Irak, Europe… Quand le prince Charles se mêle de tout

La publication de la correspondance secrète entre le prince Charles et le gouvernement Blair confirme que le futur roi est bien loin du mutisme de sa mère.

La divulgation, le 13 mai en début de soirée, de la correspondance secrète entre le prince Charles et le gouvernement travailliste de Tony Blair entre 2004 et 2005 embarrasse la Couronne. Les vingt-sept documents soulignent les pressions politiques exercées par l’héritier au trône, censé être au-dessus de la mêlée partisane, sur les dossiers qui lui sont chers.

Les missives concernent les sujets les plus divers, de l’agriculture ou l’élevage bio à la régénération urbaine en passant par les médecines douces ou la pêche intensive. Il est question de protection d’une espèce de poisson en Patagonie, du sort des albatros ou des blaireaux, d’élevage des boeufs ou du régime alimentaire d’une école située près de sa résidence de campagne d’Highgrove. Mais à plus d’une occasion, le futur Charles III s’aventure dans la sphère politique, comme l’attestent plusieurs lettres sur la réforme de la politique agricole commune ou le budget de la défense à l’issue de la guerre en Irak de 2003.

En particulier, Son Altesse royale s’inquiète à propos du conflit en Irak de "la tâche difficile de soldats qui ne disposent pas des équipements nécessaires". Sur le sujet sensible des relations avec l’Europe, le prince Charles dénonce l’interdiction par Bruxelles d’une centaine de suppléments naturels, "cela revient à utiliser un marteau de forgeron pour casser une noix". Il s’en prend également la domination des supermarchés qui poussent à la faillite de nombreux agriculteurs bio.

Les révélations du contenu des lettres n’ont guère surpris les observateurs royaux habitués aux foucades de celui qui aime jouer au provocateur. N’avait-il pas déclaré un jour : "J’aime jeter un pavé dans la mare et observer les remous avec l’espoir qu’il en sortira quelque chose de positif." "Le prince de Galles se soucie profondément de son pays et s’efforce d’utiliser sa position unique pour apporter son aide aux autres… pour le meilleur du pays et du monde", a déclaré Clarence House.

"Idéologue"

Précaution inutile, car ces documents n’ont fait que relancer la polémique sur l’intervention du prince dans la vie politique en contraste avec la neutralité absolue observée par sa mère en plus de soixante ans de règne. Ainsi, rien n’a jamais filtré du tête-à-tête hebdomadaire du souverain avec son Premier ministre. "Le prince Charles est un idéologue qui croit passionnément dans les causes qui lui sont chères. Il est incapable d’imiter le mutisme de sa mère", souligne Catherine Meyer, auteur d’une récente biographie non autorisée du prince de Galles. À l’écouter, ces documents "dans lesquels il n’y a rien de très nouveau" feront surtout l’affaire des historiens du règne.

"Vous me demandez de mettre par écrit mes remarques, mais que se passera-t-il à l’heure de la loi sur la liberté de l’information ?" : dans une lettre à Tony Blair, le prince s’inquiète de manière prémonitoire du risque de future publication de ses interventions à la lumière du Freedom of Intervention Act promulgué en 2000 par le gouvernement travailliste. Invoquant cette législation, le quotidien de centre gauche, The Guardian, a milité pendant dix ans pour avoir accès à cette correspondance privée. La Cour suprême du royaume a donné raison le 26 mars à ce quotidien ouvertement républicain.

Pour protéger la Couronne, le nouveau gouvernement conservateur de David Cameron envisage d’exonérer la reine, le prince de Galles et le duc de Cambridge de la loi sur la liberté de l’information.

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