François Fillon mis en examen pour détournement de fonds publics et recel d’abus de biens sociaux

Le candidat a refusé de répondre aux juges d’instruction. Il s’est contenté d’une déclaration rappelant notamment la « séparation des pouvoirs ».

Il avait annoncé qu’il était convoqué chez les juges d’instruction mercredi 15 mars. Avec 24 heures d’avance sur la date prévue, François Fillon a finalement été mis en examen mardi, notamment pour détournement de fonds publics et recel d’abus de biens sociaux, dans l’enquête sur les soupçons d’emplois fictifs de son épouse et de ses enfants comme assistants parlementaires, a annoncé à l’Agence France-Presse son avocat. « La mise en examen est intervenue ce [mardi] matin. L’audition a été avancée pour qu’elle se déroule dans des conditions de sérénité », a ajouté Me Antonin Lévy, qui n’a pas fait d’autre commentaire. Une source judiciaire a confirmé la mise en examen à l’Agence France-Presse.

François Fillon a été mis en examen notamment pour « détournement de fonds publics », « recel et complicité d’abus de biens sociaux » et « manquement aux obligations déclaratives à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique », a confirmé à l’Agence France-Presse une source judiciaire. François Fillon est le premier candidat majeur à une élection présidentielle à concourir avec le poids d’une mise en examen sur les épaules. Le Canard enchaîné avait révélé fin janvier que l’épouse de François Fillon avait été son assistante parlementaire rémunérée pendant des années, une fonction que le couple n’avait jamais affichée. Entre 1986 et 2013, auprès de François Fillon ou de son suppléant Marc Joulaud (2002-2007), Penelope Fillon a perçu 680 380 euros net, soit environ 3 600 euros mensuels net.

Pas de réponses mais une déclaration

Lors de son audition, François Fillon a refusé de répondre aux questions des juges d’instruction et a redit, dans une déclaration, que l’emploi de sa femme Penelope comme assistante parlementaire n’était « pas fictif », tout comme à Revue des deux mondes. « L’emploi de mon épouse comme collaboratrice parlementaire n’était pas fictif et il n’appartient pas à l’autorité judiciaire de porter une appréciation sur la qualité ou la teneur de ce travail », a expliqué l’ex-Premier ministre et député Les Républicains de Paris dans cette déclaration, révélée par Le Figaro et dont le contenu a été confirmé à l’Agence France-Presse par l’entourage du candidat. Le candidat de la droite à la présidentielle n’a demandé aux juges qui l’ont mis en examen « ni faveur ni dérogation, mais simplement le respect du droit ». S’appuyant sur « la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen », il a estimé qu’« il n’est pas possible, sans violer [le principe de] séparation des pouvoirs, de porter un jugement sur le travail d’un parlementaire et la manière dont celui-ci s’organise avec ses collaborateurs parlementaires », une thèse déjà avancée par ses avocats.

François Fillon a souligné que le président de l’Assemblée lui-même, Claude Bartolone (PS), a « refusé de répondre » le 13 février aux enquêteurs « sur les niveaux de rémunération des collaborateurs parlementaires bénéficiant d’un lien familial avec un élu », au nom du « principe de séparation des pouvoirs ». « J’attends d’être traité comme tous les citoyens de notre pays, sans précipitation et avec le seul souci que la justice soit rendue en toute impartialité », a-t-il martelé, justifiant son choix de faire une déclaration par le « calendrier » de la procédure judiciaire, « en plein cœur de la campagne présidentielle ». Aux juges d’instruction il a aussi dit s’inquiéter qu’ils n’aient « pas pris connaissance de deux notes sur les faits et sur le droit applicable que [son] avocat avait déposées auprès du procureur national financier et que celui-ci ne [leur] a pas transmises ».

Rétrocession des salaires des enfants

Cette annonce intervient alors que Le Parisien révèle que les deux enfants de l’ex-Premier ministre, employés tous deux comme assistants parlementaires de 2005 à 2007, quand il était sénateur, ont rétrocédé une partie de leurs salaires à leurs parents. Ainsi, sur les 46 000 euros net touchés par sa fille Marie, d’octobre 2005 à décembre 2006, environ 33 000 sont repartis sur le compte joint des parents, affirme le quotidien. L’avocat de Marie Fillon, Kiril Bougartchev, a confirmé ces chiffres, indiquant que la fille du candidat de la droite à la présidentielle avait souhaité « payer son mariage, mi-2006 », et que pour cela « elle a remboursé ses parents » qui avaient avancé les sommes. « Elle fait ce qu’elle veut de l’argent qu’elle gagne ! Si elle veut rembourser ses parents, c’est son choix. Elle l’a dit spontanément aux enquêteurs » de l’Office central de lutte contre la corruption et les infractions financières (Oclciff) de la police judiciaire, qui l’ont entendue le 9 février, a-t-il affirmé. Selon lui, le couple Fillon a pu retrouver, « dix ans après », 14 factures de ce mariage pour une somme de 44 000 euros.

Selon l’avocat, les salaires touchés par Marie Fillon, alors élève avocate, étaient justifiés. « Elle a mené des recherches sur plusieurs thématiques pour son père, sur des sujets institutionnels, européens et sur des questions de société, notamment en vue de la sortie de son livre en 2006 », a-t-il expliqué, évoquant « plusieurs notes attestant ce travail » et « dix journées » de présence à la bibliothèque du Sénat pendant les quatre premiers mois de sa mission. Le Parisien affirme également que Charles Fillon, employé comme assistant parlementaire de janvier à juin 2007, pour 4 846 euros brut mensuel, a « évoqué des virements mensuels pour un pourcentage moindre, de l’ordre de 30 % environ de son salaire net ». Là encore, il s’agirait de remboursements de son « loyer » et de son « argent de poche », selon l’avocat de François Fillon, Antonin Lévy, cité par le quotidien.

Avec AFP

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