Au Maroc, un remaniement gouvernemental qui peut rebattre les cartes

Narjis Rerhaye (A Rabat)

Depuis le séisme politique qui a vu la sanction de 9 ministres actuels et passés, tous ayant eu des responsabilités sous le gouvernement Benkirane, le microcosme politico-médiatique n’en finit de bruisser de rumeurs. Les scénarios d’un remaniement annoncé se font aussitôt qu’ils se défont.

Saadeddine El Otmani le sait. Les prochains jours ne seront pas de tout repos. Quelques mois seulement après sa constitution après une très longue maïeutique, le gouvernement est soumis à un remaniement qui est loin d’être simplement technique. Avec qui et sans qui le fera-t-il ? Gardera-t-il la même majorité ? El Othmani 2 devrait être annoncé dans les prochains jours.

Mardi 24 octobre, Mohammed VI a en effet chargé le chef de gouvernement de faire des propositions de ministres pour remplacer les postes vacants. L’habitat, l’urbanisme et la politique de la ville, la santé, l’éducation nationale et la formation professionnelle sont des postes à pouvoir et des fauteuils ministériels à occuper.

Dans certains états-majors partisans, la nuit de mardi à mercredi a été particulièrement courte. Au PPS, le coup est rude. Le parti a été pratiquement décapité. Deux de ses ministres sur trois ont été démis de leurs fonctions. Parmi eux, Nabil Benabdallah, un poids lourd du gouvernement et qui est aussi le Secrétaire Général du parti. Il est en mission à Londres, quand il apprend la nouvelle de sa révocation. Une quatrième figure du PPS, Amine Sbihi, ancien ministre de la culture sous le gouvernement Benkirane est également mise en cause dans le dossier « Al Hoceima » et ne sera plus jamais appelé à occuper de hautes fonctions. Quel avenir gouvernemental pour le PPS ? Comment les anciens communistes comptent-ils réagir ? Le bureau politique du PPS se réunit jeudi 26 octobre, Nabil Benabdallah devant rentrer de Grande-Bretagne dans la journée de ce mercredi. « Nous discuterons de toutes les options possibles, y compris celle du retrait de la majorité gouvernementale. Le séisme est fort. On ne peut agir dans la précipitation », confie sous le sceau de l’anonymat un cacique du PPS.

Le Mouvement populaire, lui, ne réunit son bureau politique que vendredi. S’il perd un ministre (Mohamed Hassad) et un secrétaire d’état (Larbi Bencheikh) tous deux fraichement harakis, c’est l’incompétence de ses anciens ministres représentant cette formation politique au sein de l’Exécutif Benkirane et coupables d’avoir failli à leurs responsabilités qui laisse un goût amer. Lahcen Haddad (tourisme) Hakima el Haité (environnement et championne du climat), Lahcen Sekkouri (jeunesse et sport) sont (ou ont été, Haddad ayant rejoint l’Istiqlal) des ténors du Mouvement populaire et ils sont désormais hors course. « Qui remplacera Mohamed Hassad et Larbi Bencheikh ? Il est trop tôt pour répondre à une telle question. Tout cela se fera par étape. Il faudra aussi attendre la rencontre du chef de gouvernement avec les leaders de la majorité pour avoir une idée plus claire », croit savoir un responsable du Mouvement populaire, réputé proche de Mohand Laenser, le patron du MP. Dans la foulée, notre interlocuteur haraki balaie d’un revers de la main toute ambition de leader du MP qu’aurait eu Mohamed Hassad. « Il n’a jamais été question de cela. Aujourd’hui plus que jamais, il est exclu que Hassad préside aux destinées du Mouvement populaire ! » s’exclame notre source.

Réunion des instances exécutives des partis touchés par le séisme politique, rencontre de la majorité, tractations : Saadeddine el Othmani sait que le temps est compté et qu’une une course contre la montre a été enclenchée. Le Maroc ne peut plus se permettre une nouvelle année blanche et sèche. Le scénario d’une nouvelle majorité à constituer est un vrai cauchemar pour le chef de gouvernement car cette option remettrait les compteurs à zéro. A l’Istiqlal, on se refuse pour l’heure de jouer les bouches trous en occupant les postes vacants au cas où le PPS déciderait de claquer la porte du gouvernement. Des technocrates sous l’habillage « société civile » pourraient-ils être appelés en renfort ? En tout cas, cela ôterait une épine du pied du Dr El Othmani.

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