Dr Cherkaoui Roudani: la position américaine ferme sur le Sahara réaffirme son opposition à l’afghanisation de toute une région

La déclaration commune, diffusée hier par la Maison Blanche à l’issue de la rencontre au sommet du Roi Mohammed VI vec le Président américain Barack Obama, affirme clairement le soutien des Etats- Unis au plan d’autonomie proposé par le Maroc pour le Sahara, le qualifiant de « sérieux, réaliste et digne de foi ». Dr Cherkaoui Roudani, politologue et spécialiste des questions géostratégiques, décrypte pour Atlasinfo l’appui américain ferme à la proposition marocaine et invite l’Algérie à repenser sa manière de concevoir la région du Maghreb.

Quelle votre réaction à la déclaration de la Maison blanche affirmant son plein soutien au plan marocain d’autonomie pour le Sahara ?

C’est une déclaration qui réaffirme la position du Royaume du Maroc et son combat diplomatique légitime pour la consolidation de son intégrité territoriale et la défense de sa souveraineté nationale.
La déclaration en soi est une reconnaissance et un appui des Etats Unis aux efforts entrepris par le Maroc en matière de développement économique et de réformes démocratiques. Il ne faut pas aussi oublier que les adversaires, par des tentatives insidieuse, ont essayé d’instrumentaliser la question de droits de l’Homme pour nuire à l’image du Maroc en tentent d’acheter les voix et les prises de position de certaines organisations à la solde des ennemis de l’intégrité territoriale du Maroc. Cette déclaration est une réponse à ceux qui ne cessent de manigancer contre l’image du Maroc et sa souveraineté et un témoignage du respect et de la solidité des relations séculières et sempiternelles qu’entretiennent les deux pays.
Ce témoignage de la Maison Blanche sur la marocanité de Sahara a en fait réaffirme l’avis de la Cour de Justice de La Haye de 1975 qui a reconnu explicitement que le Sahara n’a jamais été une terre sans maître et atteste qu’entre le Sahara et le Royaume du Maroc existaient des liens juridiques et d’allégeances qui n’ont été altérés que par le colonisateur. De ce fait, le pragmatisme américain dans sa façon de voir les choses dans la région est clair à travers cette déclaration qui confirme les résolutions onusiennes qui ont insisté, je rappelle, sur le caractère réaliste et réalisable du projet d’autonomie des provinces du Sud, présenté par le Maroc pour solutionner ce différent artificiel. N’oublions pas que l’ancien envoyé spécial du Secrétaire Général des Nations unis Peter Van Walsum n’a pas hésité à maintes reprises de rappeler le caractère crédible de cette proposition, c’est le sens de la résolution du Conseil de Sécurité des Nations Unies 1754 et même 1920. La déclaration commune à l’issue de la rencontre de SM le Roi avec le Président Obama traduit la quintessence de la proposition marocaine, celle d’une approche potentielle qui peut satisfaire les aspirations des habitants du Sahara pour diriger leurs propres affaires dans la paix et la dignité. C’est le sens et l’essence de la récente lettre envoyée par les neuf anciens ambassadeurs à Rabat au président américain.

Quelles en seront les retombées sur ce dossier ?

