Avec « Savage Times », Hanni El Khatib revendique avec rage ses origines

Le rockeur américain Hanni El Khatib raconte avec une fougue intacte l’histoire de ses origines dans "Savage Times", son nouveau disque à paraître vendredi, dans lequel il s’est affranchi du carcan des règles de la production musicale.

Après trois albums de garage rock très efficaces qui l’ont propulsé depuis 2011 comme une figure montante de la scène alternative, l’artiste a voulu bousculer ses habitudes, en abordant pour la première fois et de manière frontale la question identitaire. En l’occurrence la sienne.

D’origine palestinienne par son père et philippine par sa mère, El Khatib est né à San Francisco il y a 35 ans. Son look californien, tatoué et gominé, n’en laisse rien paraître, mais à l’évocation de son patronyme arabe, il assure avoir souvent dû faire face aux préjugés du public. Quand certains le classent spontanément dans la catégorie artiste de musique du monde, d’autres lui demandent si Hanni El Khatib n’est pas un nom de groupe.

"Je ne peux seulement parler que de ce que je connais, ce que j’ai traversé, la façon dont j’ai été traité à cause de mon nom de famille", explique à l’AFP le chanteur attablé dans un bar de Los Angeles.

Sur la chanson "Born Brown", rythmée par des boucles électro-psychédéliques, c’est avec rage qu’Hanni El Khatib chante ses origines, hurlant à la fin de ces deux minutes punk "I was born brown ! Born brown!" ("Je suis né marron ! Né marron!").

Dans "Mangoes and Rice", et ses guitares saturées rappelant celles de Sonic Youth ou des Pixies, El Khatib se souvient avec nostalgie des plats que lui faisait sa mère.

"Savage Times"

El Khatib, qui a dédié une chanson aux migrants lors d’une soirée de lancement de son disque à Los Angeles, assure ne pas avoir attendu l’élection de Donald Trump à la présidence pour que sa conscience s’éveille, mais il refuse de devenir pour autant un artiste politique.

"Ce n’est tout simplement pas ma place, ni mon rôle", dit le musicien qui travaillait en tant que directeur artistique pour une marque de vêtements, avant de vivre de sa musique.

"Savage Times" marque également une rupture dans la discographie de l’Américain par son modus operandi.

Sur la route à l’automne 2015 pour défendre son troisième opus "Moonlight", il met un terme à sa tournée après l’annulation de son concert prévu au Bataclan, où une attaque jihadiste a fait 90 morts le 13 novembre.

Il en profite pour retourner immédiatement en studio. Mais plutôt que de faire un album traditionnel, il enregistre les morceaux comme ils viennent et les met en ligne gratuitement. Ce qui contrarie ses associés dans le label qu’il co-dirige, Innovative Leisure.

"Ce disque est ce que j’ai fait de plus libérateur musicalement, car je me suis émancipé du format album, assure-t-il. Quand je fais un album, je l’envisage avec l’idée d’avoir une cohérence sonore. Là ce n’était pas le but. Je cherchais à bouleverser mes codes de production."

"Savage Times" en est le résultat brut. Dix-neuf titres collectés à la manière d’une mixtape, typique de ces compilations maison façonnées par les artistes hip hop.

"Les rappeurs font ça tous les jours, pourquoi ne l’aurais-je pas fait ?", demande-il.

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