Et voilà que Nicolas Sarkozy prend exemple sur… Donald Trump !

Malgré un mauvais bilan politique et des sondages où il continue à dévisser à droite, l’ex-président affirme que sa stratégie est la bonne, une certitude acquise en s’inspirant de… Donald Trump !

En janvier, il a su profiter de la sortie de son livre, de bonnes ventes durant les premiers jours avant qu’elles ne décroissent forte vite au point d’être reléguées loin, très loin, derrière celles de Christiane Taubira – un affront ! – et, conséquemment, d’une intense présence médiatique. Nicolas Sarkozy avait donc repris 4 points dans le baromètre Elabe/Les Échos/Radio Classique. Un frémissement cohérent à la hausse. Cette étude mensuelle mesure notamment le niveau de "bonnes opinions" des responsables politiques de droite et du centre chez les sympathisants de droite et du centre. Las, l’étude de février est à nouveau exécrable pour le président de LR (Les Républicains) : il perd 8 points, relégué 34 points (!) derrière Alain Juppé : 76 contre 42. Remarquons que, l’un et l’autre candidats à la primaire de la droite en novembre prochain, François Fillon (57 %) et Bruno Le Maire (53%) devancent eux aussi Sarkozy, lequel a reculé de 19 points depuis un an et de 27 depuis son accession à la tête du parti – l’UMP d’abord puis LR.

Un mauvais bilan politique. De sombres perspectives électorales. Mais l’ex-président fait mine de n’en tenir aucun compte. Il préfère dénoncer un complot, une opération d’intoxication conduite par les "élites", et ses bras armés, les instituts de sondage et les médias, qui défendent "leur" candidat (Alain Juppé) et utilisent tous les moyens pour détruire le "champion du peuple" – comprendre Sarkozy…

Une démagogie populiste à l’encontre des valeurs de la droite modérée

Sûr de lui et de sa stratégie, le chef de LR certifie à qui veut l’écouter et, mieux encore, l’entendre, que sa stratégie s’avérera in fine la bonne, qu’en novembre prochain, il balayera tous et tout, en particulier Juppé que les sarkozystes, désormais, surnomment "JUPPÉPÉ". La classe… Cette certitude, Sarkozy l’a acquise en observant au plus près… Donald Trump, le nouveau modèle, la référence de l’heure, sans cesse cité et encensé. Il s’en est d’ailleurs expliqué cette semaine devant les membres de la Commission exécutive de LR, propos rapportés dans Le Monde : "Regardez ce que donnent aux États-Unis les candidats soutenus par l’establishment et les médias, ils sont balayés par les candidats du peuple. Trump, c’est un avant goût de ce qui se passera en France".

L’establishment, les médias, les sondages manipulés, les candidats des élites contre celui du peuple…. La musique aigre de la démagogie populiste. Il faut d’ailleurs écouter : les mots choisis par Nicolas Sarkozy sont très précisément ceux qu’utilise l’extrême droite ; sa dialectique est désormais calquée sur celle du Front National ; il ose sans la moindre vergogne ce que Marine Le Pen, en quête d’honorabilité, s’interdit. Par exemple se référer à Donald Trump sans même évoquer les horreurs racistes, homophobes, anti immigrés dont il est coutumier ; sans faire remarquer qu’il piétine et détruit les valeurs humanistes de la démocratie américaine ; sans prendre la moindre distance qui pourrait indiquer un tant soi peu de réprobation ne serait ce que morale. Rien, pas la moindre démarche qui pourrait rassurer les tenants de la droite modérée.

Un raisonnement ultra-droitier erroné

A l’inverse, Sarkozy a dépêché ses derniers chiens de garde pour claironner à la gloire de Trump. Brice Hortefeux s’est lâché le premier : "Trump montre qu’on ne gagne pas au centre avec une campagne aseptisée, mais en clivant". Ode au milliardaire américain pour dégommer… Juppé. De la toute petite politique… Il était donc inévitable que l’ultra droitier Laurent Wauquiez, numéro 2 de LR, enchaîne, amplifie, en rajoute : "Trump, c’est une source d’inspiration. Trump a une parole très directe et aborde des thèmes jusque-là "tabouisés". Les gens ne veulent plus d’un filet d’eau tiède, mais de politiques qui ont du caractère". Le racisme déclaré de Donald Trump, une preuve de "caractère" ? Le délire anti-mexicain, la fin nécessaire d’une réflexion "tabouisée" ? Les lieutenants de Nicolas Sarkozy sont-ils seulement conscients des énormités et, parfois, des insanités qu’ils profèrent ?

En 2012, sous l’influence de l’extrême droitier conseiller Patrick Buisson, le Président sortant avait échoué face à François Hollande en menant déjà une campagne ultra. Cette défaite ne lui a décidément rien enseigné ; le départ de Buisson ne l’a pas davantage libéré. Son cerveau politique demeure hémiplégique, tout entier tourné et concentré sur une dialectique ultra droitière. Il avait ainsi perdu il y a quatre ans. Qu’importe : Sarkozy réitère avec, probablement, les mêmes conséquences : la défaite, cette fois dès la primaire.

Cet entêtement laisse toutefois songeur. Pourquoi cette incapacité chronique à se recentrer alors que Nicolas Sarkozy n’a en réalité rien de commun avec l’extrême droite, que le racisme par exemple, celui de Trump comme celui du Front National, lui fait horreur, lui le "petit Français aux sangs mêlés" ainsi qu’il s’était jadis défini ? Parce que la quasi totalité de ses raisonnements politiques sont erronés ; qu’il est incapable de récupérer l’électorat de Marine Le Pen ; que celui de LR est bien plus modéré qu’il ne l’imagine ; que le "tout sauf Sarkozy" est plus puissant que jamais, y compris à droite… Que sa situation est donc périlleuse. Cela justifie-y-il pour autant que Nicolas Sarkozy se vautre et se déshonore en s’émerveillant des succès de Donald Trump ? Poser la question, c’est déjà y répondre.

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