Ecartée du volet économique de la visite d’Erdogan au Maroc, le patronat marocain boude les opérateurs turcs

En moins d’un mois, le gouvernement, conduit par l’islamiste Abdelillah Benkirane, semble accumuler les crises. Lundi, il a ouvert un autre front avec la Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM, patronat), écartée la visite du Premier ministre turc au Maroc, Recep Tayyib Erdogan, au profit d' »Amal entreprises », un groupement d’hommes d’affaires proches du chef de gouvernement marocain et de son Parti de la Justice et du développement.

Ecartée du volet économique de la visite d
Alors que le premier ministre turc foulait le sol marocain, la CGEM a rendu public sa décision de boycotter cette visite à laquelle elle n’a été associée pour la « préparation » de son volet économique que très "tardivement".

La CGEM a donc refusé de cautionner ce qu’elle a appelé un "manque de rigueur dans la préparation" face au "géant turc".

La CGEM, un des poids lourds de l’économie nationale, a été écartée "au profit d’"Amal Entreprises", un groupement de taille très modeste proche des islamistes du PJD et du chef de gouvernement Abdelillah Benkirane.

Pour ce rendez-vous marocain, Erdogan, soucieux de mieux vendre le produit "made in turkia", a dépêché un vol spécial plein de 300 opérateurs et hommes d’affaires, alors que le gouvernement Benkirane a agi à « sa guise, à son rythme et à sa préférence », dénoncent des hommes d’affaires.

"Il est regrettable qu’un tel évènement n’ait pas été préparé avec la rigueur et la concertation nécessaire car l’accord de libre échange maroco-turc pose des problèmes", souligne-t-on à la CGEM.

Dans sa vive réaction, la CGEM souligne avoir été « sollicitée en renfort trois jours seulement avant la tenue des rencontres B to B, format que la Confédération estime ne pas convenir à une approche stratégique vis-à-vis d’un pays avec lequel le Maroc enregistre un déficit commercial aussi important ».

Ce n’est qu’à la fin de la journée que le chef du gouvernement Abdelillah Benkirane répondant aux questions de la presse a reconnu l’erreur de son gouvernement de n’avoir « pas associé » la CGEM dans la préparation du volet économique et commerciale de la visite.

Le chef du gouvernement a qualifié bien tardivement la CGEM de "partenaire essentiel" pour le gouvernement. "Elle a raison à 100% et nous allons œuvrer pour que cette erreur ne se reproduise plus", a dit M. Benkirane.
Que « l’improvisation » ne se reproduise plus, souligne-t-on dans les milieux d’affaires de Casablanca, Tanger, Agadir, Fès et Marrakech.

Le ministre de l’Industrie, Abdelkader Amara a estimé en coulisse que la « position de la confédération était souveraine » (boycott) et « nous aurions aimé qu’elle soit avec nous aujourd’hui ». "Ce qui compte, ce sont les investissements et l’intérêt du pays », a-t-il dit en essayant de minimiser ce grave couac, lourd de conséquences.

Lors de ses contacts avec Recep Tayyib Erdogan, le chef du gouvernement marocain a voulu se rattraper en insistant sur la "nécessité d’équilibrer la balance commerciale" au profit du Maroc.

Les échanges commerciaux entre le Maroc et la Turquie ont atteint en 2012 un total de quelques 14 milliards de dirhams dont 10 milliards pour les importations marocaines.

Pour cette période, le flux des investissements turcs au Maroc n’a pas dépassé la valeur modique de 32 millions de dirhams, selon des chiffres officiels.

Selon le ministre marocain de l’Industrie, la Turquie a compris qu’elle doit passer à une « vitesse supérieure dans ses investissements » au Maroc. A Rabat, la Turquie a promis de redoubler d’efforts pour acheter plus du Maroc afin de réduire l’écart du déficit marocain.

Au terme de la réunion mixte, les deux chefs de gouvernement ont présidé la signature de deux accords de coopération bilatérale, l’un portant sur la création d’un « Conseil de coopération stratégique » entre le Maroc et la Turquie et le deuxième relatif au transport maritime et terrestre.

A cette occasion, Recep Tayyib Erdogan s’est félicité de la visite que « prévoit effectuer le Roi Mohammed VI » en janvier 2014 à l’invitation de la Turquie.

"Nous saluons également les reformes accomplies par le Maroc sous l’impulsion de son souverain", a-t-il poursuivi.

A propos du Sahara, M. Erdogan a rappelé lors de la conférence de presse que la Turquie « ne reconnaît pas le polisario ». Il est même allé jusqu’à proposer sa médiation entre le Maroc et l’Algérie afin que ce problème soit « résolu entre les deux frères ».

"Nous ferons la même chose pour que les frontières terrestres s’ouvrent", a conclu le Premier ministre turc qui doit quitter mardi Rabat pour Alger, deuxième étape de sa tournée maghrébine qui le conduira également en Tunisie
Interrogé sur la Syrie, M. Erdogan a réitéré ses attaques contre le régime de Bechar El Assad. Il a qualifié de « génocide » les souffrances du peuple syrien, appelant la communauté internationale à ne pas rester les bras croisés devant ce douloureux drame qui aurait fait, a-t-il dit, « 100.000 morts sans parler des blessés ».

Le Premier ministre turc a enfin évoqué les manifestations d’Istanbul et d’Ankara que les forces de l’ordre ont violemment réprimées entre vendredi et dimanche derniers.

La responsabilité de ces émeutes est l’œuvre, a-t-il réitéré de "parties ayant perdu les scrutins électoraux". Selon lui, il s’agit d’"extrémistes (de gauche, ndlr) que les urnes en Turquie ont éliminés. La démocratie passe par les urnes », a-t-il conclu.

Laisser un commentaire

Votre adresse email ne sera pas publiée.

Ce site Web utilise des cookies pour améliorer votre expérience. Nous supposerons que vous êtes d'accord avec cela, mais vous pouvez vous désinscrire si vous le souhaitez. J'accepte Lire la suite