La France s’inquiète fortement de l’afflux de jihadistes en Syrie, dont des mineurs

Les autorités françaises s’inquiètent de l’afflux de jihadistes français, dont certains mineurs, vers la Syrie, un phénomène "jamais égalé" et qui touche, avec plus ou moins d’ampleur, "tous les pays d’Europe", selon le ministre de l’Intérieur, Manuel Valls.

"Le phénomène m’inquiète, le mot est faible", a déclaré dimanche Manuel Valls. "Il représente pour moi le plus grand danger auquel nous devons faire face dans les prochaines années", a affirmé le ministre, concédant que "nous, Français et Européens, pouvons être dépassés par ce phénomène, vu l’ampleur".

Alors qu’on ne compte qu’une poignée de Français ou résidents français dans les rangs jihadistes en Afghanistan, au Mali ou en Somalie, les services français en recensent près de 700, plus ou moins impliqués, dans le conflit en Syrie, a souligné le ministre.

Près de 250 Français ou personnes résidant en France y combattent, une centaine sont en transit pour s’y rendre, 150 ont manifesté leur volonté de s’y rendre et 76 en sont revenus. Vingt et un y sont morts.

Ces dernières semaines, le phénomène "s’est accéléré" et une douzaine de mineurs se sont rendus en Syrie ou ont voulu s’y rendre, a précisé Manuel Valls dans l’émission "Le Grand rendez-vous" Europe1/I-télé/leMonde.

Vendredi, le parquet de Toulouse (sud-ouest) avait annoncé avoir alerté la section antiterroriste du parquet de Paris sur le cas de deux jeunes de 15 ans partis pour la Turquie avec l’intention de combattre en Syrie.

Selon le père de l’un d’eux, les deux jeunes lycéens sont partis le 6 janvier pour rejoindre "des combattants d’al-Qaïda" en Syrie après avoir subi un "lavage de cerveau sur internet".

"Ce n’est pas dans les mosquées que ces recrutements s’organisent, c’est le plus souvent sur internet", a confirmé dimanche Manuel Valls.

Un retour "particulièrement délicat"

Selon lui, ces départs vers la Syrie peuvent s’expliquer par plusieurs facteurs: "On peut se rendre en Syrie relativement facilement, ensuite ce combat apparaissait juste puisque toutes les grandes puissances condamnaient les agissements du régime de Bachar al-Assad, et puis il y a sans doute un malaise dans une partie de la jeunesse".

"C’est un phénomène qui touche tous les pays d’Europe", a insisté le ministre, mais aussi "l’Australie, le Canada, les Etats-Unis et bien sûr, avec une ampleur plus importante, les pays du Maghreb".

La Belgique avait été la première en Europe à publiquement s’inquiéter, début 2013, du départ vers la Syrie d’un nombre croissant ses ressortissants, dont certains mineurs. Et en début de semaine, le ministre belge des Affaires étrangères Didier Reynders a estimé à "plus de 200" le nombre de Belges partis combattre en Syrie, dont "plus d’une vingtaine" ont été tués.

"La plupart sont dans les groupes les plus extrémistes, y compris dans l’Etat islamique en Irak et au Levant (EIIL)", a-t-il affirmé.

En décembre, les ministres français et belge de l’Intérieur avaient estimé qu’entre 1.500 et 2.000 jeunes Européens avaient rejoint les rangs d’organisations proches d’al-Qaïda en Syrie. Six mois plus tôt, ils étaient évalués à 600.

"Au-delà du sort des hommes et des mineurs qui se rendent en Syrie, le danger pour nos propres intérêts, c’est le retour. Ces individus marquent leur volonté de combattre au sein d’organisations jihadistes. Le retour est particulièrement délicat", a déclaré dimanche M. Valls.

Mercredi, la Commission européenne a présenté dix recommandations pour renforcer la lutte contre la radicalisation et le recrutement par les organisations extrémistes en Europe.

"Aucun pays n’est épargné", a affirmé la commissaire responsable des Affaires intérieures, Cecilia Malmström, qui souhaite engager le débat dès la semaine prochaine à l’occasion d’une réunion des ministres européens de l’Intérieur le 24 janvier à Athènes.

Mme Malmström recommande notamment une coopération plus étroite avec la société civile et le secteur privé pour "lutter contre la propagande en ligne". Elle préconise la préparation de contre-discours face à la rhétorique extrémiste, des actions dans les écoles et un soutien aux repentis et aux familles dont, a-t-elle estimé, la parole peut être un "puissant outil de prévention et de déradicalisation".

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