Bachar El Assad rescapé de la solution syrienne

Avant même que cela ne puisse débuter, le processus onusien sur le Syrie semble faire un grand heureux, le président syrien Bachar El Assad. Même si Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères français ou John Kerrey sécretaire d’Etat américain affirment devant tous les caméras que Bachar El Assad doit partir à cause des crimes qu’il a commis à l’égard de son peuple, aucun mot sur ce point précis ne figure dans la résolution présentée comme historique de l’ONU sur la Syrie.

Par Mustapha Tossa

En effet, les nations unies viennent de voter à l’unanimité une résolution sur la crise syrienne qui entame sa sixième année. Une belle unanimité inédite où russes, américains, européens, iraniens et arabes ont paraphé une feuille de route censée paver le chemin à la paix et à la stabilité en Syrie. Le tout commence par l’obtention d’un cessez le feu suivi d’une négociation entre le régime syrien et son opposition, la formation d’un gouvernement d’union nationale et l’organisation d’élections générales censées accoucher d’un pouvoir politique représentatif de la diversité et de la volonté syrienne. Tout cela sur un calendrier de six à dix huit mois, sans un mot sur le sort de Bachar El Assad.

Malgré ces belles intentions affichées et validées par les nations unies, le pessimisme est de rigueur dans la plus part des commentaires et réactions. Car le diable se cache souvent dans les détails. Dans le cas syrien, trois défis majeurs et immédiats obscurcissent l’horizon. Le premier est la capacité de la communauté internationale à obtenir ce fameux cessez le feu de la part des différents protagonistes et à le coupler de manière harmonieuse avec la déterminante guerre contre Daesh. Après cinq années d’une sanglante guerre, le cessez le feu ne s’obtient pas d’un claquement de doigt ou d’une baguette magique, sauf à croire que le groupes qui se livrent une guerre sans merci en Syrie obéissent au doigt et à l’œil à leurs parrains qui ont signé la résolution de l’ONU.

Le second défi est la formation d’une délégation de l’opposition syrienne censée négocier avec le régime syrien de Bachar El Assad. C’est une tâche qui paraît tout aussi compliquée, Tant cette opposition est traversée par des contradictions paralysantes, déchirées qu’elle est entre de multiples allégeances aux agendas souvent antagonistes. Tiraillée par l’influence structurelle d’Istanbul, ou celle idéologique de Ryad ou encore celle sonnante et trébuchante de Doha, cette opposition a depuis longtemps perdu sa boussole politique. En témoigne les multiples structures qui ont ambitionné de la représenter sans succès ces cinq dernières années.

Le troisième défi est de définir parmi les groupes qui livrent la guerre à Bachar El Assad qui est terroriste pro Daesh et qui est simplement rebelle "de l’opposition syrienne modérée" pour reprendre la terminologie occidentale de cette qualification. Certains groupes financés par l’Arabie Saoudite ou le Qatar sont clairement identifiés comme terroristes par certains pays qui refusent absolument de les intégrer au processus onusien de transition et proposent de les éliminer. Ce qui provoqués déjà des grincements de dents et de réticences qui assombrissent le bel enthousiasme sur la Syrie initié par l’entente inédite entre Washington et Moscou à l’ONU. Et par conséquent font en sorte que Bachar El Assad sorte indemne de cette grande ébullition diplomatique sur la Syrie.

La morale de l’histoire, dans ce grand bras de fer entre américains et russes sur la Syrie, Moscou semble avoir eu le dernier mot en interdisant qu’aucune référence ne soit faite au départ de Bachar El Assad. Moscou le considère comme le meilleur rempart contre Daesh. La France, la seule grande puissance qui exigeait son départ a dû changer de fusil d’épaule et d’échelle des priorités après les attentats terroristes du 13 novembre dernier. Résultat, Bachar El Assad est moralement dénoncé mais politiquement incontournable grâce à ses parrains russes et iraniens.

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