Kévin Chassin, jihadiste français et kamikaze de l’EI

Kévin Chassin, alias Abou Maryam al-Firansi, s’est fait exploser dans une opération kamikaze en Irak, vendredi. Portrait de ce jeune Toulousain, converti à l’islam le plus radical, qui a rejoint Daech en mai 2013.

C’est par téléphone, de la bouche d’un jihadiste, que le petit frère de Kévin Chassin a appris la mort de son aîné dans un attentat-suicide en Irak, la veille. Il avait 25 ans. Une heure avant de se faire exploser contre une garnison de l’armée irakienne, près de la ville de Haditha, Kévin avait envoyé un dernier texto à son frère : "Je t’aime, bisous."

Un message d’une candeur déconcertante de la part d’un jeune homme qui rêvait d’avoir "la chance d’égorger quelqu’un". Kévin n’était pas un combattant de l’ombre, contrairement à tant d’autres dans les rangs de l’organisation de l’État islamique (EI). Ce jeune jihadiste français faisait partie de ceux que l’on expose devant les caméras de la secte. C’était un communiquant. En novembre 2014, il était apparu sur une vidéo de propagande de l’organisation où il exhortait les musulmans de France au jihad. On le voit ensuite jeter des passeports français au feu.

Très actif sur les réseaux sociaux, il avait également appelé à commettre des attentats sur le sol français. Un sol où réside pourtant son petit frère – qu’il adore. "On se parlait plus qu’avant, raconte Brice à l’AFP, il me racontait tout, comme s’il était en voyage, mais sans rien dire de concret de ce qu’il préparait." Les messages qu’ils s’envoient se comptent effectivement par centaines, ils étaient quotidiens et décrivaient autant l’horreur absolue des combats que la "douceur" du nouveau foyer familial que Kévin s’était reconstitué là-bas avec femmes et enfants.

Sur le compte Twitter du jeune homme, les photos de têtes décapitées côtoient en effet celles de ses enfants. "Il était allé au marché, en Syrie, et avait vu deux corps décapités par terre. Il voulait faire un foot avec une tête. À la place, il avait fait une photo…", raconte Brice. Sur une autre, il s’était fait photographier devant un hôtel de luxe. "Là, il pose devant la piscine du palace de Mossoul où l’EI lui aurait payé 10 jours de vacances" avant l’attentat fatal, confie encore son petit frère en faisant défiler des photos.

Comme la grande majorité des jihadistes, Kévin a connu un parcours affectif et social un peu chaotique entre séjours en famille d’accueil et petite délinquance. "Avant de partir en Syrie, il a dit qu’il avait toujours été rabaissé, séparé de ses frères, mal aimé et que la religion l’avait sauvé", confie Brice. Kevin venait d’une famille "100 % française" et de tradition catholique.

Son père est cuisinier, sa mère femme de ménage. Il a grandi à Toulouse, dans le quartier des Minimes. Pas très intéressé par les études, le jeune garçon préfèrait traîner dans la cité de Bourbaki ou à la Reynerie, deux quartiers répertoriés "sensibles" de la Ville rose.

Influençable et paumé, il est rapidement tombé sous la coupe de mauvaises fréquentations. "[Il était] perdu, tout le temps. Trop faible d’esprit. Si on lui disait ‘les chiens, c’est bien’, il achetait un chien, ‘le rap, c’est bien’, il se mettait au rap, ‘l’islam, c’est bien’, il se convertissait…" En 2009, il devient musulman et fréquente assidûment les mosquées toulousaines.

Dans ses messages, Kevin racontait y mener une vie heureuse. "Il me disait qu’il vivait une vie de rêve, qu’il avait une maison qui, en France, coûterait plus d’un million d’euros, qu’il avait des voitures, des motos…", ajoute Brice sur BFMTV. Selon plusieurs sources, il aurait également eu un second enfant avec une femme différente.

Il y a deux mois, le jeune Toulousain était parti en Irak. Brice sentait qu’il se passait quelque chose. "Il disait qu’il avait un projet en cours mais que ça ne servait à rien de lui poser des questions. Il répondait toujours : ‘je ne peux pas t’en parler’", raconte-t-il à "La Dépêche".

Kevin s’est fait exploser vendredi. Une réalité que son petit-frère peine encore à concevoir. "Je réaliserai qu’il est mort quand il ne répondra plus [à mes messages]", a-t-il confié, en regardant la dernière photo qu’il a reçue d’Abou Maryam al-Firansi : celle d’un jeune homme, tout sourire, le doigt pointé vers le ciel, devant un camion bourré d’explosifs.

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