Bientôt une offensive terrestre contre Daech ?

On a beau dire à longueur de journée que la guerre contre l’Etat islamique progresse, que sous les coups de boutoir de la coalition, l’espace contrôlé par cette organisation terroriste rétrécit à vue d’œil…Ce constat optimiste est régulièrement contredit par les faits du terrain. Déjà, cette guerre contre l’Etat Islamique a été conçue de manière étrange. Un, la coalitions a décidé, sur un plan stratégique, de se limiter à des frappes aériennes et de sous-traiter la guerre au sol à des combattants kurdes, les Peshmergas. Deux, ces frappes se concentrent essentiellement sur les bastions irakiens de l’Etat islamique, ignorant superbement le vaste territoire que les milices de Daech contrôlent en Syrie. Malgré de nombreuses sollicitations, les Français se refusent de l’attaquer de crainte de faire le jeu de Bachar El Assad.
D’ailleurs à ce sujet, Le président syrien ne rate aucune occasion pour narguer la coalition internationale qui lutte officiellement contre Daech. Dans sa dernière sortie dans les médias britanniques, il a exclu que son pays rejoigne les rangs de cette coalition:  » Non, nous ne pouvons assurément pas (rejoindre la coalition). Nous ne voulons pas, pour une simple raison: nous ne pouvons pas nous allier à des pays qui soutiennent le terrorisme ». L’allusion est claire aux Occidentaux et aux pays du Golfe qui soutiennent les rebelles syriens considérés comme des « terroristes » par le régime.

Par Mustapha Tossa

On aurait pu continuer à vivre dans ce brouillard où le gris de l’approche épouse à merveille le mystère des objectifs. Jusqu’ à ce que Daeh publie sur les réseaux sociaux cette terrible vidéo du pilote jordanien, Moaz Al Kasasbeh. Le choc de telles images, qui ont fait le tour du monde, a provoqué un séisme. D’abord le gouvernement Jordanien, motivé par un légitime désir de vengeance, a mis du carburant dans sa guerre contre Daech, frappes intensives sur ses bastions et éventuel déploiement de forces spéciales à la recherche de la tête planificatrice de Daech.

Cette poussée d’adrénaline jordanienne est épaulée par des déclarations encore plus déterminées de John Allen, coordinateur américain de lutte internationale contre l’Etat Islamique lorsqu’il a affirmé de manière solennelle : "Il y aura une contre-offensive terrestre majeure en Irak (…) Dans les prochaines semaines, quand les forces irakiennes commenceront la campagne terrestre pour reprendre l’Irak, la coalition fournira une puissance de feu importante en soutien (à l’opération)"…. Cette sortie du responsable américain ne tranche pas la grande inconnue du déploiement de troupes étrangères au sol, officiellement refusé par le gouvernement irakien et considéré par le gouvernement syrien comme une violation de souveraineté.

La seconde grande conséquence de cet épisode est le retrait annoncé et assumé des Emirats Arabes Unis de la coalition internationale contre Daech. Avec un dommage collatéral immédiat, la suspension de la participation marocaine à cette guerre qui se faisait, à en croire le chef de la diplomatie marocaine Salaheddine Mezouar, sous commandement émirati. Beaucoup de flou entoure les vraies raisons de ce retrait des Emirats arabes unies et sur ses réelles conséquences sur la guerre contre Daech. Les frappes pilotées par les Emirats ont depuis repris à en croire un communiqué militaire daté et diffusé d’Abou Dhabi, sans que cela ne lève les vraies ambiguïtés qui entourent cette guerre internationale contre l’Etat Islamique ni éclaire de manière crue les divergences au sein de la coalition sur le sujet.

Une seule certitude, le grand bénéficiaire de cette zizanie à la tête de la coalition est cette organisation terroriste appelée l’Etat Islamique. Non seulement elle aurait du répit pour réorganiser ses forces sur le terrain mais profitera de ses divergences au sein de ses détracteurs présumées pour peaufiner ses plans de conquêtes territoriales et sa stratégie terroriste.

Pour toutes ses raisons, la guerre contre Daech semble avoir pris du plomb dans l’aile. Ce qui augure pour, les plus optimistes, d’une longue et interminable bataille contre le terrorisme, là où les enjeux visibles nécessitait une réponse déterminée et tranchante.

Cet épisode "du feu qui brûle le pilote", en direct et en haute définition, a suscité une indignation générale qui dépasse le cercle traditionnel des détracteurs de Daech. En plus des nombreuses références religieuses qui ont tenté de d’ôter toute légitimité à cette action, la parole a été donnée , notamment dans les médias jordaniens à des personnalités sympathisant d’Al Qaida pour bien aggraver l’indignation générale, et souligner la terrible horreur d’un tel geste, étranger à toutes les cultures et à toutes les religions.

La vidéo du pilote jordanien brûlé vif a provoqué des débats au sein des rédactions du monde. Faut-il la diffuser et faire le jeu des terroristes qui visent à s’assurer un impact majeur dans les opinions par le choc et la peur ? Ou faut-il s’en abstenir ? A cette question, seule la chaîne US Fox news a apporté une réponse. On diffuse quitte à passer pour le vilain petit canard de la presse mondiale. En tout cas, ceux qui militaient pour une diffusion "traitée" de cette vidéo mettaient en avance l’argument politique selon lequel l’horreur doit être visible et non cachée pour que l’opinion internationale puisse en mesurer l’ampleur et les dangers.

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