En décortiquant le communiqué de la Maison Blanche, il est évident qu’il y a deux dimensions dans cette déclaration. C’est un appel qui évoque les dangers qu’encourt toute une région ainsi que les répercussions de la perpétuation de ce différend. La situation dans laquelle s’enfonce la région et la recrudescence des activités et des opérations terroristes dans la région du Sahel, l’Afrique subsaharienne et le Nord d’Afrique est une réalité. La crise du Nord du Mali ainsi que la situation sécuritaire désastreuse que connait la corne d’Afrique, l’Afrique de l’Ouest ainsi le Sahel est un secret Polichinelle. L’administration américain est consciente des enjeux géopolitiques et sécuritaires face au terrorisme qui s’installe dans la région. D’ailleurs, la situation est alarmante et nul ne peut la nier, Al Qaïda via son tentacule local « Al Qaïda aux pays du Maghreb » cherche par une stratégie bien ficelée de « somaliser » la région du Maghreb en essayant de récupérer plusieurs éléments de Polisario ainsi que les mercenaires qui ont combattus en Libye. Et puis, les opérations terroristes dans la région vont crescendo et cela inquiète réellement les observateurs internationaux qui voient dans l’intersection des intérêts des groupes terroristes avec les narcotrafiquants une sorte de connivence qui peut couter chère à la stabilité fragile de plusieurs pays de la région. De fait, dépasser l’impasse actuelle afférente au différend du Sahara marocain est devenu une urgence pour accélérer la restauration de la paix et sécuriser ainsi les frontières poreuses dont profite Al-Qaeda pour menacer la stabilité de toute une région.
La déclaration américaine va, sans aucun doute, amorcer un changement de référentiel chez certains à même de susciter davantage l’adhésion de la communauté internationale. N’oublions pas que le Maroc est aux yeux des Etats unis une plate forme incontournable et importante pour l’Afrique du Nord et l’Afrique sub-saharienne en termes de commerce et d’investissement, comme l’a bien souligné le communiqué conjoint qui a fait le point sur les entretiens entre les deux chefs d’Etat. C’est une déclaration qui en symbiose avec le dernier discours royal lors du 38eme anniversaire de la Marche Verts lorsque le souverain a insisté sur l’importance de donner un élan à l’économie africaine et en mettant les provinces du sud comme le moteur d’un partenariat stratégique avec les pays du Sahel et l’Afrique subsaharienne. Ceci dit, cette déclaration confirme la clairvoyance du Roi au sujet de l’Afrique et la dignité dont s’ambitionne l’Homme africain.

Doit-on s’attendre à une nouvelle offensive de la part d’Alger après le soutien sans équivoque de la Maison Blanche à la proposition marocaine pour régler la question du Sahara ?

La position américaine est un message clair et lucide qui traduit sa vision géopolitique dans la région du Nord d’Afrique et qui s’oppose à toute tentative de création d’un micro-Etat dans la région. La déclaration commune traduit aussi le soutien américain aux efforts sérieux et crédibles qui ont été faits par le Maroc pour aller de l’avant vers un règlement de ce conflit.
La paix dans la région entière et l’ambition de se retrouver ensemble, le Maroc et l’Algérie, dans une entité capable d’assumer ses responsabilités régionales et internationales en matière de développement et économique et humain, sont une nécessité à l’ère de la mondialisation. La positon américaine et celles de plusieurs pays, à l’image du Panama qui vient de suspendre sa reconnaissance du Polisario, devront être une occasion pour qu’Alger repense sa manière de concevoir la région du Maghreb.

La visite royale aux Etas-Unis a-t-elle insufflé une nouvelle dynamique aux relations stratégiques entre Rabat et Washington ?

Le Maroc, c’est le centre de gravité d’un triangle stratégiquement important à savoir l’Afrique, l’Europe et le Moyen- Orient. Les Etats Unis d’Amérique sont conscients de cette situation ainsi que de l’attractivité économique du pays. D’ailleurs Obama a reconnu le leadership de SM le Roi dans la consolidation de la démocratie et la promotion du progrès économique. La manière avec laquelle le Maroc a réussi de surpasser les soubresauts des turbulences qu’a connues le monde arabe a hissé le Maroc comme modèle et un exemple dans la région. Les réformes politico-institutionnelles, ainsi que la réussite du Maroc dans la modernisation de ses institutions économiques et politiques, sont des éléments majeurs dans la perception américaine. Cela aura bien évidement des répercussions sur le renforcement des relations économiques entre les deux pays via l’Accord de libre échange. Il y a une chose importante, le Maroc peut être un levier important dans le développement de l’Afrique. C’est un paramètre important dans toute équation économique visant à reconquérir le marché africain.

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