Face aux islamistes au pouvoir, l’opposition tunisienne mobilise la rue

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L’opposition tunisienne a revendiqué mardi soir des dizaines de milliers de manifestants à Tunis, maintenant la pression sur les islamistes au pouvoir dont elle réclame la démission depuis l’assassinat d’un opposant fin juillet qui a provoqué une profonde crise politique.

Les détracteurs du parti islamiste Ennahda qui dirige le gouvernement avait fait de cette manifestation mardi, à l’occasion de la journée de la femme, un test pour sa capacité à mobiliser, les fêtes de fin du ramadan la semaine dernière ayant porté un coup à la contestation.

Les opposants ont revendiqué des dizaines de milliers de participants, alors qu’un rassemblement rival, organisé par les islamistes, n’a réuni que quelques centaines de personnes dans l’après-midi à Tunis.

Le choix du 13 août est symbolique, cette date marquant l’adoption en 1956 d’une législation accordant aux femmes des droits sans pareil dans le monde arabe. Les islamistes d’Ennahda sont sans cesse accusés de vouloir revenir sur ces acquis.

Les slogans repris par la foule prônait dès lors les droits de la femme et dénonçaient Ennahda, tel "La Tunisienne est libre, les frères musulmans dehors" ou encore "la Tunisienne est musulmane mais pas islamiste".

Le rassemblement avait lieu face à l’Assemblée nationale constituante (ANC), centre de la contestation depuis l’assassinat du député Mohamed Brahmi le 25 juillet, attribué à la mouvance salafiste. Il s’est achevé sans incident vers 21H00 GMT (22H00 local) .

"Notre joie ne sera complète qu’avec le départ de ce gouvernement et de l’ANC et la femme tunisienne sera au premier rang du militantisme", a lancé, devant les manifestants, Besma Khalfaoui, veuve d’un autre opposant assassiné en février, Chokri Belaïd.

Le Front de salut national, une coalition d’opposants allant de l’extrême gauche au centre droit, a pour sa part annoncé dans un communiqué le début d’une campagne "Dégage", slogan phare de la révolution de janvier 2011, visant les responsables régionaux nommés par Ennahda.

Cette coalition prépare aussi "une mobilisation générale pour la semaine du départ (du gouvernement) à partir du le 24 août", sans plus de précisions.

Elle réclame encore et toujours la dissolution de la Constituante et un gouvernement composé d’indépendants.

Ennahda a rejeté ces revendications, proposant en retour d’élargir son gouvernement à tous les partis. Les islamistes insistent sur sa légitimité issue de la Constituante élue en octobre 2011 mais dont les travaux ont pris près d’un an de retard faute de consensus sur la Constitution.

Le président Moncef Marzouki, un laïc allié des islamistes, a pour sa part exprimé une position très proche de celle d’Ennahda.

"Il faut qu’il y ait un gouvernement d’union nationale où tous les partis politiques seront représentés dans la prise de décision", a déclaré le président, dont les fonctions sont essentiellement honorifiques.

Il a aussi réclamé la reprise des travaux de l’ANC, gelés depuis une semaine par son président qui espère ainsi forcer les deux camps à négocier, sous l’égide du puissant syndicat UGTT. De premiers pourparlers entre Ennahda et la centrale syndicale n’ont conduit lundi soir à aucune avancée.

"Nous espérons que la situation se clarifie à la fin de la semaine et qu’on arrivera à des solutions consensuelles", a estimé le Premier ministre Ali Larayedh.

Sa position est cependant fragilisée par l’UGTT, forte de 500.000 membres, et le patronat Utica qui sont pour la mise en place d’un gouvernement de technocrates tout en étant favorable au maintien de l’ANC.

L’équipe gouvernementale actuelle est accusée d’avoir failli sur le plan sécuritaire, l’essor de la mouvance salafiste déstabilisant régulièrement le pays depuis la révolution de janvier 2011. Un premier cabinet dirigé par Ennahda avait déjà dû démissionner après l’assassinat de Chokri Belaïd.

Par ailleurs, quatre jours après l’assassinat du député Brahmi, un groupe suspecté de liens avec Al-Qaïda et pourchassé par l’armée depuis décembre avait sauvagement tué huit militaires au mont Chaambi à la frontière algérienne.

Cette embuscade a déclenché une vaste opération "aérienne et terrestre" mais les autorités n’ont dressé aucun bilan après près de deux semaines de manoeuvres et de bombardements.

L’économie tunisienne, minée par les crises à répétition, peine à se relever depuis la révolution alors que la misère et le chômage avaient été au coeur de cette révolte.

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