Elie Al Aaraj, président du RANAA : « Il faut donner aux jeunes une éducation sexuelle dans nos écoles… »

Elie Al Aaraj, président du Regional Arab Network Against AIDS pense que l’éducation sexuelle doit faire partie du programme des écoles dans le monde arabe. Dans nos colonnes, il revient aussi sur l’accès aux services et sur la stigmatisation, des points stratégiques selon lui pour faire face aux IST/Sida.

Elie Al Aaraj, président du RANAA :
Combien de pays regroupe le Regional Arab Network Against Aids et quelle est sa raison d’être?

Il regroupe les réseaux nationaux de 22 pays arabes du Moyen Orient et d’Afrique du nord. Ce réseau a été fondé en 2002 lorsque, en tant que représentants de la société civile dans nos pays, nous avons vu que nous avions besoin de joindre nos efforts parce que le Sida n’a pas de frontières.

Ensemble, nous pouvons mieux travailler pour avoir une réponse adéquate à la pandémie, surtout que dans nos pays, nous avons beaucoup de points communs sur le plan de la culture et de la société. Nous avons donc voulu joindre nos efforts et essayer de renforcer les capacités des réseaux nationaux et des ONGs dans les pays afin de promouvoir des comportements sains et donc prévenir le Sida, mais aussi pour travailler sur le droit des personnes vivant avec le VIH.

Pour vous l’éducation sexuelle est un “point stratégique” dans la lutte contre les IST/Sida dans les pays arabes. Est-ce un manque actuellement?

J’ai mentionné trois points stratégiques qui sont l’éducation, la stigmatisation et les services. Quand on étudie l’éducation dans le domaine de la santé sexuelle et reproductive, on trouve facilement qu’il y a un grand manque voire, dans certains milieux, une absence quasi-totale d’éducation sexuelle pour les jeunes.

Dans certains pays, l’éducation sexuelle est considérée comme une promotion de l’activité sexuelle or ce n’est pas le cas. Il ne faut jamais nier l’activité sexuelle de nos jeunes et l’importance de leur donner l’information adéquate, en lien avec notre culture.

Vous insistez sur l’aspect éducation sexuelle au niveau local, pourtant les jeunes ont d’autres sources d’informations comme Internet, les chaînes satellitaires…?

Nos adolescents ont en effet plein de ressources telles qu’Internet, et les chaînes satellitaires qui ne sont pas forcément liées à notre culture. Alors pourquoi ne pas leur fournir l’éducation sexuelle dans nos écoles avec nos éducateurs, à la maison à travers les parents, et dans les lieux de culte: les mosquées, les églises?

Cette éducation sera d’autant plus importante pour eux qu’elle les rassurera parce qu’ils connaitront beaucoup mieux leur identité. Et c’est pour cela qu’on considère qu’il y a un manque dans l’éducation sexuelle de nos jeunes et que cela aboutit au fait que dans certains pays, la seule solution réside dans le mariage précoce: un mariage entre deux gamins qui ne connaissent presque rien sur leur propre corps, sur leur vie sexuelle, sur les responsabilités du mariage. A un certain moment, ces jeunes sont confrontés à des problèmes conjugaux tels que des relations sexuelles extra mariage.

Qu’en est-il de l’accès aux services et de la stigmatisation?

Les pays arabes connaissent actuellement un autre fait: des femmes et des hommes qui se marient à 30 ans et plus. Dans leur cas, ils ont forcément des relations sexuelles avant le mariage. Ce qui constitue un autre problème lié à la vulnérabilité aux IST /Sida.

Imaginez-vous, dans nos pays où la virginité est sacrée, comment une femme qui a eu une relation sexuelle avec un amant peut-elle aller demander un service? Si on la voit souvent chez un gynécologue, cela pose aussi un énorme problème.

Tout cela, cette absence d’éducation, de services, cette stigmatisation ne font qu’aggraver la vulnérabilité des femmes, des homosexuels, des travailleuses du sexe et des usagers de drogue, surtout par voie intraveineuse…

De plus, les personnes vivant avec le VIH sont rejetées parce que pour certaines sociétés, attraper le sida équivaut à une condamnation. Vous n’avez pas le droit d’avoir des relations sexuelles. Et ça, c’est un crime à mon avis. Il y a encore énormément de travail à ce niveau.

Kisito Ndour, hier

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