir le feu sur les touristes.

Des fleurs ont été déposées dimanche sur la plage. Au milieu, sur un papier la mention "Nous ne vous oublions pas", en anglais.

Sur une plage proche, des policiers en armes faisaient des allers-retours sur des quads, selon une journaliste de l’AFP sur place.

Au moins 15 Britanniques ont péri dans l’attentat selon le Foreign office, un bilan qui pourrait s’alourdir car les autorités tunisiennes n’ont pas encore fini d’identifier les 38 victimes. Londres a par ailleurs averti que "d’autres attaques terroristes en Tunisie étaient possibles".

Le groupe Etat islamique (EI) a revendiqué l’attaque près de Sousse, affirmant que le jihadiste, identifié par comme Seifeddine Rezgui, né en 1992 et étudiant à Kairouan (centre), avait tué "des sujets des Etats de l’alliance croisée", en allusion à la coalition internationale antijihadistes menée par les Etats-Unis.

Selon le porte-parole du ministère de l’Intérieur, Mohamed Ali Aroui, le téléphone portable du tueur présumé, qu’il avait jeté dans la mer, a été retrouvé.

"Une seule personne a perpétré l’attentat mais ce qui est sûr, c’est qu’il y a des gens qui ont aidé" l’assaillant, abattu par la police après le carnage, a-t-il ajouté. Sa famille a été interrogée.

Samedi soir, le ministre de l’Intérieur Najem Gharsalli a indiqué que les moyens de protéger "les sites touristiques et les plages par des unités armées de la police" étaient à l’étude.

Mobilisation possible de 1000 agents

Avec l’attentat de vendredi et celui du musée du Bardo en mars (22 morts dont 21 touristes), aussi revendiqué par l’EI, la Tunisie ne peut "plus rester à l’écart de mesures difficiles", a reconnu M. Gharsalli en évoquant la possibilité de mobiliser "au moins 1.000 agents".

Le Conseil national de sécurité tunisien, présidé par le chef de l’Etat Béji Caïd Essebsi, était réuni dans la journée pour décider des "mesures" à prendre.

"Nous devons aider la Tunisie" qui peut "toujours compter sur la France", a déclaré à Paris le Premier ministre Manuel Valls.

Avec 1.000 km de littoral, d’innombrables plages et des sites archéologiques de renommée internationale, la Tunisie a très longtemps été l’une des destinations phare des tours opérateurs européens.

Mais depuis la révolution de 2011 qui a chassé du pouvoir Zine El Abidine Ben Ali, les bouleversements politiques, les tensions économiques et sociales et la montée du jihadisme ont pesé sur le secteur crucial du tourisme (7% du PIB).

Sur le court-terme, les professionnels du secteur affichent peu d’espoir.

Les réservations avaient déjà chuté après l’attentat du Bardo et dès vendredi soir, les touristes s’empressaient de quitter le pays.

"Ca arrive partout"

Selon des tours opérateurs britanniques et belges, quelque 4.500 touristes devraient avoir été rapatriés d’ici dimanche soir par des vols spécialement affrétés.

Tunis n’a toujours pas publié la liste détaillée des victimes qui n’étaient vêtues que de leurs maillots de bain au moment du carnage, sans papiers d’identité sur elles.

"Nous prenons le temps nécessaire. Il faut faire zéro erreur. Nous avons pris les empreintes dentaires et manuelles (de certaines victimes). Des familles sont arrivées de l’étranger pour identifier les corps", a déclaré Naoufel Somrani, directeur des services d’urgence au ministère de la Santé.

Outre les victimes britanniques, une Allemande, une Belge, une Irlandaise et une Portugaise figurent parmi les morts selon les autorités.

Les touristes étaient clairement visés à Port El Kantaoui selon plusieurs témoignages.

Mais dimanche matin, devant un hôtel proche de l’Imperial Marhaba, une quinzaine d’étrangers prenaient le soleil sur la plage.

"J’ai choisi de poursuivre mes vacances. Ce n’est la faute de personne. On a peur, oui, on ne peut pas dire qu’on n’a pas peur. (Mais) ça arrive partout ce genre d’actes", dit à l’AFP Safia, une touriste française d’une soixantaine d’années.

Outre les attaques contre les touristes, des dizaines de soldats et policiers ont été tués depuis 2011 dans des violences, la plupart au mont Chaambi (centre-ouest) où se trouve le principal maquis jihadiste en Tunisie.

De plus, ce pays fournit aujourd’hui le plus gros contingent de ressortissants -environ 3.000- auprès de groupes jihadistes en Syrie, en Irak et en Libye.

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