François Hollande joue au faucon et à la colombe

Ce n’est pas forcément une évidence politique, mais elle saute aux yeux. Le président français François Hollande a deux visages, deux tonalités, deux postures que la dernière crise des attentats a, sinon révélé, du moins accentué. Le premier est celui qu’il offre à l’intérieur, rond, contraint, ne voulant choquer personne, adepte du consensus que certains jugent mou, allergique aux ruptures politiques, subissant celles, plus personnelles, au lieu parfois de les initier. D’où cette volonté de ne pas déranger l’ordre établi, quitte à renoncer à certains de ses plus flamboyantes promesses électorales. Des coups de menton d’une autorité feinte ont fait parfois irruption, comme la volonté d’imposer ce fameux « pacte de responsabilité », mais sa religion du compromis reprend vite le dessus.

Par Mustapha Tossa

Cette attitude a une facture qui se paie cash. Une résistante impopularité qui montre à la fois un désamour froid doublé d’un immense discrédit de sa gouvernance et des ambitions de son mandat. Ce Hollande là, est victime désignée pour la satire politique qui moque allègrement son indécision et croque avec délice les rondeurs de ses formes et de ses actions.

François Hollande est si "colombe" à l’intérieur que par une sorte de division de travail, à la fois calculée et naturelle, il laissa à son Premier ministre Manuel Valls et à celui de l’intérieur Bernard Cazeneuve le soin d’accélérer sur la riposte sécuritaire pour traiter les dangers du radicalisme, tandis que lui préfère naviguer dans des eaux plus consensuelles, à la limite de l’œcuménisme. Sa prestation à l’institut du Monde arabe et ses messages enjolivés qu’il adressa à ses compatriotes musulmans et au monde arabe en sont la parfaite illustration.

Le second visage de François Hollande est celui qu’il offre dès qu’il est question de présence à l’international. C’est sous son impulsion que deux guerres françaises sont menées en Afrique. La première lorsqu’il s’agissait d’empêcher des hordes radicales de s’emparer du pouvoir à Bamako. La seconde lors de l’intervention en Centrafrique. Sur la Libye, la France de François Hollande est celle qui fait le diagnostic sécuritaire le plus alarmant et mobilise pour préparer les conditions d’une éventuelle intervention militaire internationale dans ce qui est devenu un grand "Hub" pour les organisations terroristes.

Cette attitude volontariste, déterminée, s’était déjà illustrée dans la crise syrienne. François Hollande était un des rares chefs d’Etat occidentaux à militer ouvertement pour une intervention militaire contre le régime de Bachar El Assad. Aujourd’hui, alors que la France est frappée par le terrorisme, il ne rate aucune tribune pour regretter la décision des Américains de reculer à la dernière minute. Selon Hollande, le cauchemar terroriste qui pèse sur l’Europe et le monde trouve ses racines, entre autres, dans ce recul et cette indécision.

Aujourd’hui sa perception de la crise syrienne peut avoir un effet mobilisateur pour les uns mais décourageant pour beaucoup. Il veut expurger la région d’organisations terroristes comme Daesh ou Al Qaida mais aussi débarrasser le monde du régime de Bachar Assad accusé d’avoir gazé sa population et d’avoir créé les conditions qui ont favorisé des organisations terroristes comme l’Etat Islamique.

Même sur la crise du nucléaire iranien, tandis que Washington montrait une disponibilité à conclure un accord, même imparfait, avec les autorités de Téhéran, c’est la France de François Hollande et de Laurent Fabius qui a mis un coup de frein à ces retrouvailles enthousiastes entre iraniens et américains.

Sans doute, face à un Barack Obama qui privilégie le dialogue politique à la confrontation armée, face à une Europe paralysée par ses instituions, face à une Chine préoccupée d’avantage par son commerce, François Hollande a voulu incarner le rôle de faucon, chef de guerre, dans cette longue et terrible guerre contre le terrorisme.

Ironie de l’histoire, c’est cette démarche à l’international qui lui a procuré ses habits de président de la république en "national". De là à dire qu’il peut réussir à la guerre ce qu’il a raté en économie, il n’y qu’un pas que certains sont prêts à franchir avec une dextérité de circonstances.

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