François Hollande joue son va-tout à mi-mandat pour sauver sa présidence

En panne de résultats économiques, sa vie privée déballée, son gouvernement contesté, François Hollande joue son va-tout à mi-mandat pour sauver son quinquennat et s’imposer en réformateur d’une France qui lui voue un désamour jamais vu.

Elu en mai 2012, le président socialiste aborde ce jeudi une conférence de presse semestrielle dans les pires conditions d’impopularité. A tel point que l’hypothèse d’une candidature à sa réélection en 2017 est désormais massivement rejetée par les Français, avec seulement 13% d’opinions favorables, selon un sondage publié mercredi.

"Un retour en grâce, je n’y crois pas beaucoup", résume Pascal Perrineau, professeur à l’Institut d’études politiques de Paris, pour qui M. Hollande souffre d’un "gros problème pour être entendu". "La séquence dramatique qu’il vient de traverser montre que le problème n’est pas un problème de capacité politique, de capacité économique mais aussi de capacité personnelle: on a un doute sur la personne. C’est difficile de rectifier cela", souligne-t-il.

"A court terme, je ne vois pas ce qui peut le faire remonter", confirme Frédéric Dabi, de l’Institut de sondages Ifop.

Les crises internationales, notamment l’engagement militaire français en Irak où il s’est rendu la semaine passée avant d’accueillir lundi à Paris une conférence internationale sur la lutte contre les jihadistes de l’Etat islamique (EI), peuvent offrir à François Hollande un moyen de "représidentialiser" son image devant les médias jeudi.

"Il est bien noté sur l’international", relève M. Dabi. "C’est là que le bilan est le moins négatif, c’est là qu’il a une primauté mais il ne faut pas qu’il se contente de ce terrain-là", estime M. Perrineau, pour qui "l’ampleur de la crise économique est telle" que le chef de l’Etat doit aussi livrer sur ce front un "discours de la méthode".

"On pourrait imaginer un président qui prenne de la hauteur, qui laisse le Premier ministre aller au charbon pour les deux ans qui viennent et, de son côté, ouvre des perspectives à long terme", ajoute-t-il.

– ‘Aller jusqu’au bout’ –

Sur le constat, les politologues sont unanimes: M. Hollande traverse depuis l’été une "séquence désastreuse", digne d’une "descente aux enfers".

Il a dû remanier fin août le gouvernement du Premier ministre Manuel Valls, forcé par la rébellion de plusieurs ministres contre sa ligne réformiste, puis évincer un promu de la nouvelle équipe qui avait omis de payer ses impôts.

Attisant un climat délétère, la sortie fracassante début septembre d’un livre-brûlot de son ex-compagne, Valérie Trierweiler, a touché de plein fouet le chef de l’Etat, décrit comme méprisant les pauvres, ce qu’il a dû démentir.

La panne de l’économie, sur fond de chômage record à plus de 10%, l’a contraint à repousser de deux ans, à 2017, le retour du déficit public français sous le plafond européen de 3% du PIB.

Le jugement mercredi d’Emmanuel Macron, son ancien conseiller économique, devenu fin août son ministre de l’Economie, est sans appel: la France est un pays "malade". "Il n’y a pas d’autre choix qu’avancer, agir pour réformer l’économie", a-t-il affirmé.

Pour couronner le tout, Manuel Valls n’a obtenu mardi qu’une majorité étriquée au Parlement. Une trentaine de députés de l’aile gauche du Parti socialiste se sont abstenus de lui voter la confiance.

Mercredi, le ton restait à l’optimisme au sommet de l’Etat. Après un remaniement qui a permis de "clarifier la ligne", "le temps est maintenant donné pour changer les choses", a estimé devant ses ministres François Hollande, cité par le porte-parole du gouvernement, Stéphane Le Foll.

Eddy Fougier, chercheur associé à l’Institut des relations internationales et stratégiques (Iris), y voit une volonté du président "d’aller jusqu’au bout avec l’espoir que ça finisse par payer" et dresse le parallèle avec Gerhard Schröder.

L’ancien chancelier social-démocrate allemand "a mis en place de grandes réformes (fiscalité, retraite…) au risque de perdre les élections, qu’il a d’ailleurs perdues. L’idée était plus de laisser une trace dans l’Histoire que de gagner les élections. C’est plus de ce côté qu’Hollande va se positionner", prédit le politologue.

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