Génocide arménien: manifestation de Turcs devant l’Assemblée nationale

Génocide arménien: manifestation de Turcs devant l’Assemblée nationale
Ils sont venus en bus de toute la France. Environ 4.000 manifestants, pour beaucoup d’origine turque, se sont rassemblés dans le calme jeudi matin devant l’Assemblée nationale pour protester contre la proposition de loi pénalisant la négation du génocide arménien. Répondant à l‘appel d’associations franco-turques, les manifestants étaient entourés de doubles barrières. Un important dispositif de CRS bloquait également tous les accès à l’Assemblée nationale. Aucun incident n’a été rapporté dans l’immédiat.

Drapeaux français et turcs en main, les manifestants brandissaient des pancartes disant "l’histoire ne doit pas servir la politique", "le débat historique n’est pas le débat politique", ou encore "la pêche aux voix ne doit pas se faire sur l’histoire d’un pays". Sébastien Bekar, 44 ans, venu de Dreux pour manifester, juge la loi "stupide". "A partir de maintenant, on va faire du bruit", a-t-il prévenu.

Un Français d’origine turque, Yildiz Hamza, a expliqué ne pas comprendre "pourquoi la France censurerait [sa] liberté d’expression". Pour une autre Française d’origine turque, juger de la vérité historique, "c’est le travail des historiens, pas des politiciens". Comme certains observateurs turcs, elle estime que "la majorité veut récupérer le vote des Arméniens juste avant les élections".

Pendant ce temps, les députés ont entamé leur examen de la proposition de loi de Valérie Boyer. Le député UMP Louis Giscard d’Estaing, qui préside la séance, a appelé au calme, souhaitant que "les débats se déroulent dans la sérénité".

Pour les Turcs, tout est une question de calendrier électoral et Nicolas Sarkozy cherche avec ce texte à s’assurer le vote des quelque 500.000 Français d’origine arménienne. En 2001, la loi sur la reconnaissance du génocide avait été adoptée, peu avant l’élection présidentielle. Et en 2006, une première loi visant à pénaliser la négation de ce génocide avait été présentée, mais jamais adoptée.

Cette proposition de loi a en outre été rédigée par Valérie Boyer, députée UMP de Marseille, la ville de France qui compte la plus forte communauté arménienne avec 80.000 personnes selon L’Express. Quant à François Hollande, candidat socialiste à la présidentielle, il s’est engouffré dans la brèche en s’empressant de rappeler qu’il avait "déjà fait voter" une proposition de loi sur le génocide arménien et se demandant pourquoi son texte n’est pas repris.

Pour Robert Badinter, avocat et ancien ministre de la justice, "on ne peut pas nier le calendrier". "Pas la peine de se dissimuler la vérité : ce n’est pas une soudaine passion pour purifier l’Histoire qui entraîne le législateur dans cette direction", a-t-il affirmé sur Europe 1, appelant le Parlement à dire "non" à cette proposition de loi et ajoutant : "Laissons l’Histoire aux historiens".

Mais même à l’UMP, le texte ne fait pas l’unanimité. Bernard Debré, député UMP de Paris, qui juge la proposition "inutile", a ainsi admis qu’il y avait une "compétition entre la droite et la gauche pour savoir qui va récupérer les voix des Arméniens".

Quant à François Bayrou, président du MoDem, il a assuré sur Europe 1 savoir "très bien pourquoi" cette loi est présentée : "on le fait pour faire plaisir à des communautés, des groupes qui électoralement ont du poids". "Mais les responsables de l’Etat ne devraient pas se déterminer que pour des raisons électoralistes et ceux qui savent ce qu’est l’Histoire ne devraient pas la trancher par la loi", a-t-il conclu.

